Monaco-Matin

Le pape réveille la polémique sur la « théorie du genre »

Le souverain pontife a critiqué son enseigneme­nt dans les manuels scolaires français, l’accusant d’être le « grand ennemi du mariage ». La ministre de l’Education nationale n’a guère apprécié

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Le pape François a accusé les manuels scolaires français de propager un « sournois endoctrine­ment de la théorie du genre ». suscitant les critiques à gauche des ministres Najat Vallaud-Belkacem et Marisol Touraine, et des réactions plutôt nuancées à droite. Dimanche, dans l’avion qui le ramenait du Caucase, le souverain pontife a raconté une anecdote : un père de famille catholique français lui a confié comment son fils de dix ans, interrogé sur ce qu’il voulait faire plus tard, avait répondu : « Être une fille. » « Le père s’est alors rendu compte que dans les livres des collèges, la “théorie du genre” continuait à être enseignée, alors que c’est contre les choses naturelles », selon le pape. Pour le souverain pontife, « faire un enseigneme­nt dans les écoles sur cette ligne » s’apparente à une volonté de « changer les mentalités » ,àune «colonisati­on idéologiqu­e ». Ces propos, sans être totalement inédits dans la bouche de François, n’ont pas manqué de faire réagir en France. « Le pape souffle avec le vent de la réaction », a accusé, pour sa part, l’associatio­n féministe et LGBT Les Effronté-e-s. Les manuels « ne comportent aucune référence ni mention de cette “théorie du genre”, mais confortent les principes républicai­ns de liberté et d’égalité », a rectifié le groupe des éditeurs d’éducation. «Iln’yapasde “théorie du genre”, il y a des “études de genre” qui visent à savoir comment le genre est construit socialemen­t, ce qui est extrêmemen­t intéressan­t. Entre “théorie du genre” et “théorie du complot”, il n’y a pas bien loin : il est un peu dommage que le pape chevauche ce genre de sujets », a abondé Frédéric Sève, secrétaire général du Sgen-CFDT, syndicat réformiste d’enseignant­s. Pour la ministre des Affaires sociales et de la Santé Marisol Touraine, le pape « a fait preuve de plus de discerneme­nt » par le passé. « C’est une erreur de sa part. Personne ne l’attendait làdessus. Le débat en France n’existe pas. C’est déplacé, inutile », a-t-elle confié à l’Agence France Presse.. La ministre de l’Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, a « regretté » sur France Inter une « parole pour le moins légère et infondée » : « Sur des sujets aussi sérieux que cela, on a donc aujourd’hui des intégriste­s capables d’embarquer, y compris le pape, dans leur folie mensongère? Moi ça me met très en colère, honnêtemen­t. »

« Polémiques stériles et infondées »

« Qui êtes-vous, Mme @najatvb, pour regretter des “paroles légères et infondées” du pape ? », a taclé le député Les Républicai­ns Hervé Mariton, opposant au mariage homosexuel. « Certaines polémiques sont stériles et infondées. Il suffit de lire ce qu’a dit le pape pour s’en apercevoir », a relativisé dans un tweet le porte-parole de la Conférence des évêques de France, Mgr Olivier Ribadeau Dumas. Le débat sur la « théorie du genre », dont les contempteu­rs agitent la peur d’une « indifféren­ciation sexuelle », avait été virulent en 2014. Mais les propos du pape ont trouvé, hier, assez peu de relais à droite, hormis dans les cercles antimariag­e gay. « Je crois qu’il est allé un peu vite en besogne », a déclaré la députée LR Nathalie Kosciusko-Morizet.

Une histoire de puberté...

L’ancienne secrétaire d’Etat à la Famille Nadine Morano (LR) s’est montrée prudente : « Sur cette question je suis moins inquiète que le pape sans doute, mais je ne vois pas aussi à quel[s] livre[s] il fait référence. » La présidente du groupe éducation du Syndicat national de l’édition, Sylvie Marcé, a tenu, hier sur Franceinfo, à « rassurer » : « Les seuls manuels qui pourraient évoquer le sujet sont les manuels de sciences de 6e. On apprend aux enfants ce qu’est la puberté, mais c’est un chapitre scientifiq­ue qui dit juste comment les enfants évoluent et comment se manifeste la puberté. Mais il n’y a rien du tout concernant une théorie du genre.» Cette polémique jette, en outre, une lumière vive sur la relation ambivalent­e qui lie le pontife sud-américain à la France, évoquée avec affection après chaque attentat, mais dépeinte en « fille aînée » de l’Eglise pas assez « fidèle » ou critiquée pour sa laïcité « exagérée ». Le pape François, après trois ans et demi de pontificat, n’a toujours pas confirmé de voyage dans l’Hexagone.

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