Bombe mode d’emploi: un agent de la Ville de Cannes en prison
S’il est effectivement question de drogue, de prostituées et de mafia dans les paroles de Christian E, celles-ci ne visent pas l’intéressé, assurait Infinit’ au terme de son audition par la division économique et financière de la police judiciaire : « Les couplets parlent de moi, pas du maire. C’est ce qu’on appelle de l’ego-trip », avait-il assuré. Hier, il n’était pas présent pour assister à la décision du tribunal. Mais aussitôt joint par son conseil, l’artiste s’est dit « soulagé ». « Content » que l’ampleur qu’avait prise l’affaire soit ramené à de simples paroles d’une chanson. Le buzz suscité par la plainte déposée à la fois par la Ville de Nice et par Christian Estrosi avait d’ailleurs profité au titre qui peinait à percer sur les réseaux sociaux. Depuis, le clip a été « relooké » avec la participation de plusieurs artistes de la scène hip-hop nationale. Et il a été visualisé plus de 320 000 fois sur YouTube. Djilali O., un Algérien de 40 ans, blouson noir, pantalon de treillis couleur camouflage, adore les armes et le fait savoir sur les réseaux sociaux. Agent d’entretien à la mairie de Cannes, il a affiché sur son Facebook un mode d’emploi pour confectionner des détonateurs et des bombes. Il s’est retrouvé, mardi, en garde à vue dans les locaux de la police judiciaire de Nice. Hier, il était présenté au tribunal correctionnel de Grasse dans le cadre d’une comparution immédiate. Il doit répondre du délit de « diffusion par voie électronique de procédés permettant la confection d’engins explosifs ». Souhaite-t-il être jugé sur le champ ou préfère-t-il bénéficier d’un délai pour préparer sa défense?
La crainte d’un « passage à l’acte »
Le prévenu hésite longuement. Dans tous les cas, il redoute d’être incarcéré. Il a raison. Le procureur Parvine Derivery demande un placement en détention provisoire. « Son compte Facebook est intitulé « La Menace », souligne le procureur. Il prend la pose avec des armes. Ses recherches sur Internet concernent la manipulation d’armes et des logiciels pour empêcher toute identification. Tout cela laisse craindre un passage à l’acte. » Autres arguments en faveur d’une détention provisoire, selon l’accusation: «Iln’a pas d’attaches sur la région. Il a en plus de la rancoeur après avoir rompu avec sa femme et ses enfants sont restés en région parisienne ». Avocat de cet internaute aux inquiétants centres d’intérêt, Me Emilie Lopez plaide en faveur d’un contrôle judiciaire. « Il n’a pas d’antécédents judiciaires. Il a simplement appuyé sur la touche “partager”. Il a un emploi, une adresse. Son passeport est périmé. Il peut pointer quotidiennement au commissariat si vous le souhaitez. » Djilali O., dangereux terroriste? Si c’était le cas, le parquet spécialisé aurait été saisi de cette affaire. « On peut donner toute la coloration que l’on veut à ce dossier mais l’analyse de son téléphone n’a rien donné. Les photos des armes factices datent de 2010. Il est surtout désemparé après une rupture familiale. » Le tribunal présidé par Pierre Kuentz s’est rangé hier soir aux arguments du procureur. Le prévenu sera jugé le 14 novembre. Il devra attendre son procès en prison.