Monaco-Matin

Sarkozy, l’homme qui veut faire mentir les sondeurs

- Par MICHÈLE COTTA

Le Zénith était bourré à craquer. Nicolas Sarkozy, qui y a tenu hier son premier grand meeting de campagne, a, de ce point de vue, gagné son pari. Drapeaux, trompettes, rangs serrés, enthousias­me collectif, rien ne manquait à la fête. L’ancien président de la République a joué de ses atouts principaux. D’abord, son éloquence: sans conteste, il est un orateur de meeting, un des meilleurs sur le marché politique. Il faut dire que depuis trente ans, il a eu bien souvent l’occasion de parcourir la France, de tréteaux en tréteaux. Il aime les foules, les réunions publiques, les joutes de tribune, les passes d’armes avec ses adversaire­s, et les applaudiss­ements de ses auditoires. Ensuite, il s’appuie sur les militants de Les Républicai­ns, qui sont en majorité en phase avec lui sur les thèmes qu’il a choisis aujourd’hui de développer dans la campagne à la primaire de la droite: la sécurité, le week-end même où des policiers ont été blessés par des cocktails Molotov lancés par des bandes organisées en banlieue parisienne; le contrôle des flux migratoire­s, qui inquiètent ses électeurs traditionn­els ; la lutte contre le terrorisme qui concerne tous les Français. Lorsqu’il évoque ses deux propositio­ns de référendum­s, sur la suspension du regroupeme­nt familial et l’internemen­t préventif des «fichés S», peu importe qu’ils soient ou non juridiquem­ent difficiles, sinon impossible­s à organiser: il sait qu’il a derrière lui la quasi totalité des militants qui l’écoutent. Même emballemen­t de son auditoire lorsqu’il oppose les élites à la France réelle. Enfin, au moment où les enquêtes d’opinion le montrent largement dépassé par Alain Juppé, il compte bien, dans cette démonstrat­ion de force, faire mentir les sondeurs, et démontrer que la seule vraie victoire est celle qui est acquise sur le terrain, auprès de ceux qui l’ovationnen­t dans les meetings ou qui se pressent dans les librairies pour lui faire dédicacer son dernier ouvrage. Les efforts qu’il est en train de déployer peuvent-ils arrêter l’ascension d’Alain Juppé? Nicolas Sarkozy parviendra-t-il à rebondir? Il ne faut pas être un habile analyste pour comprendre que, derrière ses propos sur ceux qui, ne disant et ne promettant pas grand-chose pendant leur campagne, ne feront rien s’ils sont élus, il a dans son collimateu­r le maire de Bordeaux. C’est que le combat à la primaire républicai­ne se réduit désormais, au grand dam des autres candidats, à un duel Sarkozy- Juppé. En attaquant aussi durement Alain Juppé, tandis que celui-ci joue l’apaisement, Nicolas Sarkozy court le risque d’apparaître comme le diviseur face au rassembleu­r. Les Français veulent-ils un Président qui les rassure, ou un Président de rupture et de combat? Convaincu que les Français veulent tourner la page du quinquenna­t Hollande, qu’ils aspirent avant tout à la sécurité face au terrorisme et à l’immigratio­n, Nicolas Sarkozy mise aujourd’hui sur la rupture. Son principal rival préfère parler du calme retrouvé, de la reprise de la croissance et du retour d’une France heureuse. Les jeux sont faits. Entre eux, rien ne va plus.

«Il compte bien démontrer que la seule vraie victoire est celle acquise sur le terrain, auprès de ceux qui l’ovationnen­t.»

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