Patrick Mottard, l’engagement et la vie
Le président régional du Parti radical de gauche, qui fut tout près d’être maire de Nice en 2001, ne vit pas que pour la politique. Il cultive d’autres joies, entre enseignement, voyages et écriture
Je ne me suis jamais senti de plonger complètement en politique. Cela me vaut l’image de quelqu’unde dilettante. Mais je crois qu’on peut faire de la politique en gardant un métier et que cela donne même une vision moins sèche des réalités. » PatrickMottard le reconnaît sans détour, il n’est pas un monomaniaque de la politique. Le patron régional du Parti radical de gaucheabien d’autres choses dans sa vie. À commencer par l’enseignement, qui l’occupe une vingtaine d’heures par semaine à la fac. « Avec toujours autant de plaisir, confie-t-il. Après trente ans de carrière, j’éprouve lamêmepassionde la pédagogie, il n’y a aucune lassitude. Il faut dire que les étudiants constituent un public en or, je suis un privilégié. » Ce beau métier-là lui laisse aussi le loisir d’assouvir plusieurs autres de ses passions : les voyages, l’écriture, le théâtre ou le sport. Patrick Mottard est né en Bourgogne, où son grandpère maternel fut dans les années vingt le plus jeune maire de France, à Cruzille, avant de mourir par la suite en déportation. Lorsqu’il rencontre samère, son père revient lui aussi des camps de la mort, Dachau notamment, où il a contracté une polio qui le laisse handicapé. « Quand j’avais dix ans, nous nous sommes installésàNice, dans le quartier de Pasteur. Mes parents sont venus y chercher le soleil, mais aussi y fuir le regard des gens sur le handicap qui était plus dur dans la France profonde. » Les petits pieds-noirs, exilés eux aussi d’une manièreplus rude encore, serontalors ses principaux copains de jeu. PatrickMottardvas’engager en politique en adhérant au PS après la défaite de Mitterrand faceàGiscard en 1974. « Sans plan de carrière, je ne voulais pas forcément prendre de responsabilités. »
Les circonstances le conduirontàdiriger le PS maralpin, puis à conquérir le canton historique de la familleMédecin, avant de rater de justesse la mairie de Nice en 2001. Avec son épouse Dominique Boy-Mottard, conseillèremunicipale niçoise, il a très tôt été attiré par les pays de l’Est. Non par conviction communiste, au contraire, mais par curiosité. « J’aurais aimé être journaliste, remarque-t-il, j’adore être dans les endroits où les choses se passent. Et du coup, je regretted’être un peu comme Fabrice à Waterloo [lehéros de La Chartreuse de Parme de Stendhal, ndlr], d’arriver toujours après. » Dominique et Patrick ont ainsi roulé leur bosse de la Bulgarie à Moscou, « avec des billets scotchés sous les sièges parce que nous n’avions à l’époque pas de carte bleue ». « C’était un peu Tintin en Syldavie, rigole-t-il, nous voulions voir ce qu’il y avait vraiment de l’autre côté du rideau de fer. » Lui, d’ordinaire si posé, a même passé un jour et une nuit en prison en Bulgarie, « dans une cellule où je ne pouvais ni tenir debout nimecoucher, pour avoir cassé le nez à une garde-frontière un peu trop agressif avecma femme » . Elle et lui n’ont depuis cessé de courir le monde. « Nous sommes allés deux fois en Afrique du Sud, une dizaine de fois aux États-Unis, trois ou quatre fois au Canada, àJérusalem… On aime la route, le road movie », résumecepassionné decinémaquiconcède « aller voir une centaine de films par an et ne jamais manquer un Festival de Cannes » . Patrick Mottard, qui dit aimer la cohérence, greffe quand il le peut sur ses voyages un autre de ses plaisirs, le footing. « Quand j’arrive dans une ville nouvelle, j’adore y faire 10 ou 20 km à pied pour la découvrir. J’aime aussi le côté populaire des courses pédestres, on ne s’y bat pas contre les autres mais contre soi-même, c’est une compétition sans agressivité. »
Ses voyages servent également à alimenter ses envies d’écriture et de théâtre. commece 1er mai placeMaurice-Thorez où il a imaginé une ville de Nice sous domination communiste. Ou encoreceoneman- showau titre explicite, Travel anecdotes, qu’il jouera au printemps. Entreautres, Patrick Mottard aégalement publié un recueil de nouvelles, Baie des songes. « La Promenade des Anglais, note-t-il, est l’endroit où je me sens le mieux à Nice. C’est d’ailleurs pour cela que la symbolique de l’attentat de juillet a été si forte. Elle est le symbole de l’ouverture sur le monde, de la grande ville méditerranéenne et internationale que doit être Nice. » Voilà donc Patrick Mottard, politique sans chichis, ouvert au lendemain et aux saveurs multiplesde l’existence. Il ne recèle au fond qu’un réel mystère : cet étrangeaccent, mélange de suisse, de forézien et de québécois, dont lui-même ne saurait dire l’origine. Une forme de bouillon de culture qui lui va bien.