Dans la «Jungle», attente fébrileavant les départs
Moins de 24 heures avant le début de l’évacuation, le sujet était hier sur toutes les lèvres dans la « Jungle » de Calais, dès la matinée brumeuse et glaciale. Ici, des hommes qui se réchauffent autour d’un brasero écoutent les ultimes conseils des bénévoles – « C’est le dernier jour où on peut les aider » , dit l’une d’entre elles. Là, dans son échoppe, Khan, un Afghan, se demande ce qu’il vapouvoir fairedesamarchandise: « Vous savez si je pourrai l’emmener? » , interroge-t-il, désignant ses palettes d’oeufs et ses cagettes de fruits. Avant d’affirmer sans trop y croire vouloir « aller dans la ville d’après, à Paris » . En début d’après-midi, les représentants de plusieurs services de l’État ont distribué dans les hébergements en dur du centre d’accueil provisoire et du centre Jules-Ferry des flyers expliquant comment se rendre auhangar d’où partiront aujourd’hui les premiers bus à destination des centres d’accueil et d’orientation. Les migrants recevaient également unebande dessinée détaillant leur parcours après l’arrivée. Quitte à seheurter aux réticences de certains, comme Karhazi, unAfghan: « On le sait, tout ça. Il faudra nous forcer pour partir. Nous, on veut aller en Grande-Bretagne. Pourquoi n’y a-t-il rien de prévu pour les majeurs? » D’autres maraudes étaient organisées par les services de l’Office français de l’immigration et de l’intégration et de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). « On leur explique qu’il faut qu’ils quittent Calais comme des milliers d’autres l’ont fait avant eux, et qui à 70% ont obtenu l’asile » , a expliqué Pascal Brice, directeur général de l’Ofpra.
« A Paris, il faut dormir sous les ponts »
Mohamad, autre Afghan, est déjà convaincu: « Je veux demander l’asile, c’est pour ça que je suis venu à Calais. À Paris, il faut dormir sous les ponts. Ici, il y a des associations, ça va vite pour la demande. » Après une nuit où des heurts sporadiques – usuels – se sont produits entre migrants et forces de l’ordre sur la rocade portuaire, les journalistes de toutes nationalités affluaient hier. Devant le hangar d’où partiront les migrants par autocar aujourd’hui, des barrières délimitaient déjà les files d’attente prévues pour les différents publics (hommes seuls, familles, « vulnérables »). Des voitures de la Sécurité civile entraient à intervalles réguliers dans le périmètre, situé à 300 mètres de l’entrée la plus proche du campement. « Le gouvernement rêve qu’en détruisant le camp, cela va régler le problème migratoire, mais c’est une erreur: une bonne partie des gens reviendront, sans compter qu’il y a toujours de nouveaux arrivants » , prédisait hier François Guennoc, vice-président de l’associationL’Auberge des migrants.