Animateur TV et comédien: la viede Jean-Louis Debré e
A 72 ans, à peine quittée la présidence du Conseil constitutionnel, le voilà qui lance une émission décalée, et qui écrit une série télévisée. Il s’est confié lors du salon du livre de Villeneuve-Loubet
J’étais seul, l’autre soir, au Théâtre Français, oupresque seul; l’auteur n’avait pas grand succès. Ce n’était ‘‘que’’ Molière… » Pôle Escoffier, dans la salle de spectacle de VilleneuveLoubet : seul face aux 450 sièges vides, Jean-Louis Debré déclame la ‘‘Soirée perdue de Musset’’ devant une poignée d’interlocuteurs médusés. Une facette inattendue pour un homme qui vient de quitter la présidence du Conseil constitutionnel, une desplushautes fonctions de l’Etat. Et ce n’est pas la seule: depuis ce lundi, le voilà aussi animateur de télévision dans une émission iconoclastequ’il a créée, et qui résume bien sa nouvelle vie: « Conseil d’indiscipline ». Quelle mouche l’a donc piqué? « Lorsque j’ai pris la présidence du Conseil constitutionnel, à la première séance j’avais à ma droite et à ma gauche deux hommes qui s’aimaient d’amour tendre » , répond à la façond’un conteur Jean-Louis Debré en laissant de côtéMusset. « J’ai dû faire che que mon Premier minichtre n’avait pas fait » enchaîne-t-il, cette fois dans lerôle d’imitateur, chuitant comme Valéry Giscard d’Estaing. Puis se donnant la répartie façon Chirac: « Peut-être, hmmmm, mais moi j’ai été réélu » .
« Autodérision salvatrice »
La « rivalité » des deux anciens chefs de l’Etat lui a donné du fil à retordre quand il présidait le Conseil constitutionnel. A présent, libéré de ses fonctions, il se lâche sur les hommes politiques ( et il en rit publiquement. « Ce qui m’a toujours sauvé, c’est l’autodérision. J’ai toujours pensé qu’ils devraient y enavoir davantage. Ça leur éviterait d’attraper la grosse tête et ça leur permettrait de garder les pieds sur terre. Je ne m’ennuyais jamais en politique. Je racontais des histoires aux préfets et à mes collègues. Il faut aussi avoir de l’humour. Les gens ont besoin que les hommes politiques soient proches d’eux ». Aujourd’hui, pour lui, la page est tournée: « C’est fini. Après trente ans de vie politique et quinze ans de magistrature, je veux découvrir autre chose ». Après l’avoir vu faire sa rentrée comme chroniqueur dans l’émission radio ‘‘La cour des grands’’ d’Alessandra Sublet sur Europe1, les Français ont eu la surprise de le découvrir lundi soir en animateur de télé dans une émission au titre lui aussi potache: ‘‘Conseil d’indiscipline’’.
De l’autre côté du miroir
Le voilàpasséde l’autrecôté du miroir, avec jubilation: « On interroge les invités commeon interroge les politiques: sans concession. Avec de l’humour et de l’impertinence, mais sans ricanement, ni insolence ni mépris. C’est mon concept ». Dans le rôle de « proviseur », il mène le jeuavec un « prof principal » et un « CPE » « qui sont toujours contre, alors que la conseillère d’orientation est toujours pour. Il y a deux invités. Le premier pour découvrir quelqu’un. Pourquoi interviewer toujours les mêmes, qui n’ont souvent rienàdire? J’ai écrit un livreavec un SDF. Lui avait des choses à dire ». « Le second invité est une personnalité, pour une interview de fond. Je prépare beaucoup » , ajoute JeanLouis Debré: déformation professionnelle de l’ancien juge d’instruction? « Lhermitteadit qu’il adorait raconter n’importe quoi aux journalistes. Ehbien il va falloir qu’il s’explique là-dessus ». Et ce n’est pas tout. Il en est déjà à son 22e livre dans de nombreux registres: politique, justice, roman, polar, essai… Il va en ajouter un nouveau: « En cemoment, je rédige un feuilleton télévisé de 9 épisodes de 50 mn sur les ‘‘amis de trente ans’’ ». « L’amitié est impossible en politique, affirme-t-il. Plus on monte dans la hiérarchie, plus les postes deviennent rares, et plus les couteaux s’aiguisent » Son amitié avec Chirac? « Une exception. J’ai toujours été marginal ». « En fait, c’est un vieux rêve. Mon rêve depuis toujours c’est le théâtreet lecinéma », conclut-il. A72ans, le début d’une troisième vie. 1-Dans son livre « Ce que je ne pouvais pas dire » (nos éditions du 21 avril et du 2 juin derniers).