François etManuel
Ils formaient l’un de ces gentils petits couples mariés par la loi Taubira. François, l’intello corrézien et Manuel, l’Espagnol migré de Barcelone à Paris. Ils s’entendaient si bien qu’ils semblaient avoir mis au rancart leurs épouses d’un premier lit, Julie la petite comédienne et Anne la grande violoniste. On les voyait le mercredi matin prendre leur petit- déjeuner tête- à-tête avant de retrouver trois douzaines de copains de tous les sexes. Manuel encourageait François : « Voyage! Je te garde la place ». En toutes occasions, ils faisaient équipe. Pour décorer un pétrolier Qatari par ailleurs financier de djihadistes; pour poser la première pierre d’un logement social destiné à des retraités pas encore nés. Avec des tics de langage communs. L’un disait « J’en appelle à la responsabilité de tous » tandis que l’autre renchérissait « C’est le devoir de chacun » . François avait promis à Manuel que son CDD ne prendrait fin qu’avec le quinquennat. Manuel ne prenait jamais la parole sans remercier son bienfaiteur. Et puis, la comédie démocratique a recommencé, programmée par un calendrier faisant bon marché des amitiés républicaines. Manuel a lâché François comme les autres avec l’espoir de moins en moins déguisé de prendre sa place. Depuis, François hésite à quitter son bureau de peur d’y retrouver Manuel rameutant grâce à « l’interministériel » tous les candidats à l’abandon en rase campagne électorale.