Poor lonesome Sarko
D’une seule phrase, à l’ironie assassine – « millions de chômeurs, % dedette, le totalitarisme islamique, et le sujetmajeur de la campagne des primaires, c’est le sort dumairedePau… » –, François Fillon a flingué la contre-attaque de Nicolas SarkozycontreAlain Juppé. En difficultédans les sondages, l’ancien Président pense avoir trouvé lamartingale: pilonner ce qu’il croit être lepoint faible de son rival, son alliance avec François Bayrou, le traître, le renégat, l’homme qui a fait élireHollande en , celui dont les salles Les Républicains (LR) ne se lassent pas de conspuer lenom. Mais un studio télé n’est pas unmeeting. L’offensiveafait pschitt. Non seulement Juppé ne s’est pas laissé déstabiliser par cette « querelle subalterne » , mais Nicolas Sarkozy, lâchépar les autres protagonistes, y compris par Copé qu’on ne peut pas soupçonner de centrisme, a vécu là un grand moment de solitude. En quoi le « moment Bayrou » offrebien un résumé de ce deuxième débat de la primairede ladroite et du centre ? Le duel JuppéSarkozyn’a pas eu lieu. Plus exactement: Nicolas Sarkozy a cherché son aîné; il ne l’a pas trouvé. Il entendait faire leprocès de la ligne « centriste » du mairedeBordeaux et de son projet d’ « alternance molle » . C’est lui qui s’est retrouvédevant un tribunal. Cerné. Attaqué de toutes parts. Sauf, ironiquement, par Alain Juppé, qui avait choisi la posture « Moi, je suis au-dessus de ça » . Sans cesse renvoyé auxéchecs de son quinquennat et à sadéfaitede , accusé de « velléité » et de « versatilité » par Jean-François Copé, de reniement par Bruno Le Maire, et de tous les péchés de la Terre par Nathalie Kosciusko-Morizet, l’ancien Président adûpasser son temps à ferrailler et se justifier. Dans la moulinettedes primaires, il n’est plus le « Président Sarkozy » mais un candidatparmi les autres. De plain-pied. Avoir étén’est pas unavantage. Plutôt un handicap. Nicolas Sarkozy peut bien montrer ses galons, invoquer son expérience sur lemode « Moi j’ai étéprésident, je sais de quoi je parle » , tenter de rabaisser ses rivaux en rappelant qu’ils étaient hier ses subordonnés ou ses obligés, rienn’y fait: il n’inspire plus ni peur, ni déférence. « Tuas été une très bonne porte-parole » , lance-t-il, condescendant, àNKM. Et elle, du tac au tac: « Justement, j’ai vudeprès, et maintenant je suis candidate contre toi. » Quel sera l’impact sur les électeurs de laprimaire? Difficileàdire. Dans la dramaturgie télévisuelle, les spectateurs ont tendanceàprendreparti pour celui qu’on attaque. La position du « héros solitaire », seul contre tous, vaassezbien à Sarkozy. Il a souvent su en tirer avantage par le passé. Elle n’est pas forcément pour déplaireaupeuple de droite, en tout cas à sa fraction la plusmobilisée, qui forme le coeur de cible de la primaire. Mais cela promet à l’ex-Président un second tour très compliqué. Car ce qui crevait les yeux, jeudi soir, c’est que la plupart de ses concurrents, d’ores et déjà, jouent Juppé gagnant. Manifestement, c’est autant leur souhait que leur pronostic, qui explique pourquoi ils l’ont à cepoint épargné. Commeon dit, enpolitique, il ne faut jamais insulter l’avenir. Quant à savoir s’ils ont vu juste… Réponse les et novembre.