Bégaiement: réparer les accidents de parole Soins
Les difficultés d’élocution peuvent parfois devenir de véritables problèmes de communication. Mais il est possible de s’en défaire avec l’aide d’un orthophoniste, quel que soit son âge
Gabriel a5ans. C’est unpetit garçon pleindevie. Il adore les petites voitures et faire du toboggan. Seul hic: il a parfois du mal à s’exprimer comme il le voudrait. Il trébuche sur les mots, peine à prononcer certains sons. Sa maman l’a emmené chez un orthophoniste. Au bout dequelques semaines, ça va déjà mieux: Gabriel a juste un problème de bégaiement. Comme près d’un pourcent de la population française, soit plus de 600000 personnes, à la grande majoritéde sexe masculin. Ce trouble de la communication, ces accidents de la parole comme disent les professionnels, se réparent. Et à tout âge. Il n’y a pas de fatalité. « L’entourage remarque facilement le bégaiement: il s’agit de répétition de syllabes, de pauses inadaptées à l’intérieur de la phrase, de phonèmes tels que les sons « b », « p » ou « t » sur lesquels la personne bute. Les enfants sont davantage concernés mais dans 8 cas sur 10, le trouble va disparaître spontanément en grandissant. Pour les 2 restants, cela ne passera pas tout seul » , relèveCharlotte Raffray-Toja, orthophoniste de l’arrière-pays niçois. La seule solution: la prise en charge par un professionnel. Et mieux vaut s’y prendre rapidement. « Il est préférable de consulter avant six ans parce que le jeune enfant a une plus grande plasticité cérébrale. Et de manière logique, plus le bégaiement est pris en charge tôt, moins il aura eu le temps de s’ancrer » , note Charlotte Raffray-Toja. Pour autant, les adolescents et adultes, quel que soit leur âge, peuvent également rencontrer un orthophoniste. Le travail sera certes plus long mais il donnera des résultats. Difficile de savoir exactement pourquoi une personne est bègue. Il peut exister un terrain familial sans pour autant parler d’hérédité. Des recherches mettent en avant un facteur neurologique. Parfois, c’est la survenance d’un événement allant du traumatisme au stress en passant par le simple changement d’habitude (accident, déménagement, arrivéed’un bébé dans une fratrie...) qui peut déclencher du jour au lendemain le bégaiement. Peu importe la cause. Même si elle était d’origine psychologique, la résolution d’un problème personnel n’engendrerait pas mécaniquement le retour à une parole fluide. D’où l’importance de voir un rééducateur de la parole: un orthophoniste. Il existe plusieurs méthodes pour effacer le bégaiement. Le professionnel choisira celle qu’il jugera la mieux à même de correspondre au patient en fonction de plusieurs facteurs (âge, environnement familial, etc.). « Si les parents ont remarqué un souci lorsque l’enfant parle, s’ils se demandent s’il bégaie, la réponse est dans la question: oui il s’agit d’un bégaiement. Mais il n’y a pas de raison de paniquer, rassure CharlotteRaffray-Toja. Pour les petits, on peut commencer par une prise en charge indirecte, c’est-àdire ce qu’on appelle la guidance parentale. » Concrètement, l’orthophoniste accompagne les parents, leur donne des conseils à appliquer à la maison. Par exem- ple, ils peuvent s’accroupir pour se mettre à la hauteur de l’enfant lorsqu’ils lui parlent, s’assurer qu’ils ont bien capté son attention, s’accorder des moments calmes le soir pour discuter, éteindre la télévision et accorder à chacun du temps de parole à table, etc. « Si au bout d’un an, on note aucune Charlotte Raffray-Toja amélioration, on peut envisager une prise en charge directe. On travaille alors avec l’enfant au sein du cabinet. Là encore, chaque professionnel décide de la méthode qu’il emploie » , précise l’orthophoniste.
La « guérison » plus longue chez l’adulte mais possible
Adolescents et adultes bénéficient, eux, forcément d’une prise en charge directe. Le temps de la « guérison » est plus long car il faut d’abord revenir sur les habi- tudes, les stratégies d’évitement qu’ils ont pu mettre en place durant plusieurs années. À tel point que certains bègues passent carrément inaperçus. Ils se contrôlent tellement, mettent tant d’attention à cequ’ils verbalisent, que personne n’a jamais rien remarqué: c’est le bégaiementmasqué. Si leurs stratégies sont efficaces, elles sont aussi épuisantes et constituent une source de souffrance psychologique. Là aussi, cela se soigne, même si cela demande du temps et de l’investissement personnel pour déloger ces réflexes profondément ancrés. Le bégaiement peut devenir un handicap social parce que l’échange verbal est au coeur des relations humaines, de la vie professionnelle. Pour autant il n’est pas vécu de lamêmemanière chez tous. Chez les uns, il sera perçu comme un douloureux complexe alors que les autres il sera quasiment anecdotique. En effet, certaines personnes s’accommodent de leurs accidents de parole, ils les
considèrent comme faisant partie de leur personnalité et ne ressentent ni le besoin ni l’envie de les gommer. C’est lorsqu’il devient une gêne que le bégaiement devra faire l’objet d’uneprise encharge. Et dans le doute concernant les plus jeunes, direction l’orthophoniste pour laisser le professionnel de la communication évaluer la communication de l’enfant.