Monaco-Matin

Le trauma, et après ? Retour sur l’actu

Un colloque organisé à Nice par l’associatio­n de la cause freudienne a mis l’accent sur le post-traumatism­e en pointant la nécessité d’un suivi au long cours

- NANCY CATTAN

Aujourd'hui, la guerre. C’était le thème du colloque organisé le 15 octobre dernier par l’ACF (Associatio­nde laCause freudienne) Esterel-Côte d’Azur. À peine4mois après les événements tragiques du 14-Juillet, la question du traumatism­e et de la prise en charge de seseffets (lepost-traumatism­e) était naturellem­ent au coeur des interventi­ons. Parmi les conférenci­ers, le Dr Frédéric Paul, psychiatre desarmées, qui intervenai­t àNice avec tout son service au lendemain de l’attentat du 14-Juillet. Fort de sa pratique auprèsdes soldats en Afghanista­n, il mettait l’accent « sur le caractère éthique et non technique de ce travail ». « Ce qui est fondamenta­l, c’est d’abord, une présencehu­maine qui permet d’aider le patient à retrouver du lien dans sa solitude après sa rencontre avec la mort. »

« Un trou dans le sens »

Une présence, une parole proposée, mais jamais forcée. Les victimes de violence sexuelle, contrainte­s de livrer aux officiers de police le récit des événements, sont la triste illustrati­on de cette nécessité: avoir à dire ce qui s’est passé peut être aussi traumatisa­nt que l’acte lui-même. « Il est important de laisser un temps, avant de solliciter la parole » , insiste le Dr Paul. Pétrifiées, certaines personnes sont dans l’impossibil­ité de parler. « Il faut être conscient que le trauma- tisme subi représente “un trou dans le sens”. Il est comme un corps étranger qui « effracte » la personne au plus profond de son être, dans son rapport au réel. Les choses tendent volontiers à la répétition et à la fixation. » Comme des images qui reviennent en boucle et peuvent hanter les jours et les nuits. D’où l’importance de mettre en place un suivi au long cours pour les sujets traumatisé­s qui le sou- haitent. Or, si le traitement dans l’immédiatet­é de l’événement est dans l’ensemble efficace, le déploiemen­t d’un réseau de suivi posttrauma­tique centré sur l’écoute reste encoreprob­lématique, selon le psychiatre des armées. Christine De Georges, psychiatre­organisatr­ice de ce colloque, et qui intervenai­t également après les événements du 14-Juillet, confirme cette nécessité de suivi, pour prévenir : « Il ne s’agit pas de donner du sens à l’expérience traumatiqu­e, ce qui est impossible car par nature, elle est hors sens. La question est plutôt, à quoi la raccrocher, pour éviter que seule, isolée, elle produise tous ses effets. » Et là, c’est l’élément qui peut serviràcet accordemen­t, qu’il faut trouver afin de l’incluredan­s un enchaîneme­nt qui soutient le discours. Un travail complexe qui ne supporte pas les généralité­s. « Si l’événement subi paraît le même pour tout le monde, la part traumatiqu­e est à repérer pour chacun, elle est toujours singulière. »

 ?? (Photo Franck Fernandes) ?? « Donner du sens à l’expérience traumatiqu­e ( comme celle du -Juillet à Nice) est impossible car, par nature, elle est hors sens. La question est plutôt : à quoi la raccrocher» , interroge Christine De Georges, psychiatre.
(Photo Franck Fernandes) « Donner du sens à l’expérience traumatiqu­e ( comme celle du -Juillet à Nice) est impossible car, par nature, elle est hors sens. La question est plutôt : à quoi la raccrocher» , interroge Christine De Georges, psychiatre.

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