Monaco-Matin

Clinton-Trump le duel passionné

Duel au sommet. Depuis des mois, Hillary Clinton et Donald Trump s’affrontent. Ces deux candidats atypiques briguent la Maison Blanche. Les électeurs américains trancheron­t mardi

- ERIC GALLIANO egalliano@nicematin.fr

Hillary Clinton ou Donald Trump? Dans 48 heures on saura enfin qui, au terme des cent jours de transition, succédera à Barack Obama dans le bureau ovale de la Maison Blanche. Cette question passionne évidemment les Américains appelésàdé­signer le 45e président de leur histoire. Elle mobilise aussi l’attentiond­u reste du monde tant les enjeux économique­s et géopolitiq­ues sont grands. Le gagnant de cette élection, bien singulière, sera l’homme – ou la femme – leplus puissant de la planète. Du moins l’imagine-ton, de ce côté-ci de l’Atlantique, peut-être en partie à tort… Il n’empêche que pour Marielle, une Niçoise expatriée à Seattle, il s’agit de ne pas faire le mauvais choix. « Avec Bush, on a déjà envoyé un imbécile à laMaison Blanche, estime-t-elle, et on a vu le résultat. On paye encore aujourd’hui, notamment en Europe avec les migrants et le terrorisme, l’invasion de l’Irak! » Pour elle, le choix est vite fait. À défaut de pouvoir encore voter (voir par ailleurs), sa préférence se porte sur la candidate démocrate. Comme l’immense majorité des expatriés, tant Français qu’Américains, que nous avons interrogés.

Des expatriés plutôt Démocrates que Républicai­ns

Cela ne doit d’ailleurs rien au hasard, selon Dave Ashton, installé depuis neuf ans sur la Côte d’Azur. Lui-même issu d’une famille à la base très républicai­ne, il relève des clivages géographiq­ues entre « les côtes est et ouest, globalemen­t plus démocrates que les États intérieurs, plus ruraux, et que l’on surnomme assez péjorative­ment aux États-Unis les « fly-over states », c’est-à-dire ceux que l’on se contente de survoler. » Autrement dit l’Amérique profonde est davantage acquise à Trump. « Mais ce qui oriente plus encore l’appartenan­ce politique des gens, poursuit Dave, c’est leur niveau d’étude. Or les Américains qui s’expatrient sont généraleme­nt ceux qui ont des diplômes et votent majoritair­ement démocrate. » De même, estime, cette fois Marielle la Niçoise de Seattle, « il est assez difficile pour des Français, quel que soit leur bord politique, d’être républicai­n dans la mesure où ce parti s’oppose à des principes de base qui, chez nous, sont considérés comme des acquis, tels que la nécessité de garantir à tous l’accès aux soins et à une éducation de qualité. C’est loin d’être le cas aux États-Unis ».

Les nauséabond­es « surprises d’octobre »

Si l’élection du futur président des États-Unis reposait sur les seuls expatriés, HillaryCli­nton n’aurait guère de soucis à se faire. Mais ce n’est évidemment pas le cas. Et un tout récent sondage commandé par ABC News et le Washington Post a placé Donald Trump en tête au début de la semaine. Il faut dire que les traditionn­elles « surprises d’octobre » – ces peaux de bananes, souvent nauséabond­es, que les candidats se glissent dans la dernière ligne droite – n’ont pas épargné la candidate démocrate: suspicion de trafic d’influence au sein de la fondation caritative­de son mari, l’exprésiden­t Bill Clinton, affaire des mails relancée par le FBI…

De la première dame à la première femme présidente

Cela suffira-t-il à priver les ÉtatsUnis de leur première femme présidente? Car c’est l’undes enjeux sociétaux de cette élection. Après avoir porté au sommet du pouvoir le premier candidat issu de la communauté noire, les Américains ont l’occasion de donner au reste du monde une leçon d’égalité d’un tout autre genre. Àmoins que les électeurs n’optent pour Trump, ce qui serait également une première. Le moins que l’on puisse dire c’est que ce milliardai­re, qui a fait l’essentiel de sa carrière dans le secteur privé avant de briguer la présidence des États-Unis, ne fait pas partie du sérail politique. Et c’est bien l’un des arguments de campagne dont le candidat républicai­n n’a pas hésité à user, voire à abuser, au risque d’agacer les caciques de son propre parti. Et c’est bien là, l’un des autres enjeux de cette élection.

Trump symptôme d’une crise politique et institutio­nnelle

Que Donald Trump l’emporte ou pas, le simple fait que ce candidat atypique ait pu sortir en tête des primaires témoigne d’une crise politique. Crise tout d’abord interne au parti républicai­n dont certains prédisent déjà l’implosion, mais qui dépasse en fait assez largement les frontières de ce parti. Car le « vilain » Trump, en dépit de ses discours outrancier­s, aura réussi à fédérer derrière son profil si atypique près de la moitié des Américains, lassés des discours convention­nels. Ycompris des démocrates déçus. Voilà sans doute pourquoi ce « trublion » de l’establishm­ent américain est souvent comparé en FranceàMar­ine Le Pen. Les deux surfent sur un même registre: le rejet des partis traditionn­els et la crise de confiance des électeurs en leurs propres institutio­ns. Et c’est peut-être le plus grand des enjeux de cette présidenti­elle « made in USA »: pointer du doigt, au-delà même de cette crise politique, la véritable crise institutio­nnelle qui risque fort de paralyser le futur patron de la MaisonBlan­che… Qu’il se nomme Trump ou Clinton. Car à trop focaliser sur ce duel au sommet on en oublie qu’une élection peut en cacher une autre. Ce mardi les Américains voteront aussi pour désigner leurs représenta­nts à la Chambre et pour renouveler un tiers de leurs sénateurs (sans oublier tous les mandats locauxàpou­rvoir, tels que les juges et autres shérifs désignés par la voie des urnes aux USA!). Or ces membres du Congrès ont, aux États-Unis, un pouvoir équivalent à celui du chef de l’État. C’est bien un président aux pieds d’argile, fut-il à la tête de la première puissance mondiale, qui risque d’être élu ce mardi.

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