Pourquoi Trump
Mais qui est Donald Trump, le nouveau Président des Etats-Unis? Estce ce candidat populiste, bravache, d’une violence rare, affirmant que l’on devrait envoyer Hillary Clinton en prison, souhaitantmême sa mort, ou ce vainqueur magnanime qui, après des heures d’attente avant que sa victoire ne soit acquise, rend chaleureusement hommage à son adversaire, la remercie pour les importants services qu’elle a rendus aupays tout au long de sa carrière politique et la fait applaudir par ses supporters? Est-ce l’homme brutal, vulgaire, extré- miste, annonçant une chasse aux immigrés ou ce nouveauPrésident promettant la réussite et du travail pour tous, s’engageant à rassembler le pays et à entretenir des relations cordiales avec tous les Etats du monde? L’avenir nous le dira mais, d’ores et déjà, cette victoire est porteuse d’enseignements pour tous les autres pays démocratiques. Nul ne devrait les ignorer. C’est une Amérique révoltée qui porte Trump au pouvoir, un électorat populaire en voie de déclassement, victime d’une mondialisation qui l’appauvrit. Certes, les classes moyennes ont de nouveaudu travail outre-Atlantique mais leurs revenus sont inférieurs à ceux dont elles disposaient il y a ans! Il existe aux Etats-Unis, comme en Europe, unpeuple de la mondialisation malheureuse dont les rêves sont brisés, vivant dans la peur de l’avenir, miné par un sentiment d’abandon. C’est lui qui vient de porter Donald Trump au pouvoir car il ne croit plus aux partis et aux hommes qui le dirigent depuis tant d’années. Certes, la victoire de Trump n’est pas écrasante en voix, mais elle révèle une fracture profonde au seinde cette nation. D’un côté, cet électorat Trump, enmajorité blanc, acculturé, à la dérive; de l’autre, l’électorat d’Hillary Clinton, divers, souvent prospère, cultivé, incarnation de la mondialisation heureuse. Cette fêlure est même géographique: derrière Trump, l’Amérique de la terre, repliée sur elle-même, laissée sur le bord de la route de la globalisation, qu’on appelle l’Amérique profonde; derrière Clinton, l’Amérique des océans, ouverte, qui vit sur les côtes est et ouest et regarde vers le large. Cette faille n’est pas qu’américaine. C’est elle qui éclaire aussi le Brexit, le mouvement cinq étoiles en Italie, le Front national en France. N’imaginons pas que l’Europe est une île à l’abri de ce mouvement de fondqui gagne toute la planète. En France, les partis dits de gouvernement, de gauche et de droite, mis en échec sur le
chômage et les questions migratoires, devraient prendre garde: ils sont sous lamême menace. Le avril en fut le premier signe chez nous! De toute évidence, cette nouvelle tectonique des plaques politiques est difficile à appréhender par les sondages. Pas plus qu’ils n’avaient annoncé le Brexit, ils n’ont anticipé la victoire de Trump, les progrès constants du FN, la percée de l’AFD, la droite extrême en Allemagne. Lesmédias et les élites ont sombré avec eux. La primaire de la droite française sera en France le premier test pour cette démocratie d’opinion qui vient d’être mise cruellement en échec aux Etats-Unis. Viendra ensuite notre présidentielle. Les peuples ne font plus la révolutiondans la rue. Mais ils peuvent provoquer dans les urnes des séismes aux conséquences imprévisibles! Prenons garde et réveillons-nous.
« C’est une Amérique révoltée qui porte Trump au pouvoir, un électorat populaire en voie de déclassement... »