Yannick Jadot : « Lavolontéd’êtrecrédible »
Le vainqueur de la primaire d’Europe Ecologie - Les Verts veut proposer aux Français une écologie « qui construit », tout en restant lucide sur ses chances à la présidentielle
Peu de mondeaurait misé sur lui ilyaencoreunmois. Yannick Jadot, Picardde 49 ans, est pourtant aujourd’hui le candidat d’Europe Ecologie - Les Verts à la présidentielle. Cécile Duflot balayée dès le premier tour, l’ancien directeur des campagnes de Greenpeace, député européen depuis 2009, est sorti vainqueur du second tour de la primaire verte, fort de 54,25% des suffrages face à Michèle Rivasi. Il se pose en porte-drapeau d’une écologie ambitieuse mais réaliste.
Quelquesmots d’abord sur l’élection deDonald Trump. Vous inquiète-t-elle, au regard notamment de sa très faible fibre écologique? Bien sûr, elle est extrêmement inquiétante. On sait que les EtatsUnis ne sont pas toujours un grand pays de la protection de l’environnement, mais Trump va bien au- delà, il est anti- écologie, climato-sceptique. Ces dernières années, toutes les mesures en faveur du climat avaient été prises par des décrets de Barack Obama. Avec lamême vitesse, Donald Trump peut tout arrêter. Ce sont probablement des milliards d’argent public qui vont aller vers le charbon, le pétrole et le gaz de schiste. Ilamême annoncé la suppression de l’Agence de protection de l’environnement, ça va très loin. Au niveau international, le risque est qu’il y ait un effet domino. Les Etats-Unis avaient jusqu’ici agi de concert avec la Chine. Si Trump se retire totalement de la coopération internationale sur le climat, la question sera de savoir si la Chine et la Russie resteront engagées et, surtout, si l’Europe reprendra le leadership dans la lutte contre le dérèglement climatique.
A contrario, son élection surprise vous fait-elle revoir votre ambition à la hausse, vous qui avez déclaré qu’aucun écologiste ne s’installera à l’Elysée en ? [rires] Non, je reste toujours réaliste et lucide. Ce que je veux, c’est construire dans notre pays desmajorités sur les sujets écologiques. Que ce soit la transformation de l’agriculture, une alimentation de qualité, les énergies renouvelables, les services à la personne. Je veux convaincre les Français sur tous ces sujets, qui sont au centre de notre vie quotidienne et des défis de la planète. J’ai toujours la même volonté d’être crédible, Yannick Jadot : « Je veux créer de l’enthousiasme sur la façon dont l’écologie peut transformer notre société. »
à la fois sur les propositions et sur notre trajectoire politique. Ce que je souhaite, c’est préparer des victoires, aux législatives, auxmunicipales, et que les propositions que je ferai soient au coeur du débat. Mais ça ne m’empêche pas de rester réaliste surmes chances de succès en . Je ne veux pas créer de l’enthousiasme autour d’une promesse irréaliste. Je veux créer de l’enthousiasme sur la façon dont l’écologie peut transformer notre société.
Comment expliquez-vous votre victoire à la primaire? Peut- être par la perspective d’ouvrir une nouvelle page de l’écologie dans notre pays, avec une dynamique comme il y a pu en exister une en autour d’Europe Ecologie. J’incarne aussi une écologie très identifiée au niveaumilitant, de parmon parcours à Greenpeace, dans l’altermondialisme ou la solidarité internationale. Au moment duGrenelle de l’environnement, je crois avoir montré ma capacité à rassembler la famille écologiste. Il s’agit, en même temps, d’élaborer des
solutions avec les entreprises, les salariés, les collectivités locales. Je crois que c’est la dynamique d’une écologie qui agit et qui construit qui a été gagnante. La famille verte est-elle désormais rassemblée? Très clairement, oui. Toutes les candidates de la primaire étaient autour demoi le soir des résultats. Ça fait longtemps que lemouvement n’avait pas été aussi uni. La volonté absolue de rassembler toute la famille était d’ailleurs un des éléments forts dema campagne.
CécileDuflot était sur la photo mais ne s’est pas exprimée… Elle était là, on a échangé et elle s’engagera dans la campagne.
La récolte des cinq cents parrainages s’annonce difficile, comme en pour Eva Joly… Le système des parrainages a été
encore un peu plus verrouillé. Il va falloir travailler, mais je suis confiant. Mon objectif est d’aller chercher quatre parrainages par département, pour que nous ayons unmatelas de promesses, en plus des que nous avons déjà à ce jour. Beaucoup d’élus locaux, au quotidien, ont l’occasion de mettre en oeuvre desmesures écologiques, sur l’agriculture, les transports, les services publics. Ce sont cesmaires-là, qui sont assez proches de nous dans la réalité de leur mandat, qu’il nous faut aller trouver.
Quels seront les grands thèmes de votre campagne? Elle portera d’abord sur tout ce qui tourne autour de la transition écologique, évidemment. Comment on relocalise l’économie autour des énergies renouvelables, comment on fait en sorte que % de la restauration collective, dans les écoles, mais aussi les hôpitaux, les collectivités et dans le privé, soient alimentés par l’agriculture locale ou biologique. C’est un enjeu capital pour des territoires vivants, avec de l’emploi à la clé. Un deuxième axe fort sera le travail. La transition écologique est très créatrice d’emplois. Mais se pose aussi la question de la qualité du travail. Des millions de Français ne s’épanouissent pas dans leur boulot, du fait d’une précarisation des contrats et d’une intensification de la charge de travail qui génère beaucoup de souffrance. Le troisième axe portera sur le pacte républicain : plus d’égalité, moins de discriminations, la défense de la démocratie, pour une société plus humaniste et plus fraternelle. Le projet que je porterai sera le projet du mouvement écologiste, enrichi de toute cette contribution citoyenne, d’acteurs de terrain confrontés aux réalités, qui agissent sur les territoires. Il faut savoir que plus de votants extérieurs que de membres d’Europe Ecologie - Les Verts ont pris part à notre primaire.
Comment vous situerez-vous dans la campagne entre Mélenchon et le futur candidat socialiste? Je serai le candidat écologiste. Je ne suis pas socialiste, je ne suis pas mélenchoniste. Ma campagne aura une forte spécificité, celle de l’écologie, du renforcement du pouvoir des citoyens, de la décentralisation, de la refondation de l’Europe, de la défense de la démocratie partout, ce qui ne correspond pas au pouvoir nationaliste et étatiste d’un Jean-LucMélenchon.
Au départ, vous étiez plutôt favorable à une grande primaire de toute la gauche, non? Oui, mais sur la base d’un vaste débat citoyen, d’un socle commun de propositions. Pas cette primaire socialiste qui se résumera aux règlements de comptes du hollandisme, qui n’intéressent personne, surtout pas les écologistes. 1. Sur le site projet-ecologie.fr.