Monaco-Matin

Greffés du rein, ils participen­t aumarathon

Demain, parmi les sportifs qui s’élanceront sur le marathon Nice-Cannes figureront des coureurs pas comme les autres : Olivier et Suzanne vivent avec les reins d’un autre

- AXELLE TRUQUET atruquet@ nicematin. fr

Suzanne et Olivier ont en commun la joie de vivre et l’enthousias­me, un sourire jusqu’aux oreilles et une bonne humeur communicat­ive. Une belle équipe qui va participer au marathon demain. Pourtant, ils partagent autre chose : leur médecin, Corinne Passeron, néphrologu­e et chef du service de néphrologi­e et dialyse du centre hospitalie­r de Cannes. Tous deux sont greffés du rein. Et deux fois pour Olivier. « La première fois, c’était en 1993. La deuxième, 21 ans plus tard, en 2014. Ah, mon téléphone bippe: c’est le rappel, je dois prendre mon médicament, explique- t- il. Lorsqu’on me demande en quoi ça a changé ma vie la greffe, et bien je réponds : aujourd’hui, je fais pipi. Car avant, c’était la dialyse qui filtrait à la place des reins. C’est tout bête mais ça me rappelle quatre fois par jour à quel point la greffe a changé ma vie, elle est redevenue normale. Ne l’écrivez pas, hein, c’est juste pour que vous compreniez. » Meaculpa. Les lecteurs aussi ont besoin de comprendre.

Comprendre les traitement­s

Suzanne s’associe à l’explicatio­n d’Olivier. « Moi, j’ai été greffée le 12/12/06. C’est la date de ma seconde naissance. Je me souviens du coup de fil ce 11 décembre m’annonçant que je serais peut- être greffée le lendemain... C’était peu avant Noël. Un sacré cadeau! Cela va bien- tôt faire dix ans, il faut que j’organise une fête pour l’occasion » , lance-t-elle dans un grand éclat de rire. Cette grande bavarde, experte en samoussas, y connaît un rayon en cuisine. Elle n’hésite pas à partager ses recettes avec d’autres patients greffés ou en attente de greffe. Car elle est aussi une « patiente experte » , c’est- à- dire qu’elle contribue au programme d’éducation thérapeuti­que encadré par les profession­nels de santé cannois. « On y apprend aux malades à connaître et à comprendre leurs pathologie­s, leurs traitement­s. C’est un lieu d’échange, même pour nous médecins car nous ne pouvons pas tout savoir, nous avons aussi besoin qu’ils nous disent ce qu’ils ressentent » , explique le Dr Passeron. « Suivre les consignes c’est une chose. Les comprendre ç’en est une autre, poursuit Olivier. Moi, cela m’a permis d’apprivoise­r la maladie. Je ne suis plus seul face à elle. » « C’est l’ignorance qui fait peur, complète Suzanne. Pouvoir discuter entre patients, avec d’autres greffés ou ceux qui attendent une greffe, cela rassure. »

Retrouver la normalité

Lorsqu’elle est possible, la greffe redonne de la « normalité » à la vie du malade. À tel point que Suzanne, Olivier et des membres du service de néphrologi­e de l’hôpital de Cannes vont participer au marathon Nice- Cannes en relais. Une manière de parler aussi du don d’organe, clé de voûte de ce système. « Lorsque le patient est inscrit sur le fichier des demandeurs en attente de greffe, nous l’informons de la manière dont cela va se dérouler, explique le Dr Passeron. Lorsqu’un rein est prêt à être greffé, le malade est prévenu. Seulement, il faut vérifier la compatibil­ité. Parfois, la greffe n’est pas possible, il faudra attendre. Il existe une autre possibilit­é :

celle du don vivant. Là aussi, il faut trouver un donneur compatible. Mais souvent, ce sont les malades qui refusent de recevoir le rein d’un proche. »

« La greffe nous a redonné vie »

Un paradoxe qu’évoque Olivier : « Si j’en avais la possibilit­é j’aurais été prêt sans hésiter à donner un de mes reins. Mais en tant que receveur, je n’aurais pas voulu qu’un proche me donne un rein. C’est étonnant et j’en ai conscience. Quelque part, c’est trop de responsabi­lité. » La néphrologu­e fait souvent face à ce type de réaction. Pourtant, elle continue à informer les patients. Demain matin, l’équipe cannoise s’alignera sur la grille de départ du marathon. Pas de record en perspectiv­e pour Suzanne : « Nous sommes là pour participer et pour montrer que la greffe nous a redonné vie » .

 ?? (Photos Ax. T. et DR) ?? Profession­nels et patients de l’hôpital de Cannes participen­t en nombre au marathon demain : ils seront une bonne trentaine de coureurs, marcheurs et supporters. Ils vont aligner quatre équipes de six sportifs, plus ou moins entraînés, sur la grille de...
(Photos Ax. T. et DR) Profession­nels et patients de l’hôpital de Cannes participen­t en nombre au marathon demain : ils seront une bonne trentaine de coureurs, marcheurs et supporters. Ils vont aligner quatre équipes de six sportifs, plus ou moins entraînés, sur la grille de...

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