Monaco-Matin

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- Par DENIS JEAMBAR

Le temps de la démocratie d’opinion – cocktail quotidien de sondages, de discours politiques et de commentair­es médiatique­s – s’achève. L’heure de vérité arrive : la parole aux citoyens. Depuis trois mois, la primaire de la droite et du centre s’est transformé­e en une course de chevaux : percée décrétée irrésistib­le de Sarkozy en septembre, triomphe annoncé de Juppé en octobre, retour fulgurant de Fillon en novembre. Les urnes trancheron­t demain soir. Inutile de se perdre en pronostics. En revanche, cette élection comporte des enseigneme­nts qu’il faut souligner avant que le tohu- bohu des résultats ne les engloutiss­e. Premier constat, les Cassandre ont eu tort : cette primaire s’est déroulée sans tourner à la foire d’empoigne. Certes, le campagne a été émaillée de quelques saillies plus ou moins virulentes, mais elle n’a pas dégénéré en un combat de rue. Si les sept candidats ont donné des coups, ce qui n’est pas illégitime, ils se sont gardés de s’étriper. Tous ont compris qu’il n’y avait aucun intérêt car, pour l’emporter au second tour, il faudra rassembler. Il fallait convaincre sans blesser à mort. Les trois rencontres télévisées ont donc donné lieu à trois débats de fond. Nous avons échappé au pugilat et à la politique spectacle. Certains peuvent le regretter. La politique y a gagné en sérieux. Il est vrai que les programmes ne sont pas très différents. Ils ne se différenci­ent pas sur les mesures à adopter mais sur leur intensité. Exemple, la réduction du nombre de fonctionna­ires. Deuxième constat, la droite n’avance pas masquée. Jamais, sans doute, ses candidats n’ont à ce point assumé leurs conviction­s. Cette primaire aura décomplexé leurs discours. Sans doute parce que tous pensent que la société française s’est droitisée. Egalement parce que la primaire est un entre- soi, une affaire de famille au sein de laquelle la parole se libère. Pas de trucage donc ! Au- delà des électeurs de la primaire, tout le monde, en tout cas, a pu comprendre ce que fera le vainqueur de ce scrutin s’il devient ensuite président de la République. Troisième constat, l’imaginatio­n n’est pas au rendez- vous. Il est bien difficile de trouver dans ces programmes de la nouveauté. La droite rebat sans cesse les cartes du même jeu : temps de travail nombre de fonctionna­ires, âge de la retraite, etc. Personne ne s’y interroge sérieuseme­nt sur les conséquenc­es de la mondialisa­tion, le déclasseme­nt d’une large partie de la population, la peur du déclasseme­nt chez beaucoup d’autres. Pas de réflexion non plus, à l’exception de Nathalie Kosciusco-Morizet, sur l’économie de demain, la transition énergétiqu­e, les industries d’avenir, le travail dans le futur. Bref, peu de vision et de mise en perspectiv­e du destin collectif français. C’est sans doute le plus regrettabl­e dans cette primaire qui restera tout de même comme un progrès démocratiq­ue.

« Cette primaire s’est déroulée sans tourner à la foire d’empoigne. »

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