La PME de la drogue arrosait l’ouest des A.-M
Depuis lundi, 22 personnes sont jugées par le tribunal correctionnel de Grasse pour un vaste trafic de stupéfiants qui touchait notamment Valbonne, Vallauris, Biot et Antibes
Un « litron » signifiait en langage codé un kilo de résine de cannabis. La cocaïne était surnommée le « carrelage ». La « faïence » désignait la méthanphétamine. Sous « salade » ou « verte » se cachait l’herbe de cannabis. « Les papiers » s’appliquaient à l’argent, la « boucave » à une balance. Voilà le vocabulaire fleuri qui revient depuis lundi dans le procès de 22 personnes, au tribunal correctionnel de Grasse présidé par Marc Joando. Tout ce petit monde avait été interpellé en mars 2015. 250 gendarmes, un hélicoptère, des chiens spécialisés dans les « stups » avaient permis de placer sous les verrous un réseau structuré de trafic de stupéfiants. Il rayonnait à partir de Valbonne et notamment du quartier de Garbejaïre. Il alimentait Biot et Antibes. L’affaire avait été menée par la brigade de recherches de Cannes.
Peur à l’audience
Plane dans ce dossier un climat de peur. Elle transpire, depuis lundi à l’audience, des pores d’une majorité de prévenus. La gendarmes avaient pris part aux interpellations en mars dans le quartier de Garbejaïre à Valbonne.
faute aux armes? Des pistolets automatiques ont été retrouvés dans les perquisitions. Hier, témoignait d’ailleurs à la barre un prévenu, bras plâtré. Dans une troublante coïncidence, ce trentenaire, inconnu de la justice jusque-là, a été « rafalé » le 5 novembre dans un bar de Valbonne avec une arme de gros calibre. Une balle lui a explosé le bras à quelques jours du procès dans lequel il est mis en examen. Pris de nombreux trous de mémoire à la barre, il affirme ne pas avoir été la cible, et n’être pour rien dans le trafic de stups.
De son côté, Sahbi Saafi, patron présumé de cette PME de la drogue, alias « Nartu », a été interpellé dans une Twingo. Sur lui, 13900 euros en liquide, une cartouche de calibre 6,35 et une kyrielle de téléphones portables dits « jetables », encore emballés. Le business de la came semblait juteux. Saafi a estimé son bénéfice à 104650 euros pour un chiffre d’affaires de 587650 euros, un investissement de 483000 euros et 161 kg de cannabis écoulés. On se croirait au greffe du tribunal de commerce. S’il reconnaît vendre de l’herbe, il conteste être à la
tête d’un réseau de distribution. Dans l’affaire, les gendarmes saisiront une vingtaine de kilos de stupéfiants. Avec parfois des surprises lors des interpellations. Notamment en interpellant le demi-frère de Saafi, Anis Bensikali dit « tête de lézard » ou « perroquet du Gabon ». Alors que les forces de l’ordre investissent son immeuble, un gendarme du Psig voit tomber une clé à ses pieds, balancée depuis une fenêtre. Elle se révélera être celle d’une Peugeot 508 à bord de laquelle les enquêteurs retrouveront 2,8 kg d’herbe de cannabis, 82 grammes d’héroïne et un livre comptable digne d’un épicier des stups. Bensikali niera s’être débarrassé de la clé.
« C’est mort Garbe, mon frère »
On croise également l’ancien chef de terrain présumé, Giuseppe Castaldo, dit « Gaby ». Il a admis avoir été le dealer du quartier de Garbejaïre à Valbonne. Mais, il était incarcéré aux Baumettes pour une autre cause et conteste avoir continué à diriger le réseau depuis sa cellule. Hélas pour lui, les gendarmes avaient placé le parloir sous écoute. La justice affirme qu’il se tenait au jus de l’ambiance du quartier. « Ah putain, c’est mort Garbe, mon frère », lui avait balancé un visiteur, évoquant la présencede gendarmes dans le quartier et d’une caméra de vidéo surveillance. « Gaby » affirme qu’ils parlaient de l’ambiance de Garbejaïre... Aujourd’hui, place aux réquisitions du procureur de la République, Annabelle Salauze, et aux premières plaidoiries des avocats. Jugement d’ici la fin de semaine.