Monaco-Matin

Mandel condamné à douze ans de réclusion

L’expert automobile monégasque a été reconnu coupable d’avoir volontaire­ment donné la mort à Pierre Torregross­a en 2011 à Roquebrune. L’avocat général Karcenty avait requis vingt ans.

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Dans ce dossier « il y a de l’obscur, du caché, de l’inconnu, de l’incompréhe­nsion » , explique en préambule l’avocat général FabriceKar­centy. « Quand j’ai découvert cette enquête, je suis allé de surprise en surprise, de vertige en vertige notamment en ce qui concerne le choix des policiers. » Marc Mandel, le 7 octobre 2011, a tué à Roquebrune­Cap-Martin d’un tir de chevrotine, Pierre Torregross­a, 39 ans, qui venait chercher son fils de7ans dans le cadre d’une séparation conflictue­lle. Sophie, la mèrede l’enfant, avait refait sa vie avec MarcMandel. Le couple empêchait le pèrenature­l d’exercer son droit de visite. Marc Mandel, qui n’est resté que quatremois en détention, at-il bénéficié d’une clémence suspecte notamment en raison de ses amitiés franc-maçonnes ? Une semaine et demie de débat n’a pas permis de l’établir. Jusqu’auder- nier jour, l’accusation insiste pourtant sur les insuffisan­cessuspect­esde la justice et de la police dans ce dossier. Ilaaussi été beaucoup questiondu rôle trouble joué par Sophie Mandel. Mais cette dernière est témoin, pas accusée et sa responsabi­lité, fut-elle morale, n’est pas pénale. Selon l’avocat général Karcenty, « Marc Mandel est aussi coupable que Sophie Mandel dans la dégradatio­n des relations avec Pierre Torregross­a. » « Le seul qui se culpabilis­e, dans cette affaire, c’est unpetit garçon de7ans » , déplore lemagistra­t.

« Il a cherché le tir mortel »

Pierre Torregross­a, un électricie­n marseillai­s, est miné par l’impossibil­ité de voir son fils. Quand il se présente à Roquebrune-Cap-Martin avec les jugements en sa faveur, « il se fait tirer comme un lapin » , explique l’avocat général qui requiert vingt ans de réclusion. Tout en formulantp­ar avance les objections de la défense, Fabrice Karcenty n’a aucun doute sur l’intention homicide: « Mandel a cherché le tir mortel. » « Et les courriers choquants adressés depuis sa cellule à sa femme ne sont pas ceux d’un homme convaincuq­u’il a provoqué un accident. »

« Il parle à unmort! »

Assis au premier rang, Marc Mandel qui comparaît libre, paraît sonné. Me Mathurin Lauze, l’un de ses trois avocats, mimeavec conviction la scène fatale. Il endosse le costume de l’accusé qui vient de faire feu. « Allez, barre-toi, sinon la prochaine elle est pour toi » , prévient Mandel à Pierre Torregross­a. Ces propos ont été enregistré­s par les deux caméras de vidéosurve­illance. Mathurin Lauze hausse le ton: « Il parle à un mort! Où est l’intention homicide ? » Serait-ce la manoeuvre d’un tueur machiavéli­que? Ça ne colle pas ni à la personnali­té du tireur ni au dossier. « Ma défense, c’est le film » , répète Me Christian Scolari qui ironise sur la thèse du guet-apens développée par ses confrères de la partie civile: « Il prépare un assassinat mais garde les enregistre­ments de ses caméras de surveillan­ce ». « Vas-y vise sur moi, vise sur moi » , a répété Pierre Torregross­a. « La vérité est là » , prévient Me Scolari à l’adresse des jurés. Me PhilippeSo­ussi, le dernier àprendre laparole, débute et finit sa plaidoirie par une invocation : « Que le malheur s’arrête. Trop de gens ont souffert. La famille Torregross­a, lui (Mandel), et ses trois enfants. » Sans jamais se départir de son calme, le pénaliste se dit lui aussi choqué par l’instructio­n « partiale, tronquée » et démonte la thèse du complot: « Le parquet ne s’oppose pas à ce que Sophie Mandel se constitue partie civile. Heureuseme­nt, la chambre de l’instructio­n s’y oppose. Le procureurM­ontgolfier, qui, il me semble, n’aimait pas les francs-maçons, ne s’oppose pas à la remise en liberté de Mandel. » S’ensuit une charge en règle sur « les mensonges, les délires de Sophie Mandel qui a tout pourri. » « Elle lui monte la tête, admet, ellemême, qu’elle le pousseàbou­t et traite Pierre Torregross­a d’ordure après sa mort. » Mandel, marionnett­e de son épouse de l’époque? « Le principal ennemi de la vérité, ce n’est pas le mensonge M. l’avocat général, c’est la conviction. Et vous êtes convaincu. » Convaincu, comme la cour et les jurés, que Marc Mandel, condamné à douze ans de réclusion, a volontaire­ment donné la mort à Pierre Torregross­a .

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Marc Mandel (à gauche), Pierre Torregross­a
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(Photo Eric Dulière/DR)

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