Mandel condamné à douze ans de réclusion
L’expert automobile monégasque a été reconnu coupable d’avoir volontairement donné la mort à Pierre Torregrossa en 2011 à Roquebrune. L’avocat général Karcenty avait requis vingt ans.
Dans ce dossier « il y a de l’obscur, du caché, de l’inconnu, de l’incompréhension » , explique en préambule l’avocat général FabriceKarcenty. « Quand j’ai découvert cette enquête, je suis allé de surprise en surprise, de vertige en vertige notamment en ce qui concerne le choix des policiers. » Marc Mandel, le 7 octobre 2011, a tué à RoquebruneCap-Martin d’un tir de chevrotine, Pierre Torregrossa, 39 ans, qui venait chercher son fils de7ans dans le cadre d’une séparation conflictuelle. Sophie, la mèrede l’enfant, avait refait sa vie avec MarcMandel. Le couple empêchait le pèrenaturel d’exercer son droit de visite. Marc Mandel, qui n’est resté que quatremois en détention, at-il bénéficié d’une clémence suspecte notamment en raison de ses amitiés franc-maçonnes ? Une semaine et demie de débat n’a pas permis de l’établir. Jusqu’auder- nier jour, l’accusation insiste pourtant sur les insuffisancessuspectesde la justice et de la police dans ce dossier. Ilaaussi été beaucoup questiondu rôle trouble joué par Sophie Mandel. Mais cette dernière est témoin, pas accusée et sa responsabilité, fut-elle morale, n’est pas pénale. Selon l’avocat général Karcenty, « Marc Mandel est aussi coupable que Sophie Mandel dans la dégradation des relations avec Pierre Torregrossa. » « Le seul qui se culpabilise, dans cette affaire, c’est unpetit garçon de7ans » , déplore lemagistrat.
« Il a cherché le tir mortel »
Pierre Torregrossa, un électricien marseillais, est miné par l’impossibilité de voir son fils. Quand il se présente à Roquebrune-Cap-Martin avec les jugements en sa faveur, « il se fait tirer comme un lapin » , explique l’avocat général qui requiert vingt ans de réclusion. Tout en formulantpar avance les objections de la défense, Fabrice Karcenty n’a aucun doute sur l’intention homicide: « Mandel a cherché le tir mortel. » « Et les courriers choquants adressés depuis sa cellule à sa femme ne sont pas ceux d’un homme convaincuqu’il a provoqué un accident. »
« Il parle à unmort! »
Assis au premier rang, Marc Mandel qui comparaît libre, paraît sonné. Me Mathurin Lauze, l’un de ses trois avocats, mimeavec conviction la scène fatale. Il endosse le costume de l’accusé qui vient de faire feu. « Allez, barre-toi, sinon la prochaine elle est pour toi » , prévient Mandel à Pierre Torregrossa. Ces propos ont été enregistrés par les deux caméras de vidéosurveillance. Mathurin Lauze hausse le ton: « Il parle à un mort! Où est l’intention homicide ? » Serait-ce la manoeuvre d’un tueur machiavélique? Ça ne colle pas ni à la personnalité du tireur ni au dossier. « Ma défense, c’est le film » , répète Me Christian Scolari qui ironise sur la thèse du guet-apens développée par ses confrères de la partie civile: « Il prépare un assassinat mais garde les enregistrements de ses caméras de surveillance ». « Vas-y vise sur moi, vise sur moi » , a répété Pierre Torregrossa. « La vérité est là » , prévient Me Scolari à l’adresse des jurés. Me PhilippeSoussi, le dernier àprendre laparole, débute et finit sa plaidoirie par une invocation : « Que le malheur s’arrête. Trop de gens ont souffert. La famille Torregrossa, lui (Mandel), et ses trois enfants. » Sans jamais se départir de son calme, le pénaliste se dit lui aussi choqué par l’instruction « partiale, tronquée » et démonte la thèse du complot: « Le parquet ne s’oppose pas à ce que Sophie Mandel se constitue partie civile. Heureusement, la chambre de l’instruction s’y oppose. Le procureurMontgolfier, qui, il me semble, n’aimait pas les francs-maçons, ne s’oppose pas à la remise en liberté de Mandel. » S’ensuit une charge en règle sur « les mensonges, les délires de Sophie Mandel qui a tout pourri. » « Elle lui monte la tête, admet, ellemême, qu’elle le pousseàbout et traite Pierre Torregrossa d’ordure après sa mort. » Mandel, marionnette de son épouse de l’époque? « Le principal ennemi de la vérité, ce n’est pas le mensonge M. l’avocat général, c’est la conviction. Et vous êtes convaincu. » Convaincu, comme la cour et les jurés, que Marc Mandel, condamné à douze ans de réclusion, a volontairement donné la mort à Pierre Torregrossa .