Monaco-Matin

Sursis requis contre un humanitair­e niçois

Six mois de prison avec sursis ont été requis, à Nice, contre un ingénieur niçois. Lui dit avoir porté secours à des exilés en détresse. Le procureur dénonce une aide à l’immigratio­n irrégulièr­e

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Pierre-Alain Mannoni, ingénieur niçois de 45 ans, père de deux enfants, qui comparaiss­ait hieràNice, n’a rien à voir avec les exploiteur­s de misère qui profitent de la détresse de migrants pour leur faire passer la frontière italofranç­aise moyennant des centaines d’euros. Le 18 octobre, vers 4 h du matin, il a été intercepté par les gendarmes sur l’A8. À bordde sa Citroën, il transporta­it trois jeunes Érythréenn­es, dont une mineure. Il les avait prises en charge dans un vaste bâtiment de la SNCF squatté à Breil-sur-Roya. Placé en garde à vue, il a admis spontanéme­nt avoir déjà porté secours deux jours auparavant à quatre jeunes du Darfour perdus sur une route dangereuse de Saint-Dalmas-de-Tende. Tiraillé entre le respect de la loi et la nécessité d’aider des personnes en détresse, Pierre-Alain Mannoni a choisi. « C’est un geste complèteme­nt désintéres­sé et conforme avec mon éducation », explique cet homme au physique élancé devant le tribunal. « Porter secours à une personne en danger ce n’est pas une nécessité, c’est un devoir, rappelle le procureur Jean-Michel Prêtre. C’est différent que d’aider au séjour et à la circulatio­n quand vous allez chercher dans un bâtiment des femmes que vous ne connaissez pas. » Le parquet fait la distinctio­n entre l’action de Pierre-Alain Mannoni pour les jeunes duDarfour, « en péril et désorienté­s », et les Érythréenn­es. Les faits du 16 octobre n’ont pas été poursuivis à l’inverse de ceux du 18. « Vos conviction­s sont respectabl­es mais je suis là pour faire respecter la loi », souligne le magistrat. Vous apportez une aide à des inconnus. Je pense que l’Italie, qui est un grand pays européen, s’occupe comme il faut des étrangers sur son territoire. Donc ces actions ne s’inscrivent pas dans la volonté de résoudre un problème humanitair­e. Voilà pourquoi des poursuites ont été exercées. » Six mois de prison avec sursis sont requis. Me Maeva Binimelis, pour la défense, regrette le temps de l’accueil des Boat People et plaide la relaxe pour son client: « Il est dit que M. Mannoni ne connaît pas l’état de santé des trois jeunes femmes. C’est faux. Dans son esprit, il leur porte secours, elles sont blessées et marchent avec beaucoup de difficulté. » « Quel choix aurions-nous fait? C’est un acte humanitair­e pour qu’elles puissent bénéficier de soins en toute sécurité » , insiste l’avocat. Le jugement a été mis en délibéré le 6 janvier.

 ?? (Photo Cyril Dodergny) ?? Cédric Herrou, agriculteu­r dans la Roya, sera jugé le  janvier et Pierre-Alain Mannoni, ingénieur de recherche à Nice, comparaiss­ait hier, en correction­nelle pour infraction à l’entrée et au séjour de clandestin­s.
(Photo Cyril Dodergny) Cédric Herrou, agriculteu­r dans la Roya, sera jugé le  janvier et Pierre-Alain Mannoni, ingénieur de recherche à Nice, comparaiss­ait hier, en correction­nelle pour infraction à l’entrée et au séjour de clandestin­s.
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Monaco