SIGNÉ ROSELYNE
La semaine de Roselyne Bachelot
Lundi
Nicolas Sarkozy, éliminé de la primaire de la droite et du centre, qui imaginait cela en se remémorant les interminables files d’attente dans les librairies pour obtenir une dédicace et les déclarations énamourées de thuriféraires extatiques? Hier soir, après une défaite qui confine à l’humiliation, il quitte la vie politique française avec noblesse et l’on imagine le désarroi de la sphèremédiatique qu’il a fascinée pendant plus de vingt ans. Pourtant, cette défaite était inexorable et j’endétaillais les ressorts dans ces colonnes dès le début de l’année. Il y avait le feu à la maison Sarkozy, du refus de faire le bilan de son quinquennat à la révélation des âmes noires qui l’avait circonvenu sur fond de conférences grassement rémunérées, d’affaires judiciaires et de dérapages verbaux. J’ajoutais : « L’erreur fondamentale a sans doute été de vouloir reprendre la présidence de l’UMP, stratégie qui relève d’un logiciel rendu obsolète par les primaires ouvertes. Il est assez surprenant de voir un animal politique de ce calibre commettre une telle faute. Il aurait dû méditer le résultat des deux primaires socialistes, celle de qui vit la victoire de Ségolène Royal contre l’appareil de la rue de Solfé- rino et celle de qui enregistra la défaite deMartine Aubry, première secrétaire du PS » . Décidément, nous aurons toujours du mal à comprendre ce qui motive des politiques du calibre de Nicolas Sarkozy à courir de tels risques. L’argent? Ils en gagneraient beaucoup plus dans d’autres activités. Le pouvoir? Il est maintenant entre les mains du monde économique. Les honneurs et les palais de la République? Les citoyens leur crachent à la figure et derrière les lambris dorés, onne trouve que la solitude et l’anéantissement. En contemplant le visage de l’ancienprésident, ma quête téléologique s’apaisait et je revoyais les photos du petit garçon qu’il avait été et dans ses yeux mélancoliques, ne subsistait qu’une immarcescible demande d’amour.
Mardi
C’est encore undrame sentimental qui s’écrit avec la déconvenue enregistrée par Alain Juppé, décroché de points par l’étonnant François Fillon. Au moment où la maire de Bordeaux s’apprêtait à cueillir le baiser d’adhésion promis par les sondages et les éditorialistes, l’opinion publique
s’est donnée à un autre. Comment expliquer autrement que par le dépit amoureux, les aigreurs et les attaques auxquelles il se livre aujourd’hui contre son rival, si peu conformes à l’image dite apaisée qu’il avait construite dans sa campagne du premier tour. Alain Juppé a commis une double erreur, un contresens historique qui l’a conduit à une stratégie inadaptée au processus des primaires. Certes, les prolégomènes étaient juste et le réservoir de voix du candidat de la droite à l’élection présidentielle est bien au centre, centre droit et centre gauche. L’erreur d’analyse a été de penser qu’être centriste signifiait être libéralo-libertaire alors que toute l’histoire des centristes européens est marquée par la démocratie chrétienne et la doctrine sociale de l’Église : ils sont en fait profondément conservateurs! La stratégie d’ouverture choisie – qui a séduit les électeurs de gauche votant à la primaire – aurait pu convenir au second tour de l’électionprésidentiellemais a été rejetée massivement par le peuple de droite. Nous verrons si ce paralogisme est rattrapable mais ce sera compliqué en quelques heures. À tout lemoins, une fois le choc de la déception passé, il n’est pas douteux queAlain Juppé reviendra à demeilleurs sentiments pour ne pas perdre sur tous les tableaux.
Vendredi
, c’est le numérod’appel gratuit pour que les femmes puissent appeler à l’aide. En cette Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, plus que jamais combat et solidaritédoivent aller de pair dans le monde entier. Cette journée fut instituée en par les Nations unies en souvenir des soeurs Mirabal, assassinées par le dictateur dominicain Trujillo, après une existencemarquée par les viols, les sévices et la prison. Les violences ne sont pas le fait exclusif de milieux défavorisés ou de pratiques religieuses obscurantistes, elles sont répandues dans toutes les classes sociales et je suis restée sans voix devant l’étonnement d’un jeuneétudiant découvrant qu’imposer un rapport sexuel à son épouse était bel et bien un viol. Ehoui, la familleest le premier cadreoù s’exercent les violences et celui où la libération de la parole des femmes est la plus compliquée. Cheznous, Jacqueline Sauvage et ses filles furent livrées des années aux viols et auxexactions d’un mari barbare, une animatricede télévision révèle que, petite fille, elle fut livrée par sa propremèreaux désirs d’unpédophile. Partout, les femmes sont considérées commedes marchandises : les viols et les mutilations des femmes sont des actes de guerreau Congo, les fillettes enlevées par BokoHaram sont vendues pour être
« Fidel Castro doit être placé au seul plan qui lui convienne : un dictateur débauché, cruel et pitoyable gestionnaire. »
prostituées, les crimes d’honneur sontmonnaie couranteauMoyenOrient et permettentàunpèred’assassiner sa fille qui semarie sans son consentement, le dictateur turc Erdogan voulait même abandonner les poursuites contreunvioleur s’il épousait sa victime! J’arrête cette liste abominable, elleest interminable. Chaque fois qu’un groupe humainest discriminé en raisonde son appartenance ethnique, politique ou religieuse, les femmes de ces groupes sont doublement spoliées et suppliciées.
Samedi
Fidel Castroest mort. Sur l’antenne de France Inter, j’écoute le secrétairenational du parti communiste Pierre Laurent entonner l’antienne de la lutte contre l’impérialisme américain sans un mot pour les crimes du tyran, les milliers de prisonniers politiques, le soutien àdes régimes dictatoriaux, les souffrances imposées à son peuple, ses moeurs de prédateur sexuel. La fascination sans retenue exercéepar ce sinistre individu resteunmystère. Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Danielle Mitterrand et tant d’autres sont allés apporter la caution de la gauche au « Líder Maximo » et ladroiten’a pas été en restebien souvent dans l’admirationbéate. Serrer la main de Castro et s’infuser les fadaises dont il émaillait ses entretiens faisaient croire à ses interlocuteurs qu’ils tutoyaient l’Histoire. Il est plus que temps que cesse l’imposture et que Fidel Castro soit placé au seul plan qui lui convienne, un dictateur débauché, cruel et pitoyable gestionnaire.