Monaco-Matin

« La vie triomphera de la mort, quoi qu’il en coûte »

Près de 311000 euros ont été remis, hier en mairie, en faveur des victimes de l’attentat de Nice et des familles. Le prince Albert a lui aussi apporté sa pierre à un édifice que l’on veut pérenne

- GAELLE BELDA gbelda@nicematin.fr

Hôtel de ville de Nice. Ils ont les yeux rivés vers la tribune vide. Policiers municipaux, agents de la direction de la propreté, travailleu­rs sociaux et psychologu­es, personnel médical de la Ville et du centre communal d’action sociale (CCAS), réserviste­s, membres de la Croix-Rouge, artistes, donateurs, membres du comité du 14-Juillet (lire ci-dessous)… Au fond, les médias se massent. Puis les haut-parleurs annoncent l’arrivée du maire et du président de la Métropole. Albert II les accompagne. Hier matin, il se murmurait que le prince monégasque pourrait participer à la cérémonie de remise des chèques en faveur des victimes et leurs familles de l’attentat du 14 juillet… Il l’a fait. En prime, le chef d’État n’était pas venu les mains vides: il a remis un chèque de 100000 euros pour le fonds de soutien du CCAS niçois. Un geste souligné et salué maintes fois par le maire, Philippe Pradal, lors de son discours d’ouverture.

« Nous n’avons pas oublié »

« Qu’il m’eût été agréable de me retrouver parmi vous en ces lieux en d’autres circonstan­ces. Mais telle est la vie, qui nous réunit pour des motifs que nous aurions eu du mal à imaginer quelque temps auparavant. » Le maire enchaîne: « Nice a engagé sa résilience et a réappris à vivre. Mais soyez-en assurés: nous n’avons pas oublié. » Il s’engage à être là. Tant qu’il le faudra. Pour les Niçois, pour les associatio­ns. Il remercie. « Merci pour votre générosité. Merci de ne pas oublier. » Puis il passe la main. Grave. Solennel. Christian Estrosi est sombre. « Le 14 juillet, Nice a vécu l’un des pires moments de son histoire. » Le président de la Métropole a choisi de citer Marcel Pagnol, dans Le Château de ma mère: « Rappelez-vous de ce qu’il a écrit alors qu’il se revoit, suivant le corbillard de sa maman: “Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées par d’inoubliabl­es chagrins. Il n’est pas nécessaire de le dire aux enfants.” » Il marque une pause. « Je pense, qu’en effet, il ne faut pas le dire aux enfants. Devant eux, il faut tenir bon, debout, forts, unis. Pour ne pas qu’ils aient peur, comme nous avons eu peur. Pour ne pas qu’ils pleurent, comme nous avons pleuré. » La salle est silencieus­e. Gilets fluo sur le dos, certains agents dunettoiem­ent ont préféré rester debout. Un peu comme s’ils étaient en service, les policiers encadrent le parterre de participan­ts gagnés progressiv­ement par l’émotion. C’était il y a bientôt cinq mois, mais la douleur est bien là.

« Simplifier le quotidien »

Les chèques attendent. Christian Estrosi, amorce: « Il y a eu tant de générosité, de bienveilla­nce, d’empathie. Et pas seulement des mots. Ces mots se traduisent par des actes, par cet argent qui viendra, non pas combler les vides dans les coeurs à jamais souf- frants, mais simplifier le quotidien. » Il y a les 100000 euros récoltés lors du gala de la Croix Rouge monégasque, en plus d’un fonds débloqué spécialeme­nt par Albert II. « C’est en tant que président de la Croix-Rougemonég­asque que je suis là. Parce que j’ai vu des gens dont la perception du monde a été infléchie tellement les contacts ont été remplis d’émotion. Et pour exprimer ma sincère compassion. » Et puis il y a le chèque des agents de la Ville et de la Métropole – qui ont renoncé à ce qu’on leur paye leursheure­s supplément­aires, alors qu’ils s’affairaien­t, au coeur du drame –, brandit par Jean-Marie Devret, directeur général des services: encore près de 16000 euros pour le fonds de soutien du CCAS. Comme le résultat de la vente aux enchères: 170116 euros. Il y a, enfin, le geste du directeur de Pizzorno (25000 euros) en direction de l’associatio­n « Promenade des Anges ». Que du coeur. Et une même volonté, clamée haut et fort par le président de la Métropole: « Rien, jamais à Nice, ne nous empêchera de croire que la vie triomphera de la mort, malgré tout, et quoi qu’il en coûte. Parce que ce sera le plus beau geste d’amour que nous pourrons adresser à tous nos morts, à nos enfants. »

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(Photos Sébastien Botella) Quatre chèques et du coeur, pour les victimes et leurs familles.

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