Au largedeNice, un observatoire sous-marin !
Opérationnel depuis quelques semaines, il transmet aux scientifiques des données importantes sur les avalanches qui se produisent dans les profondeurs de la Grande Bleue
En montagne, des capteurs permettent de détecter les avalanches. Il en est désormais de même pour les fonds de la Grande Bleue. Depuis quelques semaines, un observatoire sous-marin est opérationnel au large de l’aéroport Nice-Côte d’Azur. Un petit bijou de technologie qui transmet des informations en continu. « La pente continentale niçoise est une zone d’instabilité sédimentaire, explique Anne Deschamps, directeur de recherche CNRS au laboratoire Géoazur. Les particules s’accumulent sur la plate-forme peu profonde qui borde la zone littorale et dans certaines conditions peuvent générer des avalanches qui dévalent la pente continentale jusque dans les plaines abyssales. » Un exemple ? Le glissement de terrain de 1979 sur le chantier d’extension de l’aéroport Nice Côte d’Azur. Il avait provoqué un mini-tsunami mortel sur Antibes. L’intensité du tsunami fut telle qu’elle parvint à sectionner deux câbles à 80 et 110 kilomètrede lacôte, età plus de 2000 mètres de profondeur. « Ce fut le cas également lors du séisme de Boumerdès qui a secoué l’Afrique du Nord en mai 2003, rappelle Anne Deschamps. Il a rompu les câbles d’alimentation entre l’Afrique et l’Europe. » Ce séisme avait fait plus de 2200 morts.
L’oreille sous-marine des scientifiques
La station sous-marine sera donc, nonpas les yeux, mais l’oreille scientifique des chercheurs de la Côte d’Azur. Ifre- mer, leCNRS, l’Institut de recherche pour le développement (IRD), l’Observatoire de la Côte d’Azur et l’universitéNice-Sophia Antipolis se sont associéspour cette opération. «Les instruments ont été connectés en septembre. Elle a été suivie d’une longue période de tests. Un sismomètre est désormais relié à deux piézomètres. Ces derniers mesurent lapression dans les sédiments jusqu’à trentemètres de profondeur. Le premier en- registre les mouvements de sol, notamment ceux provoqués par les séismes proches ou lointains », détaille Anne Deschamps. Tout ce matériel est situé par vingt à trente mètres de fond. Les appareils peuvent être pilotés par des serveurs informatiques basés à terre qui, tout en recueillant les informations, permettent via Internet d’effectuer des réglages. Il a été financé par la régionPaca, des fonds européens (Feder) et des bud- gets Ifremer et CNRS. Avec ce laboratoire sousmarin, les scientifiques ont également une petite idée derrière la tête. Et elle fait froid dans le dos : mesurer les conséquences du possible tremblement de terre de grande amplitude qui menace toujours de frapper la Côte d’Azur. « Nous ne le souhaitons évidemment pas, mais c’est une probabilité scientifique, rappelle Anne Deschamps. S’il devait arriver, il serait important pour nous d’obtenir des données pour mieux comprendre les répercussions de ce séisme sur les fonds marins. Aujourd’hui, nous savons qu’il y a des glissements de terrains sous la surface, mais nous sommes incapables de les relier de manière effective aux tremblements de terre. » Rappelons [nos éditions du 11 novembre] que les scientifiques redoutent un séisme majeur, du type « Ligure » de 1887. Son intensité avait été évaluée entre 6,5 et 6,8. Un événement qui ne survient que tous les 4 à 5000 ans, « mais qui pourrait tout aussi bien seproduire demain », avait précisé Anne Deschamps. Ce laboratoire en sera un des premiers témoins. Les données du sismomètre, récoltées par cette station sous-marine, sont accessibles à tous sur Internet Avec lui, vous pourrez ainsi savoir ce qui sepasse sous la mer !