Fillon, en tête et à fond
S’il trace sa trajectoire sur le terrain politique, le vainqueur de la primaire de la droite et du centre, pur Sarthois bercé aux sons des 24 Heures du Mans, est un fervent passionné de course
Jamais son nom n’aura rimé aussi fort avec pole position. Vainqueur haut la main de la primaire de la droite et du centre, François Fillon fait aujourd’hui la course en tête sur la route des présidentielles, dont le drapeauàdamier sera agité en mai 2017. « Aux 24 Heures du Mans, en 1969, Jacky Ickx part dernier et il arrive premier. C’est une course d’endurance, comme la primaire. Lui, il avait 120 mètres d’avance. Nous, on a plusieurs tours. » Qui n’a pas entendu cette petite phrase prononcée le dimanche 20 novembre, au soir du premier acte? Alors qu’il vient de pousser Nicolas Sarkozy hors piste, l’ancien Premier ministre, bière de la victoire à lamain face à une nuée de micros et de caméras, ose la comparaison avec l’emblématique héros de la plus grande épreuve d’endurance du monde. Un pilote auquel il voue une admiration sans borne. La séquence tournera ensuite en boucle sur les écrans des chaînes info durant plus de deux tours d’horloge...
Petit-fils d’un garagiste Peugeot
Sarthois pure souche, le nouveau leader des Républicains n’a jamais caché sa passion ‘‘politiquement incorrecte’’ pour l’automobile en général et la compétition en particulier. En témoignent les nombreux souvenirs décorant le bureau de Monsieur le député de la 2e circonscription de Paris à l’Assemblée nationale. Entre autres, une culasse de mo- teur V12 Matra, un volant de Formule 1 griffé Ferrari, cadeau de Jean Todt, et le drapeau tricoloredudépart des 24 Heures du Mans 1996 offert par Alain Delon. L’étincelle se produit très tôt puisqu’il découvre la magie de la grand-messe mancelle à l’aube des années 60. Dans son village, Cérans-Fouilletourte, où l’écurie Austin-Healey aime à élire domicile, le jeune Fillon, fils de notaireet petitfils d’un garagiste Peugeot, en pince pour les nobles mécaniques anglaises bichonnées devant l’hôtel-restaurant du Croissant en préambule de la course. Son enfance sera ainsi bercée par les rugissements stridents des puissants bolides forgeant la légende entre chicane Dunlop, ligne droite des Hunaudières et virage d’Arnage.
Figurant pour Steve McQueen
La flamme ne cessera jamais plus de luire, même si celui qui apparaît comme figurant dans Le Mans, le film culte de Steve McQueen, choisit de tracer sa trajectoire sur le terrain politique. « C’est lui, alors président du Conseil général de la Sarthe, qui a sauvé les 24 Heures du Mans en crise après des années de vachesmaigres » , raconte Jean-Claude Virfeu, la plume du sport auto dans les colonnes de Ouest France durant plus de trois décennies. « Seulement 28 voitures avaient pris le départ de l’édition 92. D’abord en lançant le technoparc situé juste à côté du tracé, puis en créant la Société d’économiemixte de gestion des 24 Heures du Mans qui rachète le circuit en 1995, il a pris les bonnes mesures. De quoi sortir l’Automobile Club de l’Ouest de l’ornière et donner un coup de boost à l’épreuve. » Entré à l’ACO en 95, justement, Pierre Fillon, son frère cadet, sera nommé administrateur en 2003. Il intégrera le comitédirecteur trois ans plus tard et accédera à la présidence en 2012. « Que ce soit skis aux pieds ou volant en main, Pierre est plus rapide que moi et ça m’énerve » , reconnaît François Fillon le gentleman driver, plusieurs fois concurrent à part entière et entièrement à part de la déclinaison historique des 24 Heures, Le Mans Classic.
Côté F, enfin l’éclaircie
Côté sport auto, sa seule course inachevée, à vrai dire, se situe au virage ô combien périlleux du Grand Prix de France. Après avoir essayé en vain de l’implanter au Mans lorsqu’il roulait encoreàMagny-Cours, l’exMister Nobody, aux commandes de Matignon en 2012, s’était impliquédans le dossier du retour au circuit Paul-Ricard. « Les négociations se poursuivent avec les autorités de la F1 afin d’obtenir des droits de plateau un peu plus raisonnables, mais nous sommes très proches d’aboutir » , avait-il déclaré lors de son passage auCastellet, le 30 mars 2012, dans la dernière ligne droite de la campagne des présidentielles. Finalement, cecomeback varois longtemps espéré a fait « pschitt », à l’instar de tous les autres projets initiés dans la Nièvre et autour de Paris depuis la disparition de GP bleu, blanc, rouge en 2008. Comme par enchantement, au lendemain du verdict sans appel de la primaire, l’horizon s’est à nouveau éclairci pour le tracé varois. Cap sur un nouveau départ en 2018 grâce à l’accord en passe d’être conclu par le président de la région PACA, Christian Estrosi. La feuille de route sera dévoilée lundi à Paris. Cette fois, les collectivités locales du Sud-Est devraient en principe assurer le financement seules, sans aide ni caution de l’État. Pour l’instant, le candidat Fillon s’est abstenu de commenter une nouvelle qui doit certainement le réjouir. Celui-ci parle surtout de ses chevaux de bataille : le lifting de la sécurité sociale, la cure d’amaigrissement de la fonction publique, l’accroissement du temps de travail et de l’âge de départ à la retraite... Au rayon sport? Il n’a évoqué que le rêve olympique de « Paris 2024 ». En souhaitant que « l’investissement demeure raisonnable pour mettre un terme à ce qui commence à devenir scandaleux, l’inflation des coûts. » Qu’en pense Jacky Ickx?