Monaco-Matin

Michel Boujenah: « Les adultes sont des abrutis, vous pouvez l’écrire ! »

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Éternel magnifique sur scène, Michel Boujenah exprime sa sensibilit­é à travers son nouveau film de réalisateu­r, projeté en avant-première hier. Le coeur en braille, ou l’amitié amoureuse de deux adolescent­s, dont une jeune violoncell­iste qui perdprogre­ssivement la vue, mais ouvre les yeux de son entourage adulte. Tendresse, humour, bons sentiments… un film à l’image de l’homme, resté grand enfant. ALEXANDRE CARINI

Votre film est une adaptation d’un livre pour enfants?

Oui, mais je n’ai pas fait un film pour enfants mais avec des enfants. Une petite fille perd la vue, mais en réalité, c’est son entourage adulte qui ne voit rien. Elle va néanmoins au bout de ses rêves, et c’est elle qui va changer la vie de tous. C’est une belle histoire, que je traite avec beaucoup de tendresse et de légèreté. Et puis arrêtons de traiter les enfants comme des enfants! Il faut les considérer comme des personnes, même si c’est vrai qu’ils ont besoin de nous, et nous d’eux.

Depuis Père et fils, la relation filiale semble omniprésen­te dans vos films de cinéaste?

Dans Shakespear­e aussi! Je ne crois pas être le seul auteur qui écrit sur ce type de relation. Mais c’est vrai que la famille est un creuset formidable pour parler du monde, comme de l’amour.

Vous-même, vous êtes un père à l’écoute de vos deux enfants?

Si je ne l’étais pas, après tout ce que je vous dis, faudrait m’enfermer! Après, même si je ne suis pas un père parfait, la seule chose importante que je sais, c’est que je les aime, et ils le savent aussi.

Boujenah, grand enfant?

Mais moi, ça ne m’intéresse pas d’être grand! C’est quoi le monde adulte? C’est le monde de Monsanto, de la Syrie? C’est un monde de fous, et les adultes sont des abrutis, vous pouvez l’écrire! Alors moi, sans déconner, je préfère rester petit, même si c’est angélique. Le cinéma est aussi là pour montrer le monde tel que j’aimerais qu’il soit.

Ce film traite aussi de l’affirmatio­n de la différence, et de ses difficulté­s?

Il faut à la fois affirmer sa différence, et oeuvrer pour un monde plus solidaire.

Le coeur en braille est votre troisième film derrière la caméra. Réalisateu­r, c’est un plaisir particulie­r?

Quand je suis seul sur scène pour mes one-man-show, c’est un vrai bonheur. Être sur un plateau de cinéma avec toute une équipe, ça crée un équilibre parfait avec cette solitude addictive et magnifique. Et puis au cinéma, je peux voir ce que j’ai en tête. Si j’écris un scénario sur la plus belle femme du monde, je la retrouve devant la caméra et je lui dis de faire ce que je veux: le kiff total! [rires]

Et tourner avec des enfants?

Ca ne m’a posé aucun problème, c’était génial! Ma seule angoisse, c’était la fatigue, mais je les ai beaucoup protégés. Je faisais tout pour qu’ils soient heureux sur le plateau. Vous savez, les acteurs adultes sont aussi des enfants. En réalité, je n’ai tourné qu’avec des enfants!

Une avant-première devant le public à Cannes. Le trac?

J’ai peur, bien sûr. Cannes, puis Nice et Cagnes, c’est chezmoi, alors je suis mort de trouille. J’ai plein de copains qui viennent. Mais je suis content aussi de jouer à domicile, car ma vraie vie àmoi, c’est dans le Sud.

Dans le film, l’un des enfants a un pèremusulm­an et unemère juive, et la famille s’astreint aux fêtes religieuse­s en alternance. Symbole du vivre ensemble?

C’est un clin d’oeil. Bien sûr qu’on peut vivre tous ensemble! Et puis arrêtons avec ces problèmes de religions, alors que l’homme trouvera toujours une raison de s’entre-tuer, hélas…

On ne vous a pas vu depuis longtemps devant la caméra?

Des rôles d’acteur me prennent trop de temps. J’ai presque fini de jouer « Ma vie rêvée » sur scène, un spectacle créé à Nice, qui devrait mourir à Anthéa chezmon ami Daniel Benoin. Après, je vais écrire un nouveau spectacle, mais accordez-moi un peu de vacances!

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