AS Monaco : De Sanctis, plus qu’une doublure
Arrivé cet été pour enfiler la tenue de doublure de Danijel Subasic, Morgan De Sanctis fait l’unanimité au sein du club. Le doyen de l’effectif est un homme apprécié et un bon joueur
Morgan De Sanctis est né en 1977, il va donc sur ses quarante printemps. Quand il a débuté son premier match avec Pescara, en 1994, Abdou Diallo et Kylian Mbappé n’étaient pas encore nés. Face à l’AC Ajaccio, les trois joueurs étaient coéquipiers. Il ne faut pas croire que le gardien remplaçant de l’AS Monaco a toujours été le doyen. À ses débuts, comme ses jeunes coéquipiers, il faisait figure de grand précoce. Le 16 octobre 1994, le jeune De Sanctis, 17 ans, fait ses débuts contre Venezia. Histoire de rentrer par la grande porte, il arrête un penalty tiré par un certain Christian Vieri et assure la victoire des siens (1-0). 22 ans plus tard, à Leverkusen, le portier italien était encore suffisamment gaillard pour déposer son nom sur le livre des records de la Ligue des champions en devenant, à trente-neuf ans, 8mois et 12 jours, le joueur le plus vieux à faire trembler ses propres filets en C1. Le record était jusqu’ici détenu par Laurent Blanc. Le 10 avril 2002, lors d’un Manchester United - Deportivo La Corogne, le champion du monde 98 avait marqué contre son camp, alors qu’il était âgé de trente-six ans, 4mois et 22 jours. Ce genre de record pourrait faire sourire mais De Sanctis joue encore au plus haut niveau à 39 ans. « C’est un perfectionniste, détaille André Amitrano, l’entraîneur des gardiens de l’AS Monaco. Il est toujours en demande, en recherche d’informations sur les adversaires, Morgan parle football en permanence » .
« Regarde sur Wikipédia »
Quand il a débarqué cet été après une saison sur le banc à la Roma, sa première en plus de 20 ans de carrière, certains de ses jeunes partenaires ne le connaissaient pas. Pour les chambrer, il leur dit souvent la même chose avec le sourire : « regarde sur Wikipédia, tape mon nom » . On parle d’un garçon qui a dépassé la barre des 600 matches professionnels et qui s’est aventuré dans quatre grandes compétitions internationales en tant que doublure de Gianluigi Buffon, voire même de numéro 3 ( Euro 2008 et 2012, Coupe des Confédérations 2009, Coupe du Monde 2010). C’est ça, le malheur du portier monégasque, être né un an avant le meilleur gardien de l’histoire de l’Italie. Car, intrinsèquement, De Sanctis a tout ce qu’il faut. Amitano encore : « Morgan a une très bonne technique de ligne, il va vite au sol mais comme tous les gardiens italiens, il ne sort pas trop et préfère laisser ses défenseurs intervenir. Son truc, c’est les 5,50 mètres. Dans les réflexes, il est là. On parle d’un gardien qui a joué plus de 20 matches de Ligue des champions et qui a oeuvré dans plusieurs grands clubs » . Son seul regret, ne pas avoir réussi à faire son trou à la Juventus où il fut barré par Angelo Peruzzi à la fin des années 90. C’est donc dans le Frioul, à Udine, que De Sanctis va prendre son envol et va y vivre sa plus longue expérience en club avec huit saisons pleines. Estimant avoir fait le tour de la chose, le gardien fait finalement valoir sa clause de stabilité - via l’arrêt Webster - celle-ci lui donnant la possibilité de racheter sa dernière année de contrat pour s’en libérer C’est ainsi que l’Italien s’aventure d’abord en Espagne avant de migrer en Turquie, à Galatasaray. Istanbul justement, c’est là qu’il va s’offrir sa première sortie officielle sous le maillot monégasque.
Une stature à se faire écouter
On est fin juillet face au Fenerbahçe. « Il débute très bien mais se blesse au sternum en première mitemps, rembobine Amitrano. C’est une blessure sérieuse, encore plus à son âge » . Bourreau de travail, le Transalpin se retape en moins d’un mois. Dans un effectif très jeune, l’homme de 39 ans ne passe pas aperçu. « C’est le sage, détaille Amitrano. Il a une stature à se faire écouter. Il se fait juste chambrer par son compatriote Andrea Raggi mais c’est bon enfant » . A l’entraînement, De Sanctis ne se relâche jamais : « Il est en permanence sur le dos de ses coéquipiers, poursuit Amitrano. Il parle beaucoup, motive, c’est un gardien qui est dans le dialogue permanent » . Après tout, peut-on encore apprendre quelque chose à un homme de 39 ans qui joue au football depuis plus de 20 ans ? « Le changer, non, mais on peut lui faire découvrir autre chose » , conclut Amitrano. Comme une nouvelle langue. Une semaine après son arrivée à la Turbie, De Sanc-
tis comprenait déjà la langue de Molière. Joueur d’une autre époque, la doublure de Subasic sait aussi se remettre en question quand il le faut. En 2014, il est à l’origine d’un but encaissé en Ligue des champions avec la Roma. A la sortie du match, il est dans le déni : « Ceux qui m’accusent d’avoir fait une erreur sont malhonnêtes ou alors ne comprennent rien au foot » . La nuit portant conseil, il reprend la parole le lendemain : « J’ai revu le but et je dois corriger mon opinion, j’assume mes responsabilités » . Grand monsieur. Son professionnalisme et son expérience sont deux belles découvertes du côté de l’AS Monaco. Après Romero, Stekelenburg et Nardi, Monaco avait misé sur un autre profil pour épauler Subasic. Un choix qui a conquis tout le monde puisqu’au club il se dit qu’en juin prochain, quand De Sanctis arrivera à la fin de son contrat, une dernière pige pourrait être évoquée. Morgan De Sanctis aura 40 ans.