Monaco-Matin

Le grand oral de Donald Trump

- Par MICHÈLE COTTA

« Je serai le plus grand créateur d’emplois que Dieu

ait créé. » On peut dire beaucoup de choses sur Donald Trump, mais sans doute pas qu’il est modeste, ni qu’il hésite à parler de lui en termes hyperboliq­ues. On retiendra cela d’abordde la première conférence de presse du  président des États-Unis d’Amérique. Et aussi qu’il est loin d’avoir revêtu le costume de sa haute fonction. Hier, Donald Trump n’était pas le Président qui sera officielle­ment investi le  janvier prochain, mais encore le candidat tendu à l’extrême, index pointé sur son auditoire, menaçant à l’égardde la presse américaine, qu’il juge acquise à la cause de ses adversaire­s démocrates et, surtout déchaîné contre les services spéciaux de son pays, qu’il accuse d’avoir, avec des procédés « dignes de l’Allemagne

nazie » , tenté de le déstabilis­er. « Un Président élu, mais pas encore officielle­ment intronisé, s’adressant aux Américains et au monde dans le vocabulair­e violent et facilement vulgaire de sa campagne électorale. » Une interventi­on inédite, vraiment, depuis les débuts de la démocratie américaine: un Président élu, mais pas encore officielle­ment intronisé, s’adressant, au-delà des journalist­es, auxAmérica­ins et à tous les citoyens du mondedans le vocabulair­e peu choisi, violent, facilement vulgaire, de sa campagne électorale. Il faut dire que l’exercice n’était pas facile pour Donald Trump. La publicatio­n, avant-hier, par le site BuzzFeed, d’un document de  pages accréditan­t l’hypothèse de liens proches avec Vladimir Poutine, ne lui avait pas facilité la tâche. Et moins encore une supposée vidéo compromett­ante, où il aurait été filmé se livrant à des ébats sexuels pervers dans un hôtel de Moscou. Vidéo soigneusem­ent classée, on s’en doute, dans les dossiers du Kremlin. Toutes accusation­s qu’il a démenties, on s’en doute, avec force. Comme si cela ne suffisait pas, Donald Trump a voulu couper le cou avant son entrée à laMaison-Blanche aux rumeurs sur d’éventuels conflits d’intérêts avec son énorme patrimoine immobilier. Du jamais-vu dans une conférence de presse de ce type: c’est son avocate, prenant sa place à la tribune, qui a évoqué le dossier, et démontré que l’homme qui allait prendre place dans le salon ovale avait préféré, plutôt que s’en défaire, confier la direction de toutes ses entreprise­s à ses deux fils. Dans ce contexte, Donald Trump aurait pu être déstabilis­é: il n’en a rien été, il est resté lui-même, offensif, allant jusqu’à accabler cinq fois les services spéciaux américains, qui seront les siens dans quelques jours. Et il a trouvé, pour parler de son action future, les mots les plus enthousias­tes: lutte contre la délocalisa­tion des entreprise­s américaine­s, lourdes taxes frontalièr­es sur les récalcitra­nts, mise en pièces de l’Obamacare, ce dispositif contesté, cher au Président sortant, de meilleure couverture des soins de santé. Sans oublier le mur, lemur promis entre le Mexique et les Etats-Unis, dont la constructi­on doit commencer dès son installati­onàWashing­ton. Tel qu’il est, Donald Trump, qui ne manque ni d’air ni de caractère, a été élu par les Américains. Il faudraque le monde entier le prenne tel qu’il est. Pour le meilleur ou pour le pire.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Monaco