Lemondeselon Trump
Que restera-t-il dans les prochains jours de cette unité que l’Amérique a affiché hier lors de la cérémonie d’investitureàWashington de Donald Trump, président des États-Unis? Cérémonie grandiloquente, rituelle, au cours de laquelle chacun a tenu son rôle jusqu’au bout, Donald Trump et sa femmeMelania raccompagnant Barack et Michele Obama à la coupée de l’hélicoptère qui les emmenait vers un nouveaudestin. On ne pouvait s’empêcher, à cet instant, de songer à François Hollande en mai tournant le dos au couple Sarkozy sur le perron de l’Élysée au moment où il regagnait sa voiture! Respect des formes, spectacle de l’unionnationale et, pourtant, l’Amérique et le monde ont aussi plongé hier dans l’inconnu. Le discours de Donald Trump après sa prestation de serment n’aura sans doute pas rassuré les électeurs qui ont voté contre lui et le reste dumonde. Car Trump président a parlé comme Trump candidat. Rien de nouveau qui puisse inverser une opinion sceptique puisque % seulement des Américains émettent un avis favorable sur lui. Aucun de ses prédécesseurs n’est entré à la MaisonBlanche dans une situation aussi médiocre. Certes, ilaproclaméqu’il voulait rendre lepouvoir au peuple, mais ce slogan ne trouve unécho que dans son électorat. Electorat minoritaire, faut-il le rappeler, puisque, vaincue dans la bataille des grands électeurs, Hillary Clinton l’a emporté de près de millions de voix au suffrage universel. Le scepticisme demeure, car c’est une véritable rupture que propose Trump. Derrière sa formule
« L’Amérique d’abord » se profile une rude politique isolationniste. Certes, Barack Obama avait retiré les troupes américaines d’Afghanistan et d’Irak, mais il n’avait pas manifesté à l’endroit de la Chine ou de l’Europe cetteméfiance, voire cemépris, qu’affiche Trump. Industrie, libre- échange, immigration, défense, c’est un protectionnisme radical que veutmettre enoeuvre le nouveau président américain en espérant ainsi relancer l’économie outre-Atlantique, y doper la création d’emplois, améliorer le pouvoir d’achat de ses compatriotes. Un pari. Il ne sert à rien, cependant, de se désoler face à ce changement de cap. Il faut, surtout, en mesurer les conséquences dès que tomberont les premières décisions, et préparer la riposte. Ce repli américain met notamment l’Europe face à ses faiblesses et ses responsabilités. Il est temps qu’elle assume sadéfense et n’en laisse pas reposer la charge sur les États-Unis. Il est nécessaire qu’elle réfléchisseàmieux préserver son espace économique. Le Brexit lui en donne l’occasion. Il est important qu’elle veille à une répartition plus juste de ses richesses. Il est impératif qu’elle renforce le dispositif de Schengen. Il est donc urgent que nos présidentiables s’emparent de ces questions. La France a un rôle essentiel à jouer au sein de l’Europe face au monde selon Trump.
« Industrie, libre-échange, immigration, défense, c’est un protectionnisme radical que veut mettre en oeuvre le nouveau président américain. »