Listenoiredes médicaments: pas de panique! Retour sur l’actu
Au lendemain de la publication par la revue Prescrire d’une nouvelle liste noire de médicaments à éviter, le Pr Milou-Daniel Drici réagit, sans langue de bois
Jeudi dernier, la revue indépendante Prescrire dévoilait sa nouvelle liste noire de médicaments considérés « plus dangereux qu’utiles » et « à éviter enraison des risques sanitaires disproportionnés » qu’ils feraient courir aux patients. Composée de médicaments, dont vendus en France, cette liste a été établie sur la base d’analyses publiées dans la revue au cours des années à . Cancer, diabète, arthrose, allergies, maladie d’Alzheimer, nausées et vomissements… La listedes maladies ou des symptômes ciblés par cesmédicaments (nouveaux ou anciens) est très vaste. Et ce sont des millions de Français qui sont concernés. Le Pr Milou-Daniel Drici, directeur du centre de pharmacovigilanceNice-AlpesCôte d’Azur, apporte son éclairage.
Doit-on se fier à ce qui est indiqué dans la revue Prescrire? La revue Prescrire joue son rôle de lanceur d’alerte, et c’est très bien. Mais ses évaluations s’appuient sur un réseau de relecteurs, composé, comme elle le précise, de « spécialistes divers, et praticiens représentatifs du lectorat » . Ça n’a absolument rien à voir avec le processus très rigoureux d’évaluation des médicaments à l’échelle européenne, qui fait appel lui à des médecins et pharmaciens spécialistes du médicament. La revue ne dispose ainsi que de la « partie émergée de l’iceberg » du dossier médicamenteux, alors que l’agence européenne dispose de l’intégralité de ces données. Tant en terme de bénéfice que de sécurité dumédicament.
Que pensez-vous de cette liste? Outre les médicaments pour lesquels les autorités de santéont parfaitement joué leur rôle puisque, comme la revue elle-même l’indique, ils ne sont pas disponibles en France, beaucoup d’autres ne sont pas remboursés, ce qui en limite considérablement la disponibilité.
Estimez-vous que certains médicaments ne « méritent » pas de figurer dans cette liste? Oui. Je citerai le cas de l’ivabradine, qui ralentit le coeur. Cemédicament a prouvé un intérêt dans l’insuffisance cardiaque et peut être utile dans l’angor [angine de poitrine, Ndlr] chez des patients qui ne tolèrent pas les bêtabloquants ni le vérapamil, par exemple. Autre exemple, la ranolazine: contrairement à ce qu’écrit Prescrire, c’est un médicament efficace contre l’angine de poitrine. On lui demande de diminuer les symptômes et c’est ce qu’il fait! Sur la liste, continuent de figurer les fameux anti-inflammatoires de la famille des coxibs. Leurs effets indésirables ne font pourtant plus de doute… Les coxibs peuvent en effet exposer à un surcroît d’effets indésirables cardiovasculaires. Mais Prescrire oublie de signaler la raison pour laquelle ces traitements ont étémis sur le marché: ils diminuent le risque d’hémorragies digestives associées à d’autres anti-inflammatoires comme le naproxène ou l’ibuprofène.
Vous dites qu’on se trompe parfois « d’ennemi » ? Si la prescription n’est pas conforme aux indications préconisées par l’industriel, la revue ne devrait en effet s’en prendre qu’aux prescripteurs. En cas d’accident de la circulation, ce n’est pas Renault ni Peugeot le responsable, mais bien le conducteur! Pr Milou-Daniel Drici
Mais si un problème est réellement dû à unmédicament? En cas d’alerte en France ou ailleurs, le problème est toujours examiné par des professionnels au niveau de l’Europe et il est alors décidé de suspendre les médicaments, de modifier l’indication ou encore de rappeler aux prescripteurs les façons correctes de l’utiliser. Onpeut citer l’exemple de Diane, utilisée comme moyen de contraception, alors qu’elle n’est en aucun cas une pilule, mais un traitement hormonal de l’acné modéré à sévère. Ce médicament a nécessité un rappel à l’ordre des prescripteurs français; ailleurs en Europe, il était utilisé très correctement. Je ne conseille en aucun cas l’arrêt d’un quelconque traitement au long cours sans avis médical. Par ailleurs, et de façon générale, il ne faut jamais garder de médicaments dans l’armoire à pharmacie, autres que ceux d’utilisation courante comme le paracétamol ou l’aspirine. Et même pour ce type de médicaments, il faut être très attentifs aux dates autorisées d’utilisation, aux conditions de conservation (ainsi un sirop ouvert ne doit plus être utilisé au bout de jours…) et les mettre hors de portée des enfants. Si les médicaments sont pris conformément à une juste prescription, il n’y a aucun lieu de s’inquiéter. Néanmoins, en cas de douteoude problème, il ne faut pas hésiter à contacter son médecin ou son pharmacien d’officine. Et si un événement indésirable apparaît, on peut joindre le centre régional de pharmacovigilance par e-mail, fax ou téléphone au .....