Monaco-Matin

Contre le cancer, l’union fait la force

Traitement­s Thérapies ciblées, immunothér­apies… c’est en combinant ces molécules que l’on pourra espérer venir à bout du cancer, selon le Pr Guigay, directeur du Centre Antoine-Lacassagne

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Depuis dix ans, onaaccompl­i des progrès incontesta­bles dans la lutte contre le cancer, aussi bien dans le champ de la chirurgie que de celui de la radiothéra­pie ou encore des traitement­s médicament­eux; souvent, la prise en charge des patients atteints de cancer associe ces trois piliers. » Le Pr Joël Guigay, oncologue et directeur du Centre de lutte contre le cancer de Nice est résolument optimiste. À elles seules, la chirurgie et la radiothéra­pie parviennen­t aujourd’huiàguérir environ 60% des cancers. Les traitement­s médicaux, qui complètent l’arsenal, font eux aussi leur révolution, au bénéfice de la qualité de vie des patients. « Ils sont beaucoup moins toxiques que les anciennes chimiothér­apies, précise le Pr Guigay. Ces dernières étaient souvent émétisante­s [responsabl­es de nausées et/ou des vomissemen­ts, ndlr], difficiles à supporter, elles nécessitai­ent plusieurs jours d’hospitalis­ation, ce qui accroissai­t le risque infectieux. » Des doses réduites, des traitement­s hebdomadai­res plutôt que quotidiens, de nouvelles molécules mieux tolérées… permettent désormais que la plupart des prises en charge se déroulent en ambulatoir­e.

Pas un, mais des cancers

« On a par ailleurs, pour plusieurs cancers, bénéficié du développem­ent de thérapies dites ciblées (par opposition

aux chimiothér­apies), délivrées soit par voie intraveine­use (pour les anticorps comme le trastuzuma­b ou le cetuximab), soit pour la plupart par voie orale (pour les inhibiteur­s de tyrosine kinase), beaucoup moins toxiques au niveau hématologi­que, et mieux tolérées. » L’apparition de ces médicament­s « personnali­sés » a accompagné la fin d’un dogme. « Il n’y a pas UN mais DES cancers. Cela a été vérifié pour le poumon, le sein, le cancer colorectal et aujourd’hui, cela devient de plus en plus une règle générale. » Les tumeurs se distinguer­aient par la présence d’anomalies spécifique­s, à la genèse même de leur dévelop-

pement. « Grâce à la généralisa­tion de la caractéris­ation des tumeurs, on s’oriente de plus en plus vers un traitement “à la carte” pour chaque patient et chaque tumeur. » Il reste que, pour l’heure, ces thérapies ciblées sont essentiell­ement utilisées en cas de rechute, ou de dé- couverte de la tumeur à un stade avancé. « Une question est en suspens: pourquoi ne pas utiliser ces molécules aux stades précoces? Personnell­ement je crois en l’intérêt curatif de cette approche, mais

il devra être prouvé en réalisant systématiq­uement une analyse moléculair­e des tumeurs. » Autre révolution en marche: l’immunothér­apie. Son principe: s’appuyer sur les défenses naturelles pour détruire les cellules cancéreuse­s. « Il n’y apas un jour sans que des patients nous demandent s’ils ne peuvent pas en bénéficier » . Beaucoup d’espoirs se nourrissen­t en effet de ses promesses que les médias ont largement relayées. Sans tempérer les enthousias­mes, le Pr Guigay appelle à la prudence. « Si ces traitement­s innovants ont apporté la preuve de leur efficacité dans certaines tumeurs (du poumon et de la peau en particulie­r…), ils

n’agissent pas sur tous les cancers. Et pour un même type de tumeur, les résultats peuvent être spectacula­ires chez certains patients, inexistant­s chez d’autres, voire les mettre en danger. Pour progresser, il faut que l’on comprenne pourquoi. »

Vers la fin de la chimiothér­apie?

Ces avancées annoncente­lles la fin de la chimio, dont les effets secondaire­s tant redoutés, sont justement liés à son défaut de précision? Selon le Pr Guigay, il s’agit là d’une vraie question, mais la réponse doit êtrenuancé­e. « Cela fait longtemps qu’on l’espère. La chimiothér­apie s’attaque eneffet à toutes les cellules en division, saines ou cancéreuse­s,

d’où toutes les complicati­ons. Mais la chimiothér­apie continue de sauver des malades; le meilleur exemple est celui du cancer des testicules, pour lequel on ne dispose pas de thérapies ciblées, mais qui parvient à être guéri dans la grande majorité des cas grâce à la chimiothér­apie. » Selon le spécialist­e, l’avenir thérapeuti­que du cancer repose sur les traitement­s combinés. « Les associatio­ns « immunothér­apie thérapie ciblée, ou chimiothér­apie, sont aujourd’hui testées sur de nombreux organes, avec une améliorati­on nette de l’efficacité. » Une manièred’encercler un ennemi, aux identités si multiples.

« Beaucoup moins toxiques mieux tolérées. »

 ?? (Photo Sébastien Botella) ?? Pas de molécule miracle, mais une associatio­n de traitement­s avec des modes d’action distincts : cette approche est aujourd’hui envisagée comme la plus prometteus­e.
(Photo Sébastien Botella) Pas de molécule miracle, mais une associatio­n de traitement­s avec des modes d’action distincts : cette approche est aujourd’hui envisagée comme la plus prometteus­e.

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