Toujours debout
Encaisser, remiser. Tout le secret de la boxe est là. Et celui du combatpolitique qui, parfois, lui ressemble tant. Tous les pratiquants vous le diront: enboxe, pour bien se défendre, il faut d’abordaccepter de subir des dommages. Quant on joue sa peau, le but n’est pas d’éviter les coups de l’adversairemais de puiser dans la douleur la forcede frapper plus vite, plus fort. Après avoir longtemps cherchéàesquiver – àcoup de demi-vérités, de ripostes brouillonnes et de réponses que lui-même qualified’ « imprécises » -, François Fillon, dos au mur, a acceptéhier de se mettredans le dur. Oui, il le reconnaît, il a reçu un coup à l’estomac. Il a été « déstabilisé ». Et il en paie le prix, cash, en se résignantàcequ’il avait jusqu’ici voulu éviter: reconnaître une « erreur » qu’il « regrette profondément » . Laditeerreur, croit-on comprendreautravers de formulations habilement ambiguës, étant d’ailleurs moins d’avoir employé les siens que d’avoir mis trop longtemps àcomprendreque ces pratiques hier « acceptables » ne le sont plus aujourd’hui. Une erreur de jugement, en somme, une fautepolitique plutôt qu’une fautemorale. Mais une erreur quand même. Sinon, il ne serait pas senti obligé de présenter ses excuses aux Français. La démarche, manifestement, lui coûtait. Elle vient bien tard. En boxe, ondirait qu’ilamis un genou à terre. Ilaétémêmecompté. Et puis il s’est relevé. Quoi qu’on pense de l’affairesur le fond, force est de constaterque le François Fillon d’hier n’était pas lemêmequ’onavu, sévèrement touché, dans la vidéo postée vendredi sur Facebook. Le regardétait ferme, l’expression maîtrisée. L’attitude, celle d’unhomme décidé à rendrecoup pour coup. Des coups, il y en aeupour tout le monde. Tous ceux qui ont cherché à l’ « assassiner politiquement » . La presse, pardi! Mais aussi le parquet financier, dont il conteste lacompétenceet suggèrequ’il pourrait être l’instrument d’une « opération montée» . Etderrièreeux, le « système » , qui rêved’unduel Macron-Le Penet voudrait « voler le choix » des électeurs de droite. La contre-attaque, très politique, visait d’abordàdissiper ledoutequi gagnait son camp. Avisaux électeurs troublés, tentés d’aller voir ailleurs; avisaux ambitieux qui dans l’ombreaiguisaient leur couteau: ce sera lui ou la défaite. Il n’yapas de plan B. « LeplanB, c’est le plan Bérézina. » François Fillon a-t-il gagné son combat? La suite ledira. Ala justiced’établir les faits et de vérifier si, commeil l’assure, tout était
« strictement légal » . Aux Français– au-delà du cercle des Républicains convaincus – de décider si l’ « erreur » est pardonnable. Ilaentout casmarqué des points. S’il n’est pas tiré d’affaire, et n’apas encore retrouvé le statut de favori de la présidentielle qui était le sien ilyaquelques semaines encore, ilaentout casparlé en patron de la droiteetbalayé les spéculations du microcosme. Tous ceux qui espéraient ou redoutaient sa chuteprochaine doivent se rendreàl’évidence: Battling Fillon est toujours debout.
« La contre-attaque, très politique, visait d’abord à dissiper le doute qui gagnait son camp. »