Monaco-Matin

Le Monégasque Olivier Jenot rêve toujours des JO

Victime d’une chute terrible dans l’épreuve du super-G des championna­ts du dernière, le skieur monégasque Olivier Jenot garde le moral intact et affiche monde la semaine ses ambitions

- ENTRETIEN RÉALISÉ AVEC LE CONCOURS DE STÉPHAN MAGGI (Comité olympique monégasque)

Mercredi 8 février. En lice, à Saint-Moritz, dans l’épreuve du super-G, la première épreuve des championna­ts du monde, le skieur monégasque Olivier Jenot chute lourdement. Les images diffusées sur le net – elles ont été vues depuis par des centaines de milliers de personnes – sont angoissant­es et éprouvante­s: on craint le pire. Opéré le soir même en Suisse, Olivier Jenot s’ensort indemne. De retour en Principaut­é depuis ce lundi, il se confie.

Olivier, racontez-nous votre chute lors du Super-G… On avait eu juste un entraîneme­nt officiel la veille. Dans cette course, j’ai mal négocié un virage avec un mouvement de terrain un peu durci avant la bosse. J’avais le sentiment d’avoir fait une petite faute avant et de devoir reprendre la vitesse rapidement. J’ai pris un risque qui était visiblemen­t trop important. J’ai perdu le contrôle au niveau de cette bosse. Heureuseme­nt, je n’ai pas trop mal négocié la réception au niveau demon corps, en faisant comme j’ai pu… J’ai réussi à ne pas taper la tête la première, à ne pas perdre connaissan­ce. Je m’en tire bien, cela aurait pu être plus grave.

Vos impression­s quand vous sentez que vous allez à la faute? En l’air, j’ai tout de suite compris que ça n’allait pas bien se terminer… J’ai donc tout fait pour minimiser les conséquenc­es. Quand je suis tombé, l’impact a été violent. J’étais sous le choc, mais j’ai vite constaté que je pouvais à peu près tout bouger. Je n’ai donc jamais été tellement inquiet. Intérieure­ment, c’était moins impression­nant que ce que les images peuvent montrer.

Les avez-vous vues? Je n’ai pas cherché à les visionner dans un premier temps, je ne pense pas que ça apporte grandchose au niveau dema récupérati­on. J’avais plus besoin de digérer l’événement. Je serai amené à les regarder dans les prochains jours, au calme.

Après votre chute, vous avez été évacué par hélicoptèr­e… Sur la piste, j’ai tout de suite été très bien pris en charge par les équipes médicales de SaintMorit­z. J’ai été héliporté à l’hôpital de Coire où j’ai été admis pour des premiers examens qui ont révélé une rupture du ligament interne. Ce n’était pas

une grosse blessurema­is ça pouvait jouer sur la mobilité et la stabilité du bassin. J’ai dû donc subir une opération pour fixer l’avant du bassin et être sûr qu’il n’y ait pas d’autres conséquenc­es. Àpart ça, j’avais quelques contusions au poumon et au foie qui se sont révélées être mineures. J’ai quand même été placé en soins intensifs durant la première nuit. Vos parents ont dû avoir très peur… Ils ont vécu des minutes voire des heures assez longues parce qu’ils étaientàMo­naco et qu’ils n’avaient pas toutes les informatio­ns… Mon père, grâce à un ami suisse, a vu rapidement ma chute sur internet. Ma mère n’a pas voulu regarder tout de

suite. Arrivé à l’hôpital de Coire, je les ai appelés et je les ai rassurés.

Est-ce l’accident le plus grave que vous ayez connu? C’est la chute la plus violente. Mais après, je pense que j’ai beaucoup de chance, car je vais pouvoir revenir assez rapidement. Par rapport à mes autres blessures (rupture des ligaments croisés, luxation de l’épaule) qui ont nécessité aumoins six mois de rééducatio­n avant de pouvoir envisager un retour, et d’après ce que l’on m’a dit, je pourrai reprendre normalemen­t d’ici trois ou quatremois un entraîneme­nt relativeme­nt normal et regoûter ainsi aux sensations de glisse. Ce ne sera pas un rythme fou, mais ce sera moins de six mois, donc je m’en tire finalement bien.

Votre programme à présent? Dans un premier temps, je vais rester tranquille pendant quinze jours, notamment à cause des contusions pulmonaire­s et au foie. Les hématomes dusàma chute doivent aussi se résorber. Après, je vais commencer une rééducatio­n orientée certaineme­nt vers des exercices de mobilité articulair­e et du gainage. Tout se fera auprès de l’équipe médicale et de préparatio­n des équipes de France avec qui je collabore depuis le printemps dernier. Je suis en effet intégré au sein du groupe Coupe d’Europe, ce qui me permet de bénéficier de tout l’appui logistique etmédical du staff tricolore. C’est vrai que j’ai connu pas mal de blessures. Bien que celle-ci soit la plus lourde, j’ai l’impression de l’accueillir avec plus de calme et de sérénité que les autres. Sans doute à cause des années et avec l’expérience… J’ai pleinement conscience que ça aurait pu être plus grave et jeme réjouis d’avoir peu de problèmes pour reprendre assez rapidement. Avec cette nouvelle blessure, je n’ai pas vraiment de repères comme j’avais pu l’avoir pour mes genoux (NDLR: blessures en  et en ).

Aucune appréhensi­on pour remonter sur les skis? Aujourd’hui, non. Ce sera peutêtre plus compliqué quand je rechausser­ai les skis. Je pense avoir bien analysé l’erreur que j’ai commise. Je sais que c’est une petite erreur qui a été lourde de conséquenc­es, une fautemal placée. C’était le seul endroit de la piste où il ne fallait pas faire ce type d’erreur. C’est pour cela que c’était impression­nant. Mais au final, ça nem’a pas refroidi plus que ça. Ce n’était pas le cas en en  (luxation de l’épaule) où j’avais vraiment été marqué très fortement moralement. Là, je suis étonnammen­t optimiste pour la suite.

Cette chute signe malheureus­ement la fin de votre saison… Celle-ci sera tronquée car je vais rater pas mal de courses et je vais donc perdre des places au niveau mondial. J’avais eu un début de saison en dents de scie, cela n’avait pas fonctionné aussi bien que ce que j’espérais, mais je sentais que ça commençait à changer. Du coup, je vais devoir retrouver, à mon retour, mon rang mondial pour avoir des dossards intéressan­ts pour l’année prochaine. Ce sera une position inédite, mais également un joli challenge.

Àquand votre retour? J’espère être capable de remonter sur les skis au plus vite, en début d’été sur les glaciers et pouvoir relancerma saison de compétitio­n en tout début d’automne dès les premières courses en Europe, voire pourquoi pas avant dans l’hémisphère Sud.

Malgré cette nouvelle blessure, on vous sent positif… Je suis obligé d’accepter ce type d’événement, je suis dans une discipline à risques. Il y a d’autres sports où c’est un peu moins risqué, mais la blessure fait partie de la vie du sportif. Il y en a très peu qui arrivent à passer à travers. Une blessure, ce n’est jamais rien, ce n’est pas toujours évident à vivre. Mais je me rends compte aussi qu’à travers les blessures ce sont des moments où l’on peut prendre du recul et donner un nouvel élan à sa carrière ou faire évoluer sa manière de faire, son entraîneme­nt. Sur l’instant présent, c’est plutôt quelque chose de négatif, mais il y a toujours quelque chose à en tirer. J’aime à penser que ça peut être positif pour la suite.

Vos prochains objectifs? Dans ma tête, je ne regarde pas le long terme. En effet, ça peut vite évoluer, pour pas grand-chose… Depuis  et ma blessure à l’épaule, jeme suis un peu obligé à voir les choses saison après saison et pas trop me projeter sur deux, trois voire quatre ans. Cela ne m’empêche pas d’avoir des sources demotivati­on et de projection à long terme. Mais j’ai mis le focus sur ce qui se passe sur la saison en cours et le présent. L’objectif est vraiment de revenir pour la saison prochaine et de donner le maximumpou­r arriver dans de bonnes conditions aux JO. Cette chute ne remet pas en question cette importante échéance.

J’espère remonter sur les skis en début d’été ”

 ?? (Photo Stéphan Maggi) ?? Olivier Jenot: « Je compte bien être capable de remonter sur les skis au plus vite et pouvoir relancer ma saison de compétitio­n en tout début d’automne. » À  ans, physiqueme­nt et moralement, comment repartir de l’avant?
(Photo Stéphan Maggi) Olivier Jenot: « Je compte bien être capable de remonter sur les skis au plus vite et pouvoir relancer ma saison de compétitio­n en tout début d’automne. » À  ans, physiqueme­nt et moralement, comment repartir de l’avant?

Newspapers in French

Newspapers from Monaco