AToulon, bienvenue chez la coopérativeMacron
Les adhérents du mouvement « Enmarche! » sont regroupés en comités locaux afin de formuler des propositions pour nourrir le programme du candidat. Immersion au royaume de la synthèse
Nous allons commencer l’atelier du plan de transformation d’Emmanuel Macron. » Ce jour-là, dans une chaumière cossue nichée sur les contreforts du baou des QuatreOures, àToulonOuest, c’est rien moins que l’avenir du pays qui est à l’ordredu jour. À14h15 pétantes, Gilles Vautrin, lunettes carrées, chemise bleu ciel et cardigan gris, ouvre lebal, le nez collé àson cahieràspirale. Face au propriétairedupavillon, une assemblée de seize âmes, carnets et stylos en mains. Des quinquagénaires en majorité, quelques retraités, mais aussi un adolescent, deux pèresde famille et trois minots qui jouent aux jeux vidéo sur le canapé.
« Ça monte tous les jours »
« Après l’éducation, le travail, la santé, lasolidarité, l’Europe et la vie démocratique, poursuit le responsableducomité local 287, nous vous proposons cette semaine un atelier sur l’environnement. » Le comité local, c’est la première plate-forme de l’usine Macron, à laportée de l’internaute qui désire s’engager. « Bandol, Sanary, des comités se forment un peu partout… » Le groupe du père fondateur du mouvement à Toulon compte 79 membres. « On était une dizaine en novem- Mais qui sont-ils donc, tous ces « marcheurs » qui se multiplient comme des petits pains et suivent Emmanuel Macron avec un enthousiasme juvénile? Ils sont environ 3500 dans les Alpes-Maritimes. Ecoutons quelques-unsd’entreeux.
61 ans, avait milité chez Les Verts avant 2002. Depuis, elle était devenue « abstinente » en politique, selon son expression. Elle a rejoint « En marche! » en avril 2016, dès le départ donc, et en anime aujourd’hui la délégation de Mouans-Sartoux. Elleexpliqueson ralliement avec la clarté chirurgicale de l’ingénieur qu’elle est. « Emmanuel Macron est jeune, brillant, sincère, optimiste. C’est un progressiste, il a un projet social-libéral qui me convient. Et puis “En marche!” fait un usage pertinent de l’intelligence collective, on se réunit dans des ateliers pour ébaucher un programme qui aura un ca- bre, depuis janvier ça monte tous les jours… » Commeses adhérents, Gilles est un déçu des partis traditionnels. Lorsque « l’homme providentiel » est apparu, l’ancien employé de banque s’est levé etapris le destinen route. « En2007, j’ai adhéré au PS et participé à lacampagne de Ségolène [Royal, Ndlr] ; je drage budgétaire précis. »
« Une nouvelle offre »
68 ans, a travaillé dans la fonction publique puis en libéral. Ce Juanais n’avait jamais fait de politique auparavant, mais il s’y est toujours intéressé. « Mon père, résistant issu d’une famille pauvre, m’a transmis une éducation gaulliste plaçant la France au-dessus de tout. J’ai retrouvé chez Macron des allures gaulliennes et cet amour fort de la France. De plus, il est l’homme du travail, celui qui dit que c’est grâce au travail qu’on se construit. Et puis, je trouvestupidedelaisser passer debonnes idées sous prétexte de clivage gauche-droite, ce quiaété le cas pour la loi ElKhomri, que la droite n’a pas votée. Enfin, il s’appuie vraiment sur les Français pour bâtir son programme.»
responsable financier de 34 ans, ne s’était « jamais spécialement engagé auparavant », mêmesi ne suis resté que deux ans. La cellule toulonnaise ne vivait pas, zéro réunion, zéro dynamique. Là, c’est moi qui crée le mouvement! » Sous les aquarelles provençales, chercheurs, cadres, indépendants et employés refont le monde dans une atmosphère de salon de thé. Onse tutoie, on s’appelle par son coeur penche plutôt à droite. Aujourd’hui responsable de la logistique d’« En marche! », ce Cannois avance trois raisons à son engagement: « Il apporte une nouvelle offre politique, qui sort des clivages qui n’ont rien produit de bon jusqu’ici, pour retenir les meilleures idées d’où qu’elles viennent ; il met en avant un projet européen fort – il est l’un des rares, sinon le seul dans ce cas ; et il a une approche du travail basée sur la souplesse et la réduction des monopoles. »
49 ans, négociatriceen immobilier installéeàSaintJeannet, est elle aussi sensible à la façon dont Macron aborde la politique autrement, « en balayant le clivage droite-gauche ». « Il a une vision de la France et du monde du travail qui m’intéresse, notamment dans sa volonté de supprimer le RSI ou d’introduire de la souplesse entre employeurs et salariés. Il met aussi son prénom, on baragouine parfoisenanglais ou en abréviations. Mais l’invitation est minutée. « On va passer à l’atelier, je vais vous lire la méthodologie. Ensuite on se divisera en trois sous-groupes, l’un ira dans la cuisine, l’autre restera dans le salon, le troisième ira au rez-de-chaussée… »
« J’ai préparé des fiches »
« Avec Macron, nous ne sommes pas dans un système pyramidal, martèle Sylvie, une enseignante pointilleuse. Là, on construit un programme progressivement, en tenant comptedes idées, avis, aspirations. Le contrat avec la Nation est en train de se réaliser à travers l’échange d’idées entre la baseet celui qui va la représenter. » Jusqu’au2mars, date de publication du fameux projet, Gilles fera tourner la coopérative toulonnaise avec le même entrain. « Des questions? Çava? Eh ben, on se divise en trois… »« Attends, t’as l’accent sur l’éducation et veut donner sa chance à chacun, en ne laissant plus certains enfants livrés à eux-mêmes au fond de la classe. »
« Il ravive l’espérance »
analyste financier de 25 ans, anime le comité « En marche! » de Cannes. Il met en avant la cohérence d’Emmanuel Macron. « Il yaune réellehomogénéitédans son projet, lequel est axé sur l’Europe, l’attachement au travail, la liberté et la laïcité. Il a une vraie vision du monde du travail et il n’yapas chez lui de retournement de veste. Sa philosophie est la même que lorsqu’il siégeait au gouvernement, il s’inscrit dans une continuité. »
31 ans, Français d’origine sénégalaise qui vitàNice, est aujourd’hui en charge de la formationetde lamobilisation dans le mouvement. Il dit vouloir prendre toute sa place dans la construction pas lu le “diag”… »« Pardon, je suis allé tropvite. Qui veut lire le diagnostic? Sur les questions posées, notez bien les interrogations ouvertes, les phrases sujet-verbe-complément dont on discutera à la fin. En cas de vote, j’ai préparé des fiches. » L’analyse en faveur d’ « une vraie politique d’investissement dans les énergies renouvelables » tombe une heure plus tard. Le formulaire liste aussi les présences, ainsi que la prise de position pour la réduction de la part du nucléaire dans l’électricité. La contribution éclairée des « Quatre chemins des routes » remonte la chaîne de productionMacron. « Le soir, je reçois un e-mail en retour, que je redéploie aux participants et aux autres comités. Naturellement, il peut y avoir des synthèses contradictoires. Il y a synthèse et synthèse… » Loin des projecteurs du Zénith, Gillesadéjà rangé lemobilier. Sa prochaine réunion, ce jeudi, est déjà en marche. d’unpayslibre, égalitaireet fraternel. Macron lui en donne l’occasion. «J’aime le personnage, c’est quelqu’un qui ravive l’espérance et porte un renouveau de la classe politique. Et puis ilaunvrai projet de sociétépour relancernotrepays, sur labase de ses grands principes fondamentaux. »
cadre niçoise de 43 ans, appuie enfin son soutien à Emmanuel Macron sur trois arguments: «Lapremière chose quimeséduit, c’est saméthode. Ilcasse les codes habituels de la politique, en faisant participer la société civile à l’élaborationdesonprogrammeàtravers sescomités. La deuxième chose, c’est savolonté deparité. Il veut aider lesfemmes àfaire de la politique plus activement. Et la troisième chose, c’est son souhait d’inscrire laFrance dans l’Europe. Sur la fiscalité ou la sécurité, entreautres, on sait très bien que notre pays ne pourra rien faire seul dans son coin.»