À la découverte des « GéoTrouvetou » de la Côte
La Côte d’Azur est l’une des régions de France qui dépose le plus de brevets. Mais il est souvent difficile de passer d’une idée à sa commercialisation
Quel est le point commun entre une mousse à base d’argent qui pourrait réduire de 5 à 10 % la consommation mondiale d’électricité, des panneaux solaires qui se déploient comme des parapluies, un robot chasseur de plastiques pour nettoyer ports et océans, ou encore un coussin vibrant pour dégager les bronches malades? Toutes ces inventions sont azuréennes et ont participé à la première édition du prix de « l’innovation dans le 06 ». Ce concours, un conseiller départemental niçois, Bernard Asso, en a eu l’idée. « Pour trois raisons, explique l’élu qui est par ailleurs enseignant à la faculté. D’abord parce qu’en tant qu’universitaire je suis par nature curieux. Ensuite, parce que les inventeurs sont généralement des gens intéressants car passionnés. Enfin, plus prosaïquement, reconnaît-il, parce que le monde de demain sera celui de la créativité ou ne sera pas. Car il n’y a pas de progrès et donc de richesse possible sans cette rupture créative que l’on appelle l’innovation. » Or, ce «génie» , estime Bernard Asso, la Méditerranée le porte en elle, du fait de son Histoire.
Le « génie méditerranéen »
Le fait est, qu’au fil des siècles de nombreux azuréens furent à l’origine de ces petits et grands progrès qui ont contribué à changer nos vies. La margarine et le béton armé sont varois. Un Niçois pourrait même avoir inventé la photographie trois ans avant Nicéphore Niépce. Même si l’Histoire n’a pas retenu son nom. Car il ne suffit pas d’avoir des idées pour enrichir le futur et l’économie nationale. Raoul Parienti, ce Niçois qui a déposé plus de 150 brevets au cours de sa longue carrière d’inventeur, le sait bien : «le plus dur est de transformer une idée en concept ». Sans cela, pas de commercialisation possible et donc pas de création de richesse. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un oeil aux statistiques du bureau mondial de la propriété intellectuelle qui recense les dépôts de brevets à travers le globe. Avec environ 15000 demandes de dépôts de brevets par an, la France représente à elle seule près de 10 % de la propriété intellectuelle en Europe (160000) même si elle est loin d’égaler la Chine (plus d’un million) ou les États-Unis (550000).
Troisième région de France
À l’échelle nationale, le Sud-E st ne manque pas d’inventivité. « La région Paca est l’une des trois premières de France en nombre de demandes de brevets publiées, constate Eric Catapano, délégué territorial de l’Institut national de la propriété intellectuelle à Sophia Antipolis. En 2015, 182 inventeurs originaires des Alpes-Maritimes et 113 Varois ont publié des demandes de brevets. » L’ingéniosité azuréenne est d’ailleurs régulièrement mise à l’honneur lors du célèbre concours Lépine, cette institution, créée en 1901, par le préfet de police Louis Lépine, pour contrecarrer, à l’époque déjà, la concurrence étrangère qui mettait à mal les affaires des fabricants de jouets parisiens. L’innovation est souvent présentée comme le remède à tous nos maux économiques. Pourtant, si l’on en croit les comptes de l’INPI, le PIB n’a progressé que de 9 % au cours de la décennie écoulée quand bien même les titres de propriété intellectuelle augmentaient de 32 % dans le même temps. Mais, pour Bernard Asso, il ne faudrait pas pour autant se tromper d’analyse. L’élu azuréen se félicite « que la France dépose autant de brevets » car, rappelle-t-il, « le XXe siècle tout entier a vécu sur les inventions françaises. De l’uranium par les époux Curie au cinéma des frères Lumière, jusqu’à la télévision... On a tout inventé ou presque. Le problème c’est qu’on ne les a pas exploitées nous-mêmes. La France est un peuple d’ingénieurs et on ne peut pas le déplorer. En revanche, on n’est pas bons sur la commercialisation. »