Bafouillages et à peu-près
La volonté obstinée de récompenser chaque année des interprètes incapables, en l’absence de leurs auteurs habituels, d’articuler un remerciement spirituel, aboutit le soir des Césars, à un festival de bafouillages et d’à-peu-près. Les vedettes qui, quelques instants plus tôt, s’exprimaient si élégamment sur le grand écran, s’empêtrent dans la gratitude qu’ils doivent au réalisateur, à l’équipe technique, au producteur et même à l’avance sur recettes. À croire que les dialoguistes ne travaillent plus, en dehors des films, que pour les politiciens quand ils font leur cinéma électoral. Ainsi, alors que les images n’ont jamais eu autant de relief, les propos qui les suivent ont rarement été aussi plats. Quand on compare la peine que se donne Mélenchon pour ciseler des formules ou l’imagination dont fait preuve Bayrou pour occuper encore la scène, on ne peut que saluer le professionnalisme des candidats à l’Élysée. Certes, vendredi soir, Isabelle Huppert et Valérie Lemercier ont sauvé en quelques phrases émues ou amusantes l’honneur des artistes mais on regrette que ces derniers ne prennent pas la précaution, comme leurs homologues américains, de se faire écrire le texte de leurs interventions. Cela éviterait, lorsqu’ils lisent quelques lignes de leur façon, d’avouer implicitement qu’ils les ont écrites, dès le matin, bien que le palmarès soit censé conserver son
mystère jusqu’à la proclamation.