Monaco-Matin

« Nous aussi, on a besoin de reconnaiss­ance »

- D.E

Elle n’est pas là pour tirer la couverture à elle, pour obtenir son moment de gloire ou pour demander des remercieme­nts, précise-t-elle tout de suite. Simplement, elle aimerait qu’on lui demande, à elle et à tous ceux qui ont aidé les centaines d’élèves à s’enfuir jeudi, comment ils vont eux aussi, quatre jours après le drame. « C’est ce qui me fait mal au coeur.»

« Qui a sauvé les élèves? Qui les a sortis ? »

Hier matin, voix chevrotant­e et traits tirés, Carine Gallet, assistante d’éducation de l’établissem­ent, vient spontanéme­nt à la rencontre des médias sur place. «Les élèves, qui les a sauvés ? Qui les a sortis ? On était là. Le gardien était là, le simple agent était là. J’étais à la cantine. Il y avait plus de 200 élèves dedans, elle était blindée. C’est nous qui avons dit à la police municipale que le tireur était parti dans le bâtiment B. » La jeune femme continue, n’arrive plus à s’arrêter de raconter ce qui s’est passé ce jour-là. Ce qu’elle a vécu, ce qu’ils ont vécu et ce dont personne ne parle. « Ilyaeuunmo­ment de panique quand le premier blessé est entré dans la cantine avec la tête en sang. Ça hurlait, ça criait. Les élèves sautaient par-dessus les chaises, c’était un moment inimaginab­le. » Elle décrit la peur innommable, la course folle pour s’enfuir une première fois. L’évacuation des lycéens avec le chef de la cantine et le proviseur adjoint, M. Polpo.

« Il nous disait qu’il allait les tuer »

Elle raconte également l’appel passé au 17. La réponse qui ne vient jamais. « Heureuseme­nt qu’on entendait les sirènes à l’extérieur.» Puis vient le moment du face à face avec le tireur. M. Polpo qui lui crie de baisser son arme sinon il mourra. Le gardien du gymnase qui essaie à son tour de convaincre Killian de baisser les armes. « Ils vont te tirer dessus sans sommation si tu gardes tout en main ». Des tentatives de persuasion qui restent vaines vu l’état «indescript­ible du gamin. Il hurlait qu’il en avait marre. Il nous disait qu’il allait les tuer, que c’était eux et pas nous. Qu’il ne voulait pas nous faire de mal parce qu’on n’avait rien fait mais que c’était eux le problème et qu’il n’en pouvait plus. » Elle dépeint ce moment où elle a cru que tout allait basculer. « Il avait son pistolet à la main et il a tout déchargé. Pan pan pan. Il a vidé son arme, il a voulu recharger. J’ai flippé comme une malade. » Carine Gallet continue, parle des élèves qui soutiennen­t les professeur­s tellement ils sont paniqués. Et cette impression d’être abandonnée de tous. «Depuis jeudi, quelqu’un nous a appelés pour savoir comment on allait? Savoir comment ça s’est passé réellement ? » Elle conclut. N’est pas en colère. « Mais nous aussi, on a besoin d’attention et de reconnaiss­ance. »

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(Photo Jean-François Ottonello) Carine Gallet a aidé des centaines d’élèves, comme le gardien du gymnase, le chef de cantine et le proviseur adjoint.

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