Scandale Aristophil: un notaire niçois dans la tourmente
Parmi les milliers de victimes de la société azuréenne Aristophil, spécialisée dans l’achat de manuscrits, certaines demandent des comptes à un notaire niçois mis en examen
La société azuréenne Aristophil, spécialisée dans les lettres et manuscrits historiques, pourrait entraîner dans sa chute des experts mais aussi un officier ministériel, en l’occurrence un notaire de Nice. Depuis 2003, Aristophil (fondée à Nice en 1990, transférée ensuite à Villeneuve-Loubet puis Paris) proposait à des épargnants de devenir propriétaires, la plupart du temps en indivision, de manuscrits, lettres autographes et livres anciens. Un placement à 8,5 % au bout de cinq ans leur était promis. Ce taux d’intérêt attractif était assuré à la fois par la location par les musées de ces documents précieux et par les perspectives de plus-value. Il y a deux ans, un juge d’instruction parisien a mis examen pour escroquerie en bande organisée Gérard Lhéritier, le fondateur d’Aristophil, le soupçonnant d’avoir mis en place une pyramide. Autrement dit un système artificiel où l’apport des nouveaux investisseurs servait en fait à payer ceux qui souhaitaient récupérer leur mise en empochant les intérêts. La pyramide s’est effondrée et le gain mirifique de 177 millions d’euros gagnés à l’Euro Millions par le chanceux Gérard Lhéritier n’y a rien changé. Sa société a été liquidée en 2015 et 18 000 investisseurs s’estiment à ce jour floués. « Le montant du préjudice dépasse le milliard d’euros », précise Me Christian Di Pinto, avocat niçois de trois victimes qui, à elles seules, disent avoir perdu 800 000 euros.
Des victimes demandent des comptes
Un notaire niçois, Me Jérôme Gautry, se retrouve dans la tourmente. À l’instar d’un expertcomptable, de marchands d’art et d’experts en manuscrits, le notaire a été à mis en examen pour «c omplicité de pratiques commerciales douteuses ». Selon l’Est Républicain, Guy Grandgirard, président de l’Association de défense des consommateurs de Lorraine (ADC 54), demande des comptes à Me Gautry devant la juridiction civile au nom de 500 investisseurs lésés. L’association estime que le notaire a crédibilisé l’offre d’investissement en rédigeant des conventions d’indivision, c’està-dire un acte authentique, clé du système Aristophil. Me Gautry, lui, se défend de toute faute professionnelle. Alors que l’enquête tentaculaire se poursuit, le tribunal de Paris a fait sauter le verrou des indivisions et autorisé la semaine dernière la mise en vente de 180 000 manuscrits signés Napoléon, Mozart, Sade, Marie-Antoinette, Einstein… Une tâche titanesque qui pourrait, selon les spécialistes, prendre des années.