Monaco-Matin

Crash de la Germanwing­s : il y a deux ans déjà

Une cérémonie a eu lieu hier pour les proches des victimes au Vernet, où une sculpture sera installée. Un pèlerinage sur les lieux de la catastroph­e nécessaire, mais toujours aussi douloureux

- AU VERNET PIERRE-LOUIS PAGÈS plpages@varmatin.com

Un « 149 » géant, composé d’autant de bougies, prend forme dans un champ de la commune du Vernet. Tout un symbole. 149, c’est en effet le nombre de victimes d’Andreas Lubitz, ce pilote allemand de la compagnie d’aviation Germanwing­s qui, le 24 mars 2015 à 9 h 41 très précise, a précipité son Airbus A320 sur la montagne toute proche. Et qu’on ne vienne surtout pas parler d’accident à la douzaine de proches de victimes à l’origine de ce«happening » hier : « On est là pour montrer au monde entier que 149 innocents sont morts ce jour-là par la seule folie d’un homme. En aucun cas, il ne s’agit d’un accident», lâche Mme Maue. A proximité de la scène, un coeur en bois est gravé de trois prénoms : Sasha, Félix et Maria. Deux ans jour pour jour après le crash du vol 4U 9525, l’émotion est encore très forte au Vernet, petite commune des Alpes-de-Haute-Provence où se tenait hier les cérémonies du 2e anniversai­re du drame aérien. Pour Bernard Bartolini, le maire de Prads, la commune voisine où s’est réellement écrasé l’appareil de la Germanwing­s, « l’ambiance est quand même plus apaisée qu’il y a un an. Le deuil est désormais derrière nous. Place maintenant à la mémoire.»

Une sculpture en hommage

C’est aussi le discours de Carsten Spohr, le p.-d.g. de la Lufthansa. La compagnie d’aviation allemande, maison mère de la Germanwing­s, a une nouvelle fois tout organisé pour que les proches des victimes, parents et amis – quelque 500 personnes au total cette année – puissent venir communier avec les êtres chers disparus tragiqueme­nt. «Nous sommes là pour qu’on n’oublie jamais les victimes et leurs familles.» Pour ne pas oublier l’une des plus grandes catastroph­es qu’elle ait sans doute connue, la Lufthansa a commandé à un artiste allemand une gigantesqu­e sculpture. «Une sphère solaire de 5 mètres de diamètre, en métal doré, qui sera installée sur les lieux mêmes du crash en juin ou juillet prochain», explique à la presse Boris Ogursky, responsabl­e de la communicat­ion de la Lufthansa. Les journalist­es ne la verront pas. Tout est fait en effet pour les tenir le plus longtemps possible à l’écart des familles. Une communicat­ion verrouillé­e à l’excès. Carsten Spohr refusera ainsi de réagir aux déclaratio­ns du père d’Andreas Lubitz qui, le jour même, depuis Berlin, a remis en cause la thèse du suicide (lire ci-dessous). «Aujourd’hui est un jour de mémoire, pas de spéculatio­n ». D’autres aménagemen­ts ont également été réalisés depuis un an. Sur l’autre versant du col de Mariaud, juste en face du vallon du Rosé où le pilote fou a précipité son avion, une plateforme en bois a ainsi été construite à l’automne dernier. Mais pour y accéder, il faut marcher sur plus de deux kilomètres sur une piste assez raide. En d’autres circonstan­ces, la balade serait agréable. Mais pas hier. Il fait froid. Il pleut comme le jour du drame. Et les épaules sont encore trop lourdes de chagrin.

Les habitants solidaires

Malgré les conditions, 150 personnes ont quand même décidé d’emprunter ce « chemin de croix » hier après-midi. Par petits groupes. Le plus souvent en silence. La plupart sont Allemands ou Espagnols, les deux nationalit­és les plus représenté­es parmi les victimes. Tout au long de la montée, des pompiers, des bénévoles de la Croix-Rouge assurent la sécurité, prononcent quelques mots de réconfort. Les habitants du Vernet sont présents aussi. «On est là pour leur montrer qu’on est toujours concernés par le drame qu’ils ont vécu», confie Solange. Sitôt face au lieu du crash, tous s’arrêtent. Ceux qui avaient des roses blanches à la main les déposent sur le bord du chemin, devant une petite croix de bois. Certains s’accroupiss­ent pour mieux se recueillir. Sur la plateforme quelques mètres plus bas, des jumelles ont été mises à dispositio­n comme pour mieux s’approcher encore. Les visages se ferment. Aucun ne veut témoigner devant la poignée de journalist­es encore présents. Comme si les plaies s’étaient rouvertes avec la proximité du lieu du drame. De retour au Vernet, à la sortie du petit cimetière de la commune, l’Espagnol Sylvestre Ramon, accompagné de ses enfants, est inconsolab­le. Il a perdu sa femme dans la catastroph­e. D’une voix à peine audible, il témoigne : « Ça fait 3 ou 4 fois que je viens ici au Vernet. Et je ressens le même désespoir qu’il y a deux ans. » Les yeux rougis, sa fille ajoute : «A chaque fois, on se rend un peu plus compte qu’on ne reverra plus jamais l’être aimé.»

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(Photo Franz Chavaroche) Une douzaine de proches de victimes ont composé un «  » géant à l’aide de bougies, en souvenir des  victimes d’Andreas Lubitz.
 ?? (Photos Franz Chavaroche et DR) ?? De gauche à droite: haute de  mètres, cette sphère, qui contiendra des objets personnels confiés par les proches des victimes, sera installée au Vernet cet été; quelque  personnes sont allées se recueillir et déposer des fleurs en face du vallon où...
(Photos Franz Chavaroche et DR) De gauche à droite: haute de  mètres, cette sphère, qui contiendra des objets personnels confiés par les proches des victimes, sera installée au Vernet cet été; quelque  personnes sont allées se recueillir et déposer des fleurs en face du vallon où...

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