L’arrêt de mort du PS
« Si Macron gagne, pas question que Valls retrouve un poste ministériel. »
En annonçant simplement, hier matin, qu’il voterait dès le premier tour de l’élection présidentielle pour Emmanuel Macron, Manuel Valls a précipité l’explosion ou l‘implosion , comme on voudra, du Parti socialiste. Et il a pris de sérieux risques. Le premier a été, comme attendu, la réaction du camp de Benoît Hamon. Une série de noms d’oiseaux ont fusé dans les rangs socialistes pour qualifier son geste. « Homme sans honneur » a twitté Arnaud Montebourg, tandis que Martine Aubry, dont on sait qu’elle ne porte ni l’ancien Premier ministre ni l’actuel candidat d’En marche dans son coeur, tranchait : « C’est écoeurant. » Il est vrai qu’en annonçant son vote, même si, at-il précisé, il ne s’agit pas d’un ralliement, Manuel Valls a, en effet, largué ses amarres et signé l’arrêt de mort du PS. Un parti dont il a toujours dit qu’il contenait en son sein deux gauches irréconciliables, un parti qui lui a préféré Benoît Hamon lors de sa primaire de janvier dernier, un parti qui n’a pas été capable de lui donner une majorité sûre pendant tout le temps qu’il était à Matignon. En refusant de respecter la discipline du parti, Manuel Valls, en effet, renie l’engagement pris, lorsqu’il pensait pouvoir gagner la primaire, de soutenir le vainqueur. Mais la discipline peut-elle vraiment dicter une conduite politique ? Manuel Valls est homme de convictions, dont il n’a jamais fait mystère, incompatibles avec celles de l’actuel candidat socialiste. Entre le respect de la discipline, et celui de ses idées, l’ancien Premier ministre a choisi les idées. Il en paiera certainement le prix. Son parti aussi. Le deuxième risque pris par Manuel Valls est plus grand encore : il se savait non désiré par Emmanuel Macron. C’est peu de dire que ces deux-là ne se sont jamais aimés. La rivalité entre les deux hommes a, en effet, empoisonné la vie gouvernementale jusqu’à ce que Macron choisisse de prendre le large. Comme attendu, à peine Manuel Valls avait-il annoncé sa décision, qu’Emmanuel Macron, qui l’a remercié du bout des lèvres, a prévenu : le patron d’En marche ! se veut le « garant du renouvellement des visages, du renouvellement des pratiques ». Autrement dit, si Macron gagne, pas question que Valls retrouve un poste ministériel. Tout juste s’il ne complique pas en réalité la tâche de celui que sa position centrale oblige à respecter un équilibre fragile entre la gauche et à droite. Pour éviter, ce qu’il redoute au plus haut point, d’apparaître comme l’héritier de François Hollande, Macron se serait bien passé, dit-on, de l’ancien Premier ministre. Chacun sa voie. Manuel Valls veut, par son choix, prendre le meilleur chemin pour barrer la route à Marine Le Pen. Pas seulement : il faudra bien – à condition, bien sûr, que Macron soit élu, ce qui n’est pas fait – qu’il dispose d’une majorité à l’Assemblée nationale. Un petit groupe de députés « progressistes » autour de Manuel Valls peut toujours être utile.