Sexualité épanouie : pas si simple! Sexo
Être sexuellement épanouie : presque une injonction aujourd’hui, qui produit bien des frustrations. Car la définition même de cet état bute sur des réalités très contrastées
Àpeine une Française sur dix s’estime sexuellement satisfaite Si certaines femmes s’en accommodent, près de la moitié de la gente féminine considère qu’avoir une vie sexuelle épanouie est un de ses plus grands défis. «Cela montre une fois de plus l’importance de la sexualité dans notre société », commente Carol Burté, sexologue à Draguignan et Cannes. Reste une question assez fondamentale. Qu’est ce qui définit une sexualité « épanouie » ? Faut-il se référer à la fréquence des rapports ? Au nombre de positions visitées à l’horizontal (ou à la verticale ?) ? À la diversité des pratiques ? Au fait de vivre d’intenses orgasmes vaginaux? Ou encore au nombre de partenaires qui ont partagé l’intimité d’une chambre à coucher? Rien de tout ça. Ce serait trop simple. « Le premier facteur contribuant à une sexualité épanouie, peut être l’absence de dysfonctionnement sexuel, terme sous lequel on regroupe les troubles douloureux, du désir et de l’excitation sexuelle, et enfin de l’orgasme», répond Carol Burté. Mais, prudence, ajoute-t-elle aussitôt : il ne s’agit pas de conclure hâtivement que l’absence de ces troubles est la voie royale vers le septième ciel ! « Beaucoup de femmes chez lesquelles tout “fonctionne” ne sont pas pour autant à l’aise dans leur sexualité. Et à l’opposé, on peut citer l’exemple de femmes qui n’arrivent pas à éprouver d’orgasme, mais qui sont pourtant tout à fait capables de désir et de plaisir intenses. Ces femmes sont pleinement satisfaites de leur vie sexuelle. Autre exemple, certaines femmes souffrant de vaginisme [contraction involontaire empêchant la femme d’avoir des rapports sexuels, ndlr] réussissent à avoir une vie sexuelle très satisfaisante sans pénétration. »
« Le comportement sexuel n’est pas inné »
C’est sans surprise que l’on apprend que l’influence de l’autre – «le sexe continuant de se pratiquer majoritairement en couple ! » – joue un rôle majeur dans cet épanouissement : «Les injonctions de l’autre peuvent être de nature à créer des difficultés sexuelles et un sentiment de frustration, chez les deux partenaires », met en garde la sexologue. Beaucoup d’hommes par exemple, imprégnés de culture pornographique, considéreraient ainsi certaines pratiques comme obligatoires dans leur vie sexuelle. Ou souhaiteraient imposer une certaine fréquence. «La partenaire, ne se sentant pas “capable”, va alors culpabiliser de ne pas donner à l’autre ce qu’il attend. Cela crée de l’insatisfaction chez les deux partenaires. » Dernier facteur prépondérant dans l’épanouissement sexuel, l’expérience (heureuse). «Le comportement sexuel, tel qu’on l’entend dans nos sociétés, n’est pas inné. Il s’apprend et la qualité de la sexualité se renforce au fur et à mesure des expériences sexuelles, pourvu qu’elles soient positives. Il est donc rare, pour une femme jeune, d’être parfaitement à l’aise sexuellement. » Si l’on tient compte de tout ce qui peut contribuer à l’insatisfaction, il n’est donc pas si facile d’atteindre le bien-être sexuel, ce qui explique cette statistique. « On est passé en peu de temps d’une sexualité taboue à une sexualité affichée, devenue obligatoire à l’épanouissement personnel d’une femme. Certes, la qualité de vie sexuelle contribue effectivement à la bonne santé physique et psychique, mais c’est une évolution trop rapide. Il est normal que beaucoup de femmes ne soient pas satisfaites et tendent à l’être. Il ne faut pas pour autant se mettre de pression, il faut savoir se donner le temps d’y réfléchir, se donner le temps de vivre sa sexualité, de s’exprimer et oser parler à l’autre », tempère la spécialiste. Avant de conclure sur une note optimiste. « Nous évoluons en permanence tout au long de notre vie. Atteindre le bienêtre sexuel – que chacun définira lui-même, n’est jamais impossible. Mais, lorsque cette question devient un problème personnel ou dans le couple, il faut aussi parfois se faire aider. »
«Ilnefaut pas se mettre de pression »
1. Selon un sondage IFOP pour ELLE magazine.