La totale
Longtemps, les campagnes d’avantscrutin se sont bornées chez nous à des réunions de citoyens sous des préaux d’école. Aujourd’hui, on ne peut prétendre dénicher un président sans sacrifier à ce qu’il faut bien appeler « la totale ». À savoir : les tours de piste des fantaisistes et des rigolos ; la valse des recalés pour manque de parrainages ; le ballet des candidats individuels, des leaders de groupuscules et des sélectionnés puis des vainqueurs des primaires. Dans la foulée, nous avons eu droit aux innombrables interviews et débats montés par les médias et aux confrontations sur le petit écran qui tentent à chaque fois de rebattre les cartes électorales. À quoi se sont ajoutés la mise en examen d’une épouse et l’interrogatoire des enfants d’un candidat coupable d’opposition au régime actuel. Sans oublier la vente des livres qui a remplacé la distribution gratuite des prospectus, l’annonce solennelle des programmes et, sur les places publiques, les manifestations d’enthousiasme commandées. Ce qui serait beau mais qui, hélas ! n’a que très peu de chance de se produire, ce serait que, sans militants faute de déclinaison prononçable (il n’y a pas plus de poutouiens que de lassallistes), le plus humble des petits candidats se montre à la télé si inventif, si généreux, si honnête qu’il rafle finalement la mise en envoyant tous les grands au tapis.