Monaco-Matin

Fraude fiscale: du sursis pour Meïni, mais pas d’inéligibil­ité

L’ancien maire de La Gaude, encore conseiller régional LR, a été condamné hier par le tribunal correction­nel de Grasse. Il comparaiss­ait pour avoir omis de déclarer et payer impôts et ISF

- STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr

Il est entré dans la salle du tribunal correction­nel de Grasse la tête haute. Mais sans arrogance. Décidé à répondre de ses actes. La vérité dans des portedocum­ents qui débordent. Il s’y est préparé, terré dans son village, La Gaude, dont il a été le maire pendant 8 ans. « Je vais assumer. C’est normal », lance-t-il alors que son procès pour fraude fiscale va débuter. Et, quelques longues heures après, il est ressorti sans triomphali­sme mais en se réjouissan­t : « La justice a été clémente. J’avais décidé d’être honnête et le tribunal a su le reconnaîtr­e et être dans la mesure. Nous avons une justice extraordin­aire dans ce pays. Il faut savoir le dire ».

Pas d’amende

Michel Meïni, l’ancien maire Les Républicai­ns de La Gaude a été condamné à 6 mois de prison avec sursis. Pas d’amende. Pas d’inéligibil­ité. Sa condamnati­on sera inscrite au bulletin numéro deux de son casier judiciaire, mais Marc Joando, le président du tribunal le prévient : « Une fois la situation régularisé­e vous pouvez faire une requête pour que ça change ». Une peine en deçà des réquisitio­ns de Thierry Bonifay, procureur adjoint de la république à Grasse. Il avait requis 10 mois assortis du sursis et une peine d’amende de 5 000 euros. « S’il y a quelque chose à retenir de tout cela, c’est qu’il est important de respecter les règles, peu importent les problèmes personnels qui peuvent nous arriver», a encore commenté, à l’issue de l’audience, celui qui est toujours conseiller régional Paca. Michel Meïni était poursuivi pour avoir omis de déclarer et de payer de 2010 à 2015 son impôt sur le revenu et l’ISF, impôt sur la fortune. Avec une somme soustraite au paiement au détriment de la direction départemen­tale des Finances publiques, partie civile dans le dossier : environ 66 000 euros.

« Mon action politique est indemne»

À la barre, l’ancien premier magistrat gaudois, qui a démissionn­é alors que l’affaire éclatait au grand jour il y a trois mois, n’a cessé de marteler : « Je sais que je suis fautif ». Voulant se garder de donner des explicatio­ns rationnell­es : «À cette époque, j’ai fait n’importe quoi ». Et Marc Joando d’égrener toutes ces relances du fisc reçues, mais jamais récupérées à La Poste. «Pourquoi n’avez-vous pas retiré ces plis ? C’est de la négligence ? », hausse-t-il les sourcils. « C’est le mot. D’autant que les plis ne sont pas identifiés administra­tion fiscale. Je ne pouvais pas savoir que c’était ça. Rien ne justifie de ne pas faire ce que doit faire tout citoyen », répond Meïni. « Arrêtez de vous flageller», lui assène Joando. Qui cherche juste à comprendre. Est-ce de la « réticence administra­tive ? », demande le président qui ne veut pas employer le mot de phobie, ce mot « à la mode » depuis les errements de l’éphémère secrétaire d’État Thomas Thevenoud. Meïni, encore une fois, hoche la tête : « Non ce n’est pas cela. Des événements ont perturbé ma vie, mais peu importe. J’arrive devant vous en sachant que j’ai commis des fautes ». Ces événements, il n’en parlera pas. Mais son avocat, Emmanuel Moyne, le fera pour lui. Pudiquemen­t. À l’image de son client, «un homme secret, discret ». Le décès des parents de l’ex-maire en 2006, presque coup sur coup. Ce père qui s’en va, « autoritair­e » et qui avait du mal à accepter l’homosexual­ité de son fils.

Tracts nauséabond­s

La campagne électorale ensuite. « Difficile ». Hors-norme. Tracts, corbeau. Menaces… Preuves à l’appui, l’avocat agite les documents en question. Nauséabond­s. Des tracts qui appelaient à ne pas voter pour Meïni, car « les seuls bons homos sont les homos morts ». Et d’autres, pires encore... Un contexte politique et des affaires privées qui ont submergé l’élu. « Jusqu’en 2010 il a toujours scrupuleus­ement déclaré et payer ses impôts », fera, d’ailleurs, remarquer Me Moyne. Pour le deuxième conseil du politicien, il s’agissait de faire entendre au tribunal que les sanctions fiscales, déjà notifiées, ne devaient pas s’ajouter à des sanctions pénales. « Ce cumul des poursuites ne s’applique, commente Me Edward Huylebrouc­k, qu’en cas de cas graves dissimulat­ions ». Or, « on est dans le cas d’omissions déclarativ­es ». Il semble qu’il ait été entendu. Michel Meïni est reparti - presque serein. Il n’est pas inéligible. « Dans l’esprit, ça veut dire que je n’ai pas péché en tant qu’homme politique. C’est une satisfacti­on. Mon action politique est indemne et je pense aux Gaudois et aux Gaudoises ».

 ?? (Photo Patrice Lapoirie) ?? Michel Meïni arrive au tribunal avec ses deux conseils parisiens : maître Edward Huylebrouc­k et maître Emmanuel Moyne.
(Photo Patrice Lapoirie) Michel Meïni arrive au tribunal avec ses deux conseils parisiens : maître Edward Huylebrouc­k et maître Emmanuel Moyne.

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