RSA: fraudeurs sur suspensions en
Lors de la dernière séance plénière du conseil départemental des Alpes-Maritimes, la lutte contre la fraude sociale a été évoquée. Et certains chiffres ont fait bondir l’opposition
La lutte contre la fraude au RSA : l’un des piliers du plan de relance économique d’Eric Ciotti au conseil départemental des Alpes-Maritimes. Pas le seul, bien sûr. Pas le plus important non plus en terme de marges de manoeuvre dégagées (lire notre édition du vendredi 7 avril). Mais, lorsqu’il aborde le sujet en séance plénière, le président met sur la table 5 000 suspensions d’allocataires dans le département l’an dernier. Et ça a fait bondir les élus d’opposition. MarieLouise Gourdon en tête. Certes, elle évoque la politique d’insertion de la collectivité départementale. La loue, même : «La baisse du nombre de bénéficiaires Francis Tujague et Marie-Louise Gourdon sont montés au créneau du compte administratif... en particulier sur le RSA.
est due selon vous à la politique d’insertion. Elle est réelle et efficace. Vos services remettent le pied à l’étrier dans le monde du travail à un certain nombre de personnes ».
« Vous coupez des vivres à des familles »
En revanche, l’autre volet interroge l’élue du groupe PS et écologie : « Mais surtout, vous attribuez cette baisse à la lutte contre la fraude, c’est votre cheval de bataille. Vous faites état de plus de 5 000 suspensions de RSA sur 30 000 bénéficiaires en 2016, soit 15 % en un an. C’est énorme ». Pour elle, « ily a sûrement de véritables fraudeurs dans ces 5 000 personnes, mais pas 5 000 ! Vous coupez les vivres à des familles qui se retrouvent démunies, sans emploi et peut-être à la rue ». Francis Tujague, pour le Front de gauche, s’interroge également. « Pour ce qui est du RSA, après avoir noté que la politique d’insertion a perdu 1,6 million d’euros entre 2015 et 2016, nous ne pouvons accepter de voir attribuer une part importante de la diminution d’allocataires à la lutte contre la fraude ». Car pour lui, le but évident est « de désigner à la vindicte publique les plus faibles,
les plus défavorisés présentés comme des fraudeurs en puissance alors que les puissants, auteurs de fraudes fiscales et sociales autrement plus graves sont, eux, épargnés ».
« Délibérément surévalués »
D’autant que les chiffres sont, selon Tujague, faussés. « Vous vous appuyez sur des résultats de lutte contre la fraude délibérément surévalués par l’addition de dossiers non éligibles qui ne donnent lieu à aucun remboursement de sommes indûment perçues avec les recouvrements correspondants à des fraudes réelles que nous condamnons aussi clairement que vous. Ce qui vous conduit à multiplier par 7 les résultats réels de cette lutte contre la fraude : 37,5 millions annoncés à grand renfort de publicité, alors que les comptes administratifs des trois derniers exercices font apparaître une somme de 5,7 millions d’euros ». Alors, 5 000 fraudeurs ontils été débusqués l’an dernier ? Lors de la séance plénière du conseil départemental, Eric Ciotti a ré pondu de manière très vague : « Moi ça me choque que cela vous choque. Les prestations sociales ce sont des droits et des devoirs. C’est de l’argent public qui doit revenir à ceux qui y ont droit et qui en ont vraiment besoin ».
plaintes au pénal
Malgré l’opacité de cette réponse, la réponse est clairement : non. Sur les 5 000 suspensions de RSA en 2016, « seulement » 318 d’entre elles l’ont été pour fraude. 294 fraudeurs ont écopé de sanctions administratives. Ils devront rembourser les sommes indûment perçues. En général, ceux sont des bénéficiaires qui ont effectué de fausses déclarations, comme déclarer être mère célibataire par exemple, alors que le concubinage est avéré. Pour le reste, soit 24 personnes, des plaintes au pénal ont été déposées. Dans ce cas, les fausses déclarations ont été faites grâce à de faux documents. Faux et usages de faux : cela tombe sous le coup de la loi. Pour les 4 494 personnes suspendues restantes, il s’agit du « non-respect des engagements d’insertion ».
Politique d’insertion efficace
A la deuxième convocation non honorée, et après un examen par une commission, le bénéficiaire reçoit un courrier l’informant que ses droits sont « suspendus ». 20 % d’entre eux se manifestent immédiatement et sont réintégrés dans leur droit. 20 % se manifestent au 2e, 3e ou 4e mois. Ils retrouvent alors leur droit, mais le paiement du RSA n’est pas rétroactif. Les services de la collectivité départementale insistent sur leur politique de retour à l’emploi. 57 % des nouveaux entrants au dernier trimestre 2015 ne sont déjà plus au RSA aujourd’hui. Ce qui fait des Alpes-Maritimes l’un des départements les plus efficaces en matière d’insertion sociale en France.