Monaco-Matin

RSA:  fraudeurs sur  suspension­s en 

Lors de la dernière séance plénière du conseil départemen­tal des Alpes-Maritimes, la lutte contre la fraude sociale a été évoquée. Et certains chiffres ont fait bondir l’opposition

- STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr

La lutte contre la fraude au RSA : l’un des piliers du plan de relance économique d’Eric Ciotti au conseil départemen­tal des Alpes-Maritimes. Pas le seul, bien sûr. Pas le plus important non plus en terme de marges de manoeuvre dégagées (lire notre édition du vendredi 7 avril). Mais, lorsqu’il aborde le sujet en séance plénière, le président met sur la table 5 000 suspension­s d’allocatair­es dans le départemen­t l’an dernier. Et ça a fait bondir les élus d’opposition. MarieLouis­e Gourdon en tête. Certes, elle évoque la politique d’insertion de la collectivi­té départemen­tale. La loue, même : «La baisse du nombre de bénéficiai­res Francis Tujague et Marie-Louise Gourdon sont montés au créneau du compte administra­tif... en particulie­r sur le RSA.

est due selon vous à la politique d’insertion. Elle est réelle et efficace. Vos services remettent le pied à l’étrier dans le monde du travail à un certain nombre de personnes ».

« Vous coupez des vivres à des familles »

En revanche, l’autre volet interroge l’élue du groupe PS et écologie : « Mais surtout, vous attribuez cette baisse à la lutte contre la fraude, c’est votre cheval de bataille. Vous faites état de plus de 5 000 suspension­s de RSA sur 30 000 bénéficiai­res en 2016, soit 15 % en un an. C’est énorme ». Pour elle, « ily a sûrement de véritables fraudeurs dans ces 5 000 personnes, mais pas 5 000 ! Vous coupez les vivres à des familles qui se retrouvent démunies, sans emploi et peut-être à la rue ». Francis Tujague, pour le Front de gauche, s’interroge également. « Pour ce qui est du RSA, après avoir noté que la politique d’insertion a perdu 1,6 million d’euros entre 2015 et 2016, nous ne pouvons accepter de voir attribuer une part importante de la diminution d’allocatair­es à la lutte contre la fraude ». Car pour lui, le but évident est « de désigner à la vindicte publique les plus faibles,

les plus défavorisé­s présentés comme des fraudeurs en puissance alors que les puissants, auteurs de fraudes fiscales et sociales autrement plus graves sont, eux, épargnés ».

« Délibéréme­nt surévalués »

D’autant que les chiffres sont, selon Tujague, faussés. « Vous vous appuyez sur des résultats de lutte contre la fraude délibéréme­nt surévalués par l’addition de dossiers non éligibles qui ne donnent lieu à aucun remboursem­ent de sommes indûment perçues avec les recouvreme­nts correspond­ants à des fraudes réelles que nous condamnons aussi clairement que vous. Ce qui vous conduit à multiplier par 7 les résultats réels de cette lutte contre la fraude : 37,5 millions annoncés à grand renfort de publicité, alors que les comptes administra­tifs des trois derniers exercices font apparaître une somme de 5,7 millions d’euros ». Alors, 5 000 fraudeurs ontils été débusqués l’an dernier ? Lors de la séance plénière du conseil départemen­tal, Eric Ciotti a ré pondu de manière très vague : « Moi ça me choque que cela vous choque. Les prestation­s sociales ce sont des droits et des devoirs. C’est de l’argent public qui doit revenir à ceux qui y ont droit et qui en ont vraiment besoin ».

 plaintes au pénal

Malgré l’opacité de cette réponse, la réponse est clairement : non. Sur les 5 000 suspension­s de RSA en 2016, « seulement » 318 d’entre elles l’ont été pour fraude. 294 fraudeurs ont écopé de sanctions administra­tives. Ils devront rembourser les sommes indûment perçues. En général, ceux sont des bénéficiai­res qui ont effectué de fausses déclaratio­ns, comme déclarer être mère célibatair­e par exemple, alors que le concubinag­e est avéré. Pour le reste, soit 24 personnes, des plaintes au pénal ont été déposées. Dans ce cas, les fausses déclaratio­ns ont été faites grâce à de faux documents. Faux et usages de faux : cela tombe sous le coup de la loi. Pour les 4 494 personnes suspendues restantes, il s’agit du « non-respect des engagement­s d’insertion ».

Politique d’insertion efficace

A la deuxième convocatio­n non honorée, et après un examen par une commission, le bénéficiai­re reçoit un courrier l’informant que ses droits sont « suspendus ». 20 % d’entre eux se manifesten­t immédiatem­ent et sont réintégrés dans leur droit. 20 % se manifesten­t au 2e, 3e ou 4e mois. Ils retrouvent alors leur droit, mais le paiement du RSA n’est pas rétroactif. Les services de la collectivi­té départemen­tale insistent sur leur politique de retour à l’emploi. 57 % des nouveaux entrants au dernier trimestre 2015 ne sont déjà plus au RSA aujourd’hui. Ce qui fait des Alpes-Maritimes l’un des départemen­ts les plus efficaces en matière d’insertion sociale en France.

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(Photos François Vignola, Patrice Lapoirie, Eric Vincette)

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