À« Saorge la rouge», tout sauf l’extrême droite

Ce n’est un secret pour personne. A Saorge, on vote bien à gauche, dans une terre réputée de droite. Par tradition autant que par convictions. « Il y a eu le train, le maire communiste, le retour à la terre des soixante-huitards qui ont trouvé ici un idéal de vie. Saorge, c’est une terre de passage», explique le maire, Brigitte Bresc. Dans le village, les habitants ont plébiscité Jean-Luc Mélenchon à 48,04 % au premier tour, contre 20,85 % de suffrages exprimés pour Emmanuel Macron et 11,48 % pour Marine Le Pen. « On connaît les 38 qui ont voté Front national »,

lance un Saorgien, avec un petit sourire. Ici, dire que tout le monde sait qui vote quoi ne serait pas exagéré. Mais dans un second tour où le leader de la France insoumise n’a pas réussi à se faire une place, le dilemme est grand pour les Saorgiens. Faut-il s’abstenir?

Voter blanc ? « Si on s’abstient, c’est comme donner des voix au FN»,

souffle Julienne. D’autant plus que Jean-Luc Mélenchon, critiqué pour son absence de consignes de vote, n’a pas clairement appelé à mettre le bulletin Macron dans les urnes. « En même temps, pendant la campagne, il a pas mal dézingué Macron, Fillon et Le Pen. Il garde une certaine forme d’intégrité », défend Marco.

« Ils sont un peu perdus »

Au Heinz Café, Marc, le gérant, qui a voté Mélenchon au premier tour,

« comprend les gens qui attendent qu’il soit plus clair sur le vote Macron ». « Jusqu’à peu, je voulais m’abstenir ou voter blanc. Mais j’ai changé d’avis. Je veux faire barrage au FN. Je ne veux pas prendre le risque que Marine Le Pen passe. Mais là les gens vont voter contre quelqu’un et pas pour quelqu’un. Alors que les citoyens attendent de vrais projets, pas que l’on masque le manque de propositions. » Un choix par défaut, donc, que beaucoup partagent ici. Cathy et Claude, gérants de l’épicerie Vidal, au contact quotidien des habitants, relaient cette incertitude. «Ils sont un peu perdus. Mais ils seront plus tentés par Macron. Il en veut, c’est un battant, c’est du sang neuf. » Claude embraie : « La majorité des vieux communistes du village a été convaincue par la prestation Macron au débat de mercredi. » « Il peut diriger le pays à condition qu’il s’entoure de personnes de droite et de gauche », renchérit Michel, macroniste dès le premier tour. Si rien n’est jamais joué d’avance, à Saorge la Rouge, on semble déjà avoir fait son choix.