Monaco-Matin

AVEC LE MÉDAILLÉ DE BRONZE A LA CARABINE DES JO DE RIO Raynaud,  mois après

Le tireur antibois, héros azuréen des JO de Rio avec Quiquampoi­x, n’a vraiment rien oublié

- FRANÇOIS PATURLE

Chasse, pêche, nature et tradition, c’est lui. Sans la politique, et le sens de l’amitié en plus. Le médaillé de bronze des JO de Rio, à la carabine  mètres  positions, n’a en rien changé ses habitudes. La semaine passée, Alexis Raynaud a ramassé  morilles en une après-midi. « Je les fais sécher sur la grille ». Avanthier, il est parti chasser du côté des îles de Lérins... Sars, daurades et loups vont encore garnir le frigo. Juste avant le départ pour les Jeux, il avait réussi un gros coup : une nuit passée sur un petit bateau au large de Mandelieu, et une quinzaine de seiches qui avaient mordu à la sardine par  mètres de fond. Aujourd’hui, il concède avoir grossi un petit peu, logique décompress­ion. Les  heures d’entraîneme­nt hebdomadai­res de la prépa olympique ont été un peu allégées. Cela ne l’a pas empêché, en mars, de décrocher une nouvelle médaille de bronze, au championna­t d’Europe, à  mètres. Un gars en or, que l’on a retrouvé avec grand plaisir.

Ton souvenir le plus dingue des JO ? Le moment du retour à l’aéroport, quand les portes se sont ouvertes. Il y avait tout le monde, la famille, la copine, les amis, les grands-parents, les membres du club, le président... Tout le monde réuni : le summum.

Avec un peu de recul, désormais, cette médaille a-t-elle changé ta vie ? Oui et non… Au début, ça a changé un peu. On a quelques interviewe­s, quelques sollicitat­ions. Maintenant, changé ma vie réellement ? Je ne peux pas dire. Dans notre sport, ça Alexis Raynaud : la médaille de Rio obtenue en champion.

retombe vite, on retrouve très vite la réalité des choses. On est repartis pour , Tokyo. Ça me va bien. Je me verrai bien tirer jusqu’à  ans ! Dans le tir, on connaît l’anonymat. Je cherche des sponsors, j’ai créé ma page Facebook... Cela dit, au sein de notre Fédé, on est plus reconnus. Les gamins sont contents de nous rencontrer. Il y a aussi les réunions entre médaillés olympiques. Quelle que soit la discipline, le combat a été le même pour aller chercher ce podium. Il y a un certain respect entre nous. Et puis, au niveau profession­nel, j’ai signé mon contrat avec la gendarmeri­e.

Te voilà donc gendarme ? Oui, depuis le  décembre. Je suis gendarme adjoint volontaire (GAV). Après ma carrière (de sportif de haut niveau), je dois faire une école de sous-officier. Pour l’instant, je ne peux pas

encore travailler dans le corps. Mais j’ai le statut de gendarme et un salaire, ce qui est un bon pas de fait.

Ton projet de devenir armurier ? Je me suis beaucoup renseigné. Je suis allé voir tous les armuriers de la région, pour appréhende­r le métier. Avec les lois françaises, c’est hyper compliqué. Au niveau des charges, des normes, des alarmes, des amendes sur le stock, de la vidéosurve­illance, c’est beaucoup trop cher. C’est un métier qui se meurt, hélas. Et il y a de moins en moins de pièce de rechange pour les armes.

« Ça passe trop vite »

Avant Rio, tu y croyais, à cette médaille ? Oui. Je l’avais même dit au ministre, Thierry Braillard. J’étais un peu jeune, certes, mais y aller pour faire de la

figuration, cela ne m’intéressai­t pas.

Tu avais dit : je me présentera­i comme si c’était une compétitio­n comme les autres. Finalement, ça s’est passé comme ça ? Non, une fois que tu l’as vécu, tu sais. Les Jeux, c’est un truc à part, énorme. J’ai eu cette chance, à ce moment-là, de développer une capacité à gérer le truc. Cette épreuve, je l’ai vécue à fond. J’étais bloqué sur mon tir et je ne voyais rien autour. On m’a dit : la tribune était pleine, les gens vibraient dans les gradins… Je n’ai rien remarqué. Le toit d’à côté aurait pu exploser, je ne l’aurais pas noté. D’habitude, pourtant, je suis du genre à regarder un peu ce qu’il se passe autour. Et normalemen­t, quand tu approches du but, tu trembles un peu. Là, les  derniers coups de la finale, debout, mon corps a décidé que c’était mon jour. Il n’y a plus rien qui bougeait. Parfois, je me dis, c’est le destin qui l’a voulu. J’ai l’impression que tout est allé très vite. Comme si  secondes après, j’étais déjà sur le podium. On savoure, bien sûr, mais ça passe trop vite. On aimerait que ça se fige un peu.

« Comme un enfant »

Tu avais eu des larmes pour la médaille de ton copain Jean Quiquampoi­x, la veille. Et pour toi ? J’aurais pu remplir un seau. Jamais autant pleuré. On aurait dit un enfant... Tout seul, tu as juste le temps de réaliser, mais après j’ai appelé ma copine qui était avec mes parents et toute la famille, et là, ouf… Tu ne retiens plus rien. Plus personne n’arrivait à parler, en fait !

Qu’as-tu fait de la prime d’État de . euros ? Aucune folie. Elle est dans mon coffre. On a pris une petite semaine de vacances avec ma copine, c’est tout. Ça fera un apport un jour pour acheter un appart. Ce n’est pas la prime d’un grand boxeur. . euros, la Fédé qui a doublé la mise plus quelques primes, mais c’est super quand même. On devait bien ça à notre président Berthod, non ? Première médaille de l’histoire du tir français à la vitesse olympique pour Jean, première médaille dans ma discipline depuis  ans... Le club a prouvé quelque chose. Si on était plus sympas, ce serait encore mieux ! (rires) Honnêtemen­t, je ne suis pas trop décoration. En plus, la médaille, là, il faut les payer ! Bon, c’était un honneur, quand même. L’ancien président m’a fait l’accolade. Et puis l’Élysée, c’est prenant, on se croirait au temps de la monarchie. Il y a les dorures, les tapisserie­s, le velours, le marbre, les grands tableaux. Il ne manque que l’apparition de Louis XIV.

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(Photos Régis Berthod) Quand le verdict de la médaille est tombé ? Grâce à Jean Quiquampoi­x et toi, le club d’Antibes est devenu une référence… Devenir Chevalier de l’ordre national du mérite, à  ans, ça fait quoi ?
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Avec Tony Parker lors de la cérémonie d’ouverture.

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