Les anciens et le moderne
Mais que faudrait-il pour qu’Emmanuel Macron cesse de passer pour un béjaune ? Le monde politique qui gravite autour de lui aurait-il déjà oublié qu’il vient de remporter une incroyable victoire présidentielle ! Macron, surgi presque de nulle part, raflant la mise en moins d’un an, au nez et à la barbe de la droite et de la gauche, persuadées de vivre dans un éternel système d’alternance. On peut toujours gloser sur l’enchaînement des événements qui lui ont permis de triompher, encore fallait-il pour en tirer profit avoir une intuition politique exceptionnelle et des nerfs d’acier. Certes, sa victoire ne lui garantit pas un quinquennat triomphant. La confiance ne se gagne plus dans les urnes mais dans l’exercice du pouvoir. Elle ne peut plus naître que de deux valeurs venues en fait de l’entreprise : l’efficacité et la réussite. Emmanuel Macron veut incarner cette nouvelle culture, à tâtons cependant dans sa manière de gérer cette période intermédiaire qui s’achèvera demain avec la passation des pouvoirs. Sans doute assisteronsnous, comme lors des célébrations du mai, à un insupportable numéro de paternalisme de François Hollande, un vaincu-faute-d’avoir-combattu qui veut croire qu’il a encore un rôle à jouer. Nul doute que le président sortant ait tiré quelques ficelles en coulisses ces derniers mois pour faciliter la conquête de son ancien ministre, reste que cette victoire n’est pas la sienne. Emmanuel Macron fera donc en sorte de ne pas se laisser piéger par ce roublard qui rêve déjà de revenir en scène. Le nouveau chef de l’État sait qu’en se laissant coller par Hollande, il irrite ces électeurs de droite qu’il lui faut convaincre pour espérer gagner les législatives. Opération, cependant, délicate comme en témoignent ces passe-droits législatifs qu’il a accordés à ses anciens collègues du gouvernement frappés du sceau hollandais, Marisol Touraine, rejetée par le corps médical, Stéphane Le Foll, critiqué par le monde agricole, pour prendre les plus emblématiques. François Bayrou, qui se croyait faiseur de roi depuis son ralliement macronien, a lui été sèchement remis à sa place. Le leader du Modem hurle à la trahison de la parole donnée mais n’avait-il pas drapé son ralliement de désintéressement en affirmant qu’aucune contrepartie n’était exigée ? Tel est pris qui croyait prendre : le donneur de leçons peut bien tempêter, le camp Macron le renvoie à ses déclarations comme il le fit pour Fillon sur la probité. Ainsi vont les temps nouveaux qui révèlent un nouveau Président à la fois calculateur et autoritaire, bien décidé pour voler le feu de la gauche et de la droite à ne pas s’en laisser conter par des hommes du passé. Il devra encore le démontrer dans le choix rapide de son Premier ministre, une femme ou un homme pour mettre en marche la campagne des législatives qu’il ne doit pas perdre pour ne pas prendre à son tour un sérieux coup de vieux. Faute soudain d’efficacité et de réussite.
« La confiance ne peut plus naître que de deux valeurs venues en fait de l’entreprise : l’efficacité et la réussite. »