Signé Roselyne
Dimanche
Au risque de passer pour une midinette, j’ai trouvé cette traversée de la cour Napoléon par notre nouveau Président empreinte de la solennité simple et digne qui convient à la monarchie élective voulue par les institutions de la Ve République. Les ennuis et les échecs inévitables auront bien le temps d’arriver. Profitons de ce moment et de la belle image envoyée au monde entier de ce jeune homme en communion avec la foule, le baiser retenu posé sur sa main par son épouse, les drapeaux tricolores, le décor magnifique du Louvre et cet Hymne
à la joie qui battait comme un coeur qui ne contient plus son émotion.
Lundi
Après la séquence émotion, ce lundi, fête de la Victoire, a tourné à la franche rigolade. Pourquoi, en observant François Hollande essayant de récupérer la victoire d’Emmanuel Macron par force tripotages affectueux durant la cérémonie de commémoration du mai , ne puis-je m’empêcher de penser au fameux sketch de Guy Bedos et Sophie Daumier,
« La drague » ? Vous vous rappelez ? - Qu’est-ce qu’il est collant ce type ! Je ne dis rien pour ne pas faire de scandale… - Mine de rien, je suis en train d’emballer, moi ! J’emballe. - Mais alors, j’en vois plus le bout… Comme dans un livre ouvert, la mine contrainte de Gueule
d’ange proclamait : « Dire qu’il va falloir que je me coltine ce type durant toute la semaine. Il a terminé avec le goudron et les plumes et il voudrait faire croire qu’il est l’auteur de mon succès ! Vivement dimanche qu’il tourne les talons… » Plus longtemps à attendre, coco !
Mardi
Grande réunion rue de Vaugirard au siège de Les Républicains. François Baroin est désigné pour mener la bataille des législatives. A l’annonce du résultat de dimanche soir, le plus si jeune leader de LR était apparu raide et peu disposé à l’ouverture vis-à-vis d’Emmanuel Macron, ce qui n’est pas dans les habitudes de cet homme de dialogue et de compromis. Mais aujourd’hui, il lui faut fermer les écoutilles car le moindre signe de fléchissement sera le signal de la débandade de ses troupes. Aux législatives de juin, les atouts du parti néogaulliste sont loin d’être négligeables. Le score obtenu par François Fillon dans les circonstances difficiles que l’on connaît montre que le socle électoral est solide, les candidats ont été désignés depuis plusieurs mois et labourent leur circonscription, le réseau d’élus locaux en appui est important après la triple victoire aux municipales, départementales, régionales, et surtout, le risque de fuite de l’électorat vers le Front national a considérablement diminué après la piteuse démonstration de sa présidente lors du débat de second tour. Pour autant, les hiérarques de la droite ne peuvent faire l’économie d’une réflexion en profondeur sur les menaces persistantes qui s’accumulent. A court terme, la tentation de donner une majorité parlementaire au nouveau président de la République sera forte chez un électorat âgé et légitimiste. Certes, les députés sortants sont bien implantés, mais que valent les heures passées en permanences, banquets de pompiers et autres remises de médailles à l’heure du dégagisme triomphant ? A moyen terme, les procédures judiciaires qui menacent François Fillon et, surtout, Nicolas Sarkozy vont remettre en route un feuilleton délétère et la boue jetée dans le ventilateur éclaboussera bien au-delà des mis en cause. Mais surtout, rien n’est réglé, tant sur les querelles de personnes que sur les divisions idéologiques. Aucune des personnalités présentes n’a le charisme pour ramasser la couronne de lauriers que Sarkozy, Juppé et Fillon ont tour à tour laissé choir. Les primaires de la droite ont consacré une ligne résolument conservatrice sur le plan économique et sociétal qui ravit certes le coeur militant mais l’éloigne du centre de gravité de la communauté nationale. De toutes façons, même si Emmanuel Macron ne parvenait pas à débaucher son Premier ministre dans les rangs de la droite, la mèche à combustion lente qu’il a disposée dans le paysage politique français n’a pas fini de faire des ravages. Affaire à suivre.
Jeudi
Ce matin, sur RMC, Florian Philippot est l’invité d’Alain Marschall et Olivier Truchot. La grande gueule du Front national est l’ombre de lui-même : blême, hésitant, défait, il semble parfois au bord des larmes. Depuis la défaite de Marine Le Pen, les frontistes ont trouvé leur bouc émissaire, semblant oublier les foules de militants déchaînés qui applaudissaient au programme de leur candidate, oubliant la déclaration de l’expert économique du FN, Bernard Monot : « Tout a été arbitré par Marine Le Pen », oubliant aussi que c’est elle qui s’est plantée lourdement dans le débat de second tour et personne d’autre. Il n’y a pas d’échappatoire possible à la question posée par les journalistes sur l’abandon du retrait de la monnaie unique, et Florian Philippot murmure : « Si jamais le Front garde l’euro,
je ne reste pas. » On peut faire des reproches au vice-président du Front national, mais certainement pas celui de l’incohérence. La retraite à ans, la revalorisation du minimum vieillesse, l’universalité des allocations familiales, la demi-part des veuves, tout le programme social du FN était financé par un fonctionnement de la planche à billets rendu possible par le retour au franc. Mardi, Marion Maréchal-Le Pen – qui, signe des temps, ne se fait plus appeler que « Maréchal » – avait annoncé qu’elle abandonnait ses mandats pour un retour à sa vie familiale et professionnelle. En fait, madame Maréchal connaît trop le fonctionnement interne du clan, elle sait que les couteaux sont tirés, qu’il y aura du sang sur les murs et s’est donc mise prudemment aux abris en attendant des jours meilleurs. Sa tante a bien fait de danser avec ses militants après sa défaite de dimanche : c’est toujours ça de pris.
Vendredi
A quelqu’un qui lançait «Mort aux
cons », le général de Gaulle aurait répondu : « Vaste programme ! » Vraiment, le spectacle donné par les politiciens français cette semaine était tellement affligeant que l’envie m’a prise non pas de tuer, je suis une pacifique, mais à tout le moins de leur donner un bon coup de pied où je pense. L’inénarrable François Bayrou, autoproclamé monsieur Propre, exige d’Emmanuel Macron des investitures destinées à lui procurer les subsides nécessaires à ses ambitions revigorées, les socialistes Hamon, Hidalgo, Aubry qui doivent craindre la vente du siège de la rue de Solférino ouvrent leur propre échoppe politicienne. Dommage que les cabines téléphoniques aient été supprimées, elles eussent été utiles pour tenir les congrès des mouvements de ces messieursdames. Quant à Jean-Luc Mélenchon après une carrière qui l’a fait se présenter à peu près partout en France, il décide d’installer sa tente Quechua sur le Vieux-Port de Marseille, décision sans doute motivée par l’héliotropisme qui frappe les retraités ou ceux qui devraient l’être. Jean-Paul Delevoye et Richard Ferrand, grands manitous du nouveau parti macronien, eux, font preuve d’un amateurisme rafraîchissant en annonçant des candidatures qui leur pètent dans les doigts, faute d’avoir vérifié l’accord de l’impétrant. Le Parti communiste est mort, le PS est à l’agonie, le Front national est au fond du trou, Les Républicains tout au bord, et moi-même, je ne me sens pas très bien !
«La mèche à combustion lente qu’Emmanuel Macron a disposée dans le paysage politique français n’a pas fini de faire des ravages.»