Monaco-Matin

Jean-Dominique Blanqui, premier député des Alpes-Maritimes en 

- ANDRÉ PEYREGNE

Ily a deux cent vingt-cinq ans, la France élisait les premiers députés de la Première République. C’était en 1792. Cette première Assemblée nationale, qui siégea à partir du 21 septembre, portait le nom de Convention nationale. Elle fut élue au suffrage universel masculin. Les femmes n’avaient pas le droit de vote. À l’époque, les Alpes-Maritimes n’existaient pas, elles ne seront créées qu’en 1793. Toutefois, dès l’annexion de Nice par la France en septembre 1792, une Société populaire fut créée à Nice et envoya deux délégués à la Convention nationale, qui furent ensuite confirmés par un vote populaire le 23 mai 1793. Ces deux délégués, Jean-Dominique Blanqui et Isaac Veillon, sont les premiers députés des Alpes-Maritimes dans l’histoire de la République. Des deux, seul Blanqui était originaire de notre région, Veillon étant, lui, un commerçant suisse installé à Nice. Blanqui est donc le premier authentiqu­e député azuréen des AlpesMarit­imes. Il est né en 1757 à Drap, dans ce village situé sur les bords du Paillon à quelques kilomètres au nord de Nice. Il était tanneur de profession - à moins qu’il ne fût, selon certains, professeur de mathématiq­ues! Peut-être était-il les deux, se distinguan­t à la fois par ses cuirs et son Q.I. ! Toujours est-il qu’à l’âge de 35 ans, agité d’idées républicai­nes nouvelles, il traverse la France et arrive à Paris dans le chaudron de l’Assemblée nationale. On est en pleine Terreur. Le pays s’entre-tue, les tribunaux révolution­naires ne cessent de faire fonctionne­r les guillotine­s. L’Assemblée nationale, déchirée entre Montagnard­s et Girondins, est sur le point d’exploser. Blanqui se range du côté des Girondins. Mal lui en prend. Dans les luttes fratricide­s opposant les clans révolution­naires rivaux, il est arrêté le 3 octobre 1793 en compagnie de soixante-douze autres députés jugés trop modérés. Il racontera, plus tard, dans «Mon angoisse de dix mois»: « On enferma les députés dans des pièces aveugles n’ayant pour tout meuble que le baquet destiné aux usages communs… On nous installa ensuite dans des chambres sommaires en nous faisant payer 22 francs par mois pour frais de logement ». Comme vie de député, il avait rêvé mieux !

Nommé sous-préfet de Puget-Théniers

À la fin de la Terreur, Jean-Dominique Blanqui fera partie de la chambre des députés suivante, appelée Conseil des Cinq-Cents. Napoléon Bonaparte, devenu Premier Consul, le fera retourner dans sa région natale en le nommant sous-préfet de Puget-Théniers, sur la rive du Var, dans les Alpes-Maritimes. Ainsi que le note l’historien niçois Michel Derlange, le général Masséna et le préfet Dubouchage vont le tenir à l’écart, se méfiant de ses idées révolution­naires. Blanqui, lui, s’emploiera à répandre l’usage de la langue française, à porter secours aux pauvres et à concevoir le projet d’une route de Nice à Grenoble. Jean-Dominique Blanqui est marié à Sophie, qu’il a épousée alors qu’elle avait 16 ans et lui 38. Deux enfants sont nés : Adolphe à Nice et Auguste à Puget-Théniers. Deux opinions politiques opposées. Auguste, terroriste, passera l’essentiel de sa vie en prison et sera surnommé l’« Enfermé ». Adolphe, économiste, sera membre de l’Académie des sciences morales et politiques. Le couple Blanqui vole en éclats. La femme, dépensière, violente et volage, abandonne son mari, ruiné. Adolphe aidera son père, qui mourra à Paris en 1832 lors d’une épidémie de choléra. C’en était fini de ses idées républicai­nes. La France était redevenue une monarchie.

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(Photos DR) C’est dans le petit village de Drap, au nord de Nice (ci-dessus) que Jean-Dominique Blanqui (médaillon) naquit en . Un destin national l’attendait.

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