Monaco-Matin

Une assoc’ promeut des réalisateu­rs de pays émergents

L’associatio­n IEFTA, basée en Principaut­é promeut de jeunes réalisateu­rs de pays émergents à Cannes, et profite du Festival du Film pour réfléchir à la question des réfugiés

- LUDOVIC MERCIER lmercier@nicematin.fr

Àun certain point de votre carrière de réalisateu­r, vous ne faites que répéter ce que vous avez déjà dit. Seuls les acteurs et les décors changent. Est-ce que j’ai envie de ça ? Ou estce que je préfère profiter de mes connaissan­ces pour aider de jeunes talents? Le choix est fait », plaque Marco Orsini, réalisateu­r et président de IEFTA (Internatio­nal emerging film talents associatio­n). En faire toujours plus, pour venir en aide aux autres. C’est un peu un leitmotiv pour cet Américain d’origine portoricai­ne de 52 ans, installé en Principaut­é. Fils de militaire, il a passé son enfance en Extrême-orient, avant de revenir aux ÉtatsUnis pour étudier. Il s’installe alors à Los Angeles où « tout le monde travaille plus ou moins dans le monde du cinéma ».

Changer les choses

Après quelques années à travailler pour une chaîne hispanopho­ne et après avoir réalisé quelques documentai­res, principale­ment à visée sociale, il s’installe à Monaco : « C’est ici qu’il y a le plus d’organisati­ons à but non lucratif qui s’occupent des injustices, de l’indifféren­ce ou des questions environnem­entales, car il est plus facile de lever des fonds ici. Les gens se sentent concernés par ces sujets et veulent participer. » En 2006, il prend part à l’associatio­n IEFTA. Il découvre l’Éthiopie alors qu’il tourne son documentai­re «The reluctant traveller ». C’est le choc : « L’Éthiopie était devenue l’une des économies les

plus croissante­s d’Afrique, et le monde entier semblait l’ignorer. L’Occident était resté à la période «We are the world», avec le sida, la famine et la guerre civile. À cette époque, c’était déjà loin derrière, et le monde s’en fichait ! ». Il y découvre une industrie du film palpitante, et décide d’organiser là-bas une conférence pour montrer aux réalisateu­rs occidentau­x que le

pays avait changé. Puis l’associatio­n décide de venir en aide aux jeunes talents locaux qui fabriquent des longs-métrages avec des bouts de ficelle. « Quand quelqu’un a le pouvoir de changer les choses, il doit le faire. »

Parler des réfugiés sans les exploiter

L’année dernière, pour les dix ans de IEFTA, il lance un

partenaria­t avec le Hautcommis­sariat aux réfugiés des Nations Unies (HCR). Durant le Festival internatio­n du film à Cannes, ils organisent une conférence sur les «bonnes pratiques» à adopter pour traiter le sujet des réfugiés sans exploiter leur misère : « Il n’y avait jamais rien eu de tel à Cannes. Il fallait ça. Mais est ce que l’on répète la même conférence encore et encore ? Non.

Cette année, nous ferons une réception avec les mêmes personnes qui étaient à la conférence. Depuis, ils ont fait des films, et nous en discuteron­s. L’essentiel, c’est de continuer à parler de ce sujet. (...) Le sujet n’est plus populaire, le public est saturé, alors que la situation empire. Nous ne pouvons pas fermer les yeux. C’est à nous de trouver une nouvelle façon d’aborder le sujet. »

Bangladesh et Mongolie

Il n’oublie pas pour autant la mission première de IEFTA, grâce à qui, cette année, trois réalisateu­rs de Bangladesh, et trois autres de Mongolie auront l’opportunit­é de participer aux événements profession­nels du Marché du Film. «Ma plus grande force, c’est de mettre les gens en contact. Je fais se rencontrer des réalisateu­rs émergents, de pays émergents, qui n’ont pas les contacts dont je dispose, avec des gens qui cherchent à financer, distribuer, représente­r des films et des nouveaux réalisateu­rs. Je mets ces deux mondes en relations, et c’est ce que je fais de mieux aujourd’hui. Ma plus belle récompense ? C’est le regard de ces artistes quand ils découvrent Cannes. » Si cette mission d’ange gardien est devenue sa principale activité, Marco n’a pas totalement renoncé à son ancien métier. Récemment, il a officié comme producteur exécutif de la campagne du HCR intitulée « Dangerous crossings », toujours au sujet des réfugiés, et n’exclut pas de revenir derrière la caméra : «Évidemment, si quelqu’un vient me proposer un projet intéressan­t, je le considérer­ai avec la plus grande attention. Mais pour l’instant rien ne m’a motivé à changer de voie, alors je continue à aider les autres. Et j’adore ça. »

 ?? (Photo Jean-François Ottonello) ?? Loin de l’esprit concurrent­iel qui règne dans le monde du cinéma, Marco Orsini s’échine à mettre en relation les talents des pays émergents, avec les producteur­s occidentau­x.
(Photo Jean-François Ottonello) Loin de l’esprit concurrent­iel qui règne dans le monde du cinéma, Marco Orsini s’échine à mettre en relation les talents des pays émergents, avec les producteur­s occidentau­x.

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