Une câlinerie républicaine
Plutôt qu’à faire appel à des tas de ministres, Emmanuel Macron a donc préféré ressusciter le bon vieux ministre d’Etat. Sous la IIIe et la IVe, le plus haut titre gouvernemental allait non pas comme aujourd’hui s’agissant de Gérard Collomb et de Nicolas Hulot à des nouveaux venus dans l’arène politique mais à des caciques ayant été président du Conseil, Premier ministre ou président d’une Assemblée. Dans la longue galerie où sont accrochés leurs portraits, on les reconnaît à leur barbiche, à leur faux-col et à la chaîne de montre émergeant de leur gousset. On leur prêtait une expérience confinant à la sagesse, des amitiés oecuméniques et l’art des compromis. La désignation des ministres d’Etat mettait généralement un terme à de sordides magouilles électorales. Bon choix par exemple pour Paul Doumer, Edouard Herriot, Pierre Mendès-France, Michel Debré ; moins avisé pour Pierre Laval et Philippe Pétain. Pendant des décennies, on nomma deux sortes de ministre d’Etat. Avec et sans portefeuille. Les premiers se voyaient confier un département régalien ; les seconds n’avaient rien d’autre à faire qu’à embrasser des rosières. Sous le règne de Sarkozy, Juppé, Borloo et Alliot-Marie avaient eu droit à cette câlinerie républicaine qui, dans l’ordre protocolaire, les plaçait tout de suite après les deux têtes de l’exécutif. Aucun ne fut nommé sous Hollande qui partagea
plus volontiers son lit que le pouvoir.