Monaco-Matin

Essure : ces ressorts les ont « cassées » pendant des années Dossier

Des milliers de femmes affirment être victimes de graves effets secondaire­s à la suite de la pose de ce dispositif de contracept­ion définitive. Elles militent pour son retrait. Rencontre

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Les implants Essure au coeur d’un nouveau scandale sanitaire ? Ce dispositif de contracept­ion définitive pour les femmes, fabriqué et commercial­isé par le géant allemand Bayer depuis  (et remboursé par la Sécurité sociale depuis ), est sur la sellette. Massivemen­t utilisé en France, il est en effet soupçonné d’être à l’origine de nombreux effets secondaire­s neurologiq­ues, musculaire­s, hémorragiq­ues et allergique­s. Au nom du « principe de précaution», l’associatio­n Resist a demandé, en janvier, le retrait du dispositif du marché, sans être entendue par les autorités sanitaires françaises. Trois de ses membres ont déposé plainte en décembre  et déclenché une procédure de demande d’indemnisat­ion contre Bayer HealthCare.

Pendant quatre années, ses douleurs au ventre ne lui laisseront aucun répit. Additionné­es à de nombreux autres maux, elles feront de Carole « une loque ». Ainsi se décrit-elle. En 2013, Carole est une jeune quadra, très épanouie, dans sa vie privée comme profession­nelle. Maman de deux jeunes enfants, cette habitante de Peymeinade ne souhaite plus de grossesse. « Comme je ne supportais plus la pilule, et que je n’arrivais pas à tolérer davantage les stérilets aux hormones, et au cuivre, j’ai souhaité bénéficier d’une ligature des trompes. Mais mon médecin m’a aussitôt parlé des implants Essure en des termes très positifs: beaucoup moins invasif, par les voies naturelles, sans anesthésie générale etc….» Bref, une méthode de stérilisat­ion définitive qui, a La pose de cet implant, qui se présente comme un petit ressort, entraîne une inflammati­on locale qui, à terme, va boucher définitive­ment les trompes.

priori, a tout pour plaire. Et effectivem­ent, quatre mois plus tard (délai de réflexion imposé), le 25 avril 2013, après une interventi­on très courte, Carole quitte déjà l’hôpital. Elle n’a ressenti presque aucune douleur… « C’est très progressiv­ement que les symptômes sont apparus… Outre le mal de ventre, qui est devenu permanent, j’éprouvais une fatigue intense et une multitude de troubles: des bouffées de chaleur, des règles hémorragiq­ues, des vertiges, une constipati­on chronique… Ils apparaissa­ient, disparaiss­aient…» En novembre 2015, à bout de force, elle retourne voir son gynécologu­e : « Ça ne va pas, je n’en peux plus!» «Vous êtes probableme­nt en préménopau­se ». Les analyses de sang infirmeron­t

cette hypothèse. « On m’a alors parlé de burn-out! Je répondais que non: mon boulot, ma vie, tout allait bien ». Les mois passent, d’autres symptômes apparaisse­nt: « parfois, je perdais la voix, ou elle était éraillée, j’avais des maux de jambes, de dos… J’étais essoufflée, j’avais des démangeais­ons à la tête, des cloques sur la peau, ma mémoire devenait défaillant­e - jusqu’à perdre les mots simples - et souffrais même d’incontinen­ce… A 40 ans, « Je l’ai même « vendu » à mes copines »,

« il m’avait précisé que c’était beaucoup moins invasif que la ligature des trompes, que ça se faisait sous anesthésie locale, en ambulatoir­e… Je lui ai dit : c’est parfait, c’est naturel, vous pouvez y aller tout de suite ! »,

« au niveau ORL d’abord sous forme d’otites, de sinusites…, ensuite, j’ai été victime d’hémorragie­s intenses, je souffrais de douleurs pelviennes atroces, pendant plusieurs jours… Ensuite, progressiv­ement, j’ai eu des problèmes articulair­es, au niveau des poignets, des genoux… et surtout je ressentais une fatigue intense… J’étais vidée de l’intérieur ». « j’ai coûté une fortune à la sécu ». sentais mourir… » découvrant tout ça ».

« Le  février dernier, j’ai eu une hystérecto­mie totale ; on m’a simplement laissé les ovaires ». « Débarrassé­e des implants »,

fragments de son utérus » j’avais le corps en vrille!» Le 9 décembre 2016, «l’affaire Essure », portée par l’associatio­n Resist, présidée par Marielle Klein (lire ci-dessous), lanceur d’alerte et victime elle-même, est médiatisée. « J’ai été sur le site de l’associatio­n, j’ai lu les témoignage­s et, enfin, j’ai compris ce que j’avais. Pendant toutes ces années, je n’avais jamais fait le lien!» Le médecin qu’elle consulte est au courant de la polémique, tente de minimiser, mais Carole est formelle: elle veut qu’on lui retire les implants. L’interventi­on a lieu le 9 janvier dernier, « soit 3 ans et 8 mois plus tard. Le jour même j’ai ressenti une améliorati­on!» Mais, il lui faudra attendre quatre mois supplément­aires pour que tous les symptômes disparaiss­ent. « Aujourd’hui, je n’ai plus rien ; je nage à nouveau trois fois par semaine, « Jeme « ça vient de moi, je somatise… » « J’ai été très choqué en « je dors très bien… Seuls persistent quelques acouphènes». Comme un vestige des temps difficiles. Si Carole est sans haine, elle confie toutefois être en colère: « Pourquoi, comment aucun lien n’at-il pu être établi entre les implants et mes symptômes? Que savaient les médecins des effets secondaire­s? Mon propre médecin me dit qu’il n’aurait jamais imaginé que cela puise produire de tels effets. Aujourd’hui, il ne pose plus ces implants, mais je lui ai demandé: « avez-vous contacté toutes vos patientes qui ont été implantées?» Même si une majorité de femmes les supportent a priori bien, je ne comprends pas que l’on pose encore ces implants. Aujourd’hui, je suis libérée, Mais ils m’ont gâché la vie pendant des années ».

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(DR) Carole,  ans
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