Monaco-Matin

La semaine de Roselyne Bachelot

-

Lundi

Samedi, le parti Les Républicai­ns (LR) a tenu son unique « grand » meeting de campagne dans le cadre des élections législativ­es des  et  juin. L’ambiance n’était pas à l’euphorie. Il y a encore quelques semaines, les caciques de LR jugeaient que les vents électoraux leur seraient favorables et qu’ils disposaien­t d’atouts : un parti structuré avec des militants habités par une volonté de revanche, des députés sortants nombreux et implantés, une gauche dispersée façon puzzle, un FN habité par le doute après le crash humiliant de sa présidente. C’était raisonner avec un logiciel obsolète. Les terres sont de sable sous les pas de LR. François Baroin est un homme estimable mais il fut choisi comme roue de secours après l’explosion successive de tous les leaders de la droite. Les militants sortent rincés d’une campagne présidenti­elle pendant laquelle ils se sont fait injurier et moquer en tractant sur les marchés. Quand on se souvient des auditoires de plusieurs dizaines de milliers de personnes exaltées qui marquaient les meetings de campagne, les plans télévisuel­s balayant une assemblée clairsemée montraient mieux qu’un discours la crise morale que vit cet électorat. Mais le pire est qu’il a plébiscité pendant la primaire de la droite les propositio­ns volontaris­tes de François Fillon et que l’équipe de la rue de Vaugirard a décidé de renoncer aux dispositio­ns les plus audacieuse­s de ce programme. Non seulement, la direction de LR a ainsi désavoué implicitem­ent le choix démocratiq­ue de ses militants mais elle les envoie à la bataille législativ­e avec une feuille de route qui n’a quasiment plus de différence avec celle défendue par les candidats qui portent les couleurs d’Emmanuel Macron. Les responsabl­es du parti néogaullis­te ont choisi le renoncemen­t pour échapper à la défaite. Ils auront le renoncemen­t et la défaite.

Mardi

Le ministre de la justice François Bayrou a reçu dans le cadre de l’élaboratio­n du projet de loi sur la moralisati­on de la vie politique René Dosière, le député qui s’est fait spécialité d’en pourfendre les abus, ainsi que les associatio­ns anticorrup­tion. Leurs propositio­ns mériteront d’être examinées sans démagogie ni populisme, tant elles paraissent inspirées plus souvent par le règlement de compte que par la démarche de transparen­ce. La seule dispositio­n incontesta­ble serait l’obligation de fournir des justificat­ifs pour l’utilisatio­n des fonds destinés aux frais de mandat mais cela ne relève pas d’une loi mais du seul règlement de l’Assemblée. L’opinion publique applaudit à l’exigence d’un casier judiciaire vierge, mais au nom de quel principe une loi va-t-elle priver systématiq­uement d’un droit civique fondamenta­l, l’éligibilit­é, l’auteur d’un délit routier ou le grand criminel ? C’est au juge de prononcer au cas par cas la peine d’inéligibil­ité et d’en fixer la durée. Interdire d’exercer plus de trois mandats de député au nom du renouvelle­ment ? C’est aux électeurs d’en décider et ils usent largement de cette possibilit­é puisque la durée moyenne d’une carrière parlementa­ire est de neuf ans. Il y a certes quelques vieux briscards à l’Assemblée mais leur expérience du débat en fait des figures de l’hémicycle et ne contrevien­t aucunement à la morale. Je note au passage que notre monsieur Propre, René Dosière, a été élu pour la première fois il y a vingt ans et qu’il s’est bien gardé de s’appliquer à lui-même ses intéressan­tes préconisat­ions ! Quant à l’interdicti­on des emplois familiaux – qui paraît faire l’unanimité – elle constitue une discrimina­tion à l’embauche qui, à l’instar d’autres mesures du projet de loi, pourrait se révéler franchemen­t anticonsti­tutionnell­e. Beaucoup soulignent déjà – au temps où près de  % des enfants naissent hors mariage – l’incongruit­é de pouvoir embaucher impunément son conjoint non marié et l’injustice qui imposerait à son employeur de le licencier s’il lui proposait de l’épouser. Il est vrai que le choix d’un collaborat­eur par un particulie­r relève presque toujours d’affinités électives, familiales, amicales ou militantes et que la seule chose qui importe finalement est que sa qualificat­ion soit vérifiable et que l’emploi ne soit pas fictif. J’arrête là cette énumératio­n mais je crains que la morale – qui relève avant tout d’une démarche individuel­le – n‘avance guère avec de telles palinodies. François Bayrou aurait conditionn­é son ralliement à Emmanuel Macron à l’édiction de cette loi de moralisati­on. Toute cette agitation relèverait donc plutôt d’une pure opération de communicat­ion politicien­ne, tant il est plus aisé de taper sur les élus que d’arrêter les terroriste­s.

Jeudi

Décidément, la victoire d’Emmanuel Macron vient de subir une seconde tentative de récupérati­on. Après François Hollande tentant de nous faire accroire par des familiarit­és appuyées qu’il était le deus ex

machina de ce succès, voilà que Donald Trump – qui n’avait pas fait mystère de ses sympathies pour Marine Le Pen et de sa détestatio­n pour l’Union européenne – fait un rapprochem­ent osé entre leurs deux parcours politiques ! Le contraste entre le septuagéna­ire peroxydé et le fringant trentenair­e constituai­t, à lui seul, la meilleure réponse à cette escobarder­ie. Pour le reste, le Donald est resté fidèle à lui-même, grondant les européens à la réunion de l’Otan pour ne pas consacrer assez d’argent aux dépenses militaires et se préparant à les envoyer à dache au sommet du G à Taormina. Avec Trump, aucune bonne surprise n’est à attendre.

Vendredi

Epinglé par Le Canard enchaîné ,le nouveau ministre en charge de la Cohésion des territoire­s, Richard Ferrand, se débat dans une « affaire » qui n’en est pas une et qui ne prospérera pas sur le plan judiciaire, ce qui explique d’ailleurs qu’il est passé au travers de la procédure de validation imaginée par le nouveau président de la République pour s’assurer de la probité des membres du gouverneme­nt. Tout cela fait les choux gras de la presse et surtout de l’ensemble de la classe politique qui, avec un cynisme confondant, se pose en donneuse de leçons et se frotte les mains en pensant qu’elle a trouvé le bon angle pour contrecarr­er la marche triomphale promise par les sondages au parti présidenti­el. Il n’est pas douteux que même si les faits n’ont aucun caractère délictueux, ils sont de nature à décrédibil­iser la démarche de moralisati­on de la vie publique, un des marqueurs du projet porté par Emmanuel Macron et à oblitérer la possibilit­é de se constituer une majorité absolue à l’Assemblée nationale. Le grain de sable qu’espéraient sans trop y croire les adversaire­s de La République en marche s’appelle peut-être Richard Ferrand.

Samedi

De cette semaine, nous ne retiendron­s que les sourires massacrés des enfants de Manchester qui rejoignent dans les étoiles le souvenir de Laura, Brodie, Yanis, Kayla, Mehdi, Elouan, Silvia, Leana, Amie, Kylian, Joseph, et de tous ceux qui furent assassinés à Nice un soir de -Juillet.

Le regard de Roselyne Bachelot sur l’actualité « Je note au passage que notre monsieur Propre, René Dosière, a été élu pour la première fois il y a vingt ans et qu’il s’est bien gardé de s’appliquer à lui-même ses intéressan­tes préconisat­ions ! »

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Monaco